Léopold Mandić

Béatification

Sainte En mars 1974 est publié le Décret sur les vertus héroïques du Serviteur de Dieu, suivi en février 1976 par le Décret sur les miracles attribués à son intercession.

Au mois de mai, il fut proclamé "Bienheureux" par Paul VI.

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Homélie de Paul VI

Rome, Place Saint-Pierre, 2 mai 1976
Qui est-il, qui est-il qui nous rassemble ici aujourd'hui pour célébrer en son nom béni une irradiation de l'Évangile du Christ, un phénomène inexprimable, mais clair et évident, celui d'une transparence enchanteresse, qui nous laisse entrevoir dans le profil de un humble frère, un personnage à la fois exaltant et presque déconcertant: regardez, regardez, c'est saint François ! tu le vois? Regardez comme il est pauvre, regardez comme il est simple, regardez comme il est humain! c'est lui-même, saint François, si humble, si serein, si absorbé qu'il paraît presque extatique dans sa propre vision intérieure de la présence invisible de Dieu, et pourtant à nous, si présent pour nous, si accessible, si disponible, que on dirait presque qu'il nous connaît, qu'il nous attend, qu'il connaît nos affaires et qu'il peut lire en nous. . . Regardez bien: c'est un pauvre petit capucin, il semble souffrant et vacillant, mais si étrangement sûr qu'on se sent attiré et enchanté par lui. Regardez attentivement, avec la lentille franciscaine.

Tu le vois? Est-ce que tu trembles ? qui as-tu vu? Oui, avouons-le: c'est une image faible, populaire, mais authentique de Jésus ; oui, de ce Jésus, qui parle simultanément au Dieu ineffable, au Père, Seigneur du ciel et de la terre ; et il nous parle, à nous, petits auditeurs, enfermés dans les proportions de vérité, c'est-à-dire de notre petite et souffrante humanité. . . Et que dit Jésus dans son pauvre oracle ? Oh! grands mystères, ceux de la transcendance divine infinie, qui nous laisse enchantés, et qui prend immédiatement un langage émouvant et passionnant : l'Évangile résonne: "Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et opprimés, et je vous rafraîchirai".
(Matt. 11, 28).

Alors qui est-il? c'est le Père Léopoldo; oui, le serviteur de Dieu le Père Leopoldo da Castelnovo, qui avant de devenir frère s'appelait Adeodato Mandić, un Dalmate, comme saint Jérôme, qui devait certainement avoir dans son tempérament et sa mémoire la douceur de cette charmante terre adriatique, et dans son cœur, et dans l'éducation domestique la bonté, honnête et pieuse, de cette forte population vénitienne-illyrienne. Il est né le 12 mai 1866 et est mort à Padoue, où, devenu capucin, il a vécu la majeure partie de sa vie terrestre, qui s'est terminée à l'âge de 76 ans, le 30 juillet 1942, il y a un peu plus de trente ans.

Ici, dans ce cas, le droit canonique est devenu indulgent, dérogeant à la norme qui reporte la discussion des vertus d'un Serviteur de Dieu à cinquante ans après sa mort ; mais comment reporter cet acte procédural alors que la vox populi en faveur des vertus du Père Leopoldo, au lieu de s'apaiser avec le temps, est devenue plus insistante, plus documentée et plus sûre de son témoignage? Le jugement de l'Église devait s'abandonner au chœur spontané de ceux qui ont connu l'humble capucin, ou ont expérimenté son intercession thaumaturgique (Cf. Codex Iuris Canonici, can. 2101), en anticipant ses conclusions favorables, pour que proclamer l'exception morale et la valeur spirituelle du Père Leopoldo ne sont pas seulement ceux qui collectent l'héritage posthume, mais il y en a encore un certain nombre qui peuvent soutenir sa célébration en disant: je l'ai connu ; oui, c'était un saint religieux, un homme de Dieu, un de ces hommes singuliers qui donnent immédiatement l'impression de leur vertu surnaturelle.

Et immédiatement dans la mémoire de ceux qui connaissent un peu l'histoire de la famille religieuse des Capucins, surgissent les grandes figures de ces Frères, fidèles à la tradition franciscaine la plus rigoureuse, qui en personnifiaient la sainteté ; et parmi ceux-ci, limitons-nous à un personnage littéraire typique, bien connu de tous, Fra' Cristoforo del Manzoni. Mais non: Fra' Leopoldo était plus petit, en stature, en capacités naturelles (il n'était même pas un prédicateur, comme le sont beaucoup de capucins talentueux), il n'avait même pas une bonne santé physique, c'était vraiment un pauvre petit frère. Cependant, no

us ne pouvons ignorer une note particulière; il était originaire de la rive levantine de l'Adriatique, de Castelnovo, à l'embouchure de Kotor, sur le territoire de Croatie - Monténégro - Herzégovine - Bosnie ; et il garda toujours un amour fidèle pour sa terre, même si, ayant vécu à Padoue, il n'en était pas moins attaché à sa nouvelle patrie hospitalière et surtout à la population parmi laquelle il exerçait son ministère silencieux et infatigable. La figure du bienheureux Léopold résume donc cette bivalence ethnique, presque comme si elle la fondait dans un emblème d'amitié et de fraternité, que chacun de ses fervents disciples devra s'approprier.

Ce fait biographique particulier du bienheureux Léopold est le premier accomplissement d'une pensée, d'un objectif dominant dans sa vie. Comme nous le savons tous, le Père Leopoldo était « œcuménique » ante litteram, c'est-à-dire qu'il rêvait, prévoyait, promouvait, même sans agir, la recomposition de l'Église dans une parfaite unité, même si elle est jalousement respectueuse des multiples particularités de son appartenance ethnique, composition; unité voulue par les origines historiques et plus encore par la volonté sacrée et mystérieuse du Christ, fondateur d'une Église, le tout pénétré des exigences essentielles du vœu suprême de Jésus: ut unum sint, qu'ils soient tous un et aient la même foi, le même baptême, le même Seigneur s'unissent en un seul Esprit, lien de paix.
(Cf. Eph. 4, 3 ss.; Io. 17, 11-21).

Oh! que le bienheureux Léopold soit un prophète et un intercesseur de grande grâce pour l'Église de Dieu !
Mais la note particulière de l'héroïsme et de la vertu charismatique du bienheureux Léopold en était une autre ; qui ne sait pas ? c'était son ministère d'entendre les confessions. Le regretté cardinal Larraona, alors préfet de la Sacrée Congrégation des Rites, écrivait, dans le décret de béatification du père Leopoldo de 1962: "sa manière de vivre était la suivante : célébrant le sacrifice de la messe tôt le matin, il s'asseyait dans la cellule confessionnelle, et là il resta toute la journée à la disposition des pénitents. Ce niveau de vie, il le maintint pendant une quarantaine d'années, sans la moindre plainte. . . ".

Et c’est, croyons-nous, le titre premier qui a valu à cet humble capucin la béatification que nous célébrons aujourd’hui. Il se sanctifiait principalement dans l'exercice du sacrement de Pénitence. Heureusement, de copieux et splendides témoignages ont déjà été écrits et diffusés sur cet aspect de la sainteté du nouveau bienheureux. Il suffit d'admirer et de remercier le Seigneur qui offre aujourd'hui à l'Église une figure si singulière de ministre de la grâce sacramentelle de la Pénitence; qui d'une part appelle les prêtres à un ministère d'une importance si capitale, d'une pédagogie si actuelle, d'une spiritualité si incomparable; et qui rappelle aux fidèles, qu'ils soient fervents ou tièdes et indifférents, quel service providentiel et ineffable aujourd'hui encore, ou plutôt aujourd'hui plus que jamais, la confession individuelle et auditive est pour eux, source de grâce et de paix, école de vie chrétienne, un confort incomparable dans le pèlerinage terrestre vers le bonheur éternel.

Puisse le bienheureux Léopold réconforter les âmes amoureuses de croissance spirituelle dans la fréquentation assidue du confessionnal, que certains courants critiques, certainement pas inspirés par la sagesse chrétienne et mûre, voudraient reléguer aux formes dépassées de spiritualité vivante, personnelle et évangélique. Que nos bienheureux puissent appeler à ce tribunal sévère, certes, de pénitence, mais non moins aimable refuge de réconfort, de vérité intérieure, de résurrection à la grâce et de formation à la thérapie de l'authenticité chrétienne, de très nombreuses âmes engourdies par le profanes fallacieuses de l'usage moderne, pour leur faire éprouver les consolations secrètes et renaissantes de l'Évangile, de la conversation avec le Père, de la rencontre avec le Christ, de l'ivresse du Saint-Esprit, et pour rajeunir en eux l'inquiétude du bien des autres, de la justice et de la dignité du costume.

A vous, frères franciscains de l'Ordre capucin, merci d'avoir donné à l'Église et au monde un "type" de votre école austère, amicale et pieuse d'un christianisme aussi fidèle à lui-même que capable de raviver dans les cœurs des au peuple la joie de la prière et de la bonté.

Et honneur à vous, Enfants de Croatie, du Monténégro, de Bosnie-Herzégovine et de toute la Yougoslavie, pour avoir généré à notre époque un exemple si élevé et si humain de votre tradition catholique.

Et toi, Padoue, tu sais honorer près de ton saint Antoine ce frère non dissemblable de la généalogie franciscaine, et tu sais inculquer aux nouvelles générations les vertus chrétiennes et humaines déjà si illustres dans ton histoire.