Lettres précédentes / Lettres suivantes

Index Lettres Vol VI / Index allemand / Index général


Nr.2161

An Fräul. Stéphanie Gourd

A.R.T.E.

Saint-Maurice, 25 Mai 1868.

Chère fille en N.-S.,

Je suis venu passer deux jours en notre maison du noviciat; je vous écris du pied du Très Saint Sacrement, car ma cellule a le bonheur de correspondre avec les rayons de son trône.

Vous êtes donc toute souffrante! pauvre fille! C'est bien ce que je prévoyais devoir vous arriver à la suite de tant de nuits d'insomnie, et de tant de veilles! Mais comme Dieu vous voulait autour de cette chère malade, il en voulait sans doute les conséquences un peu pénibles à la pauvre nature.

Aussi, chère fille, c'est une loi sage de vaquer à votre état de névralgie sans vous inquiéter du reste, parce que c'est la souffrance qui fait l'état de cette vie. Ainsi, ne vous reprochez pas votre inutilité; elle est, au contraire, très laborieuse votre vie devant Dieu.

Unissez-vous à Dieu par le sacrifice de cet état, et les bonnes pensées qui vous viennent par instant ce sont des rosées du Ciel; faites le nécessaire (et pas plus) de vos exercices de piété. Oui, calmez bien le système nerveux fatigué, tâchez de prendre un peu de sirop de codéine; il me fait beaucoup de bien, quand j'ai des insomnies; il y en a partout chez les pharmaciens.

Vous avez bien fait de suivre un peu la retraite du Tiers-Ordre. C'est votre grâce d'introduction au Très Saint Sacrement.

P... est un homme de Dieu, il fait du bien aux âmes, il ne cherche que Dieu.

La bonne rosée du matin, dans quelque contrée que ce soit, fait du bien à toute petite plante. C'est toujours du Ciel qu'elle vient!

Je désire bien avoir quelque occasion d'aller de vos côtés pour aller vous voir; mon âme vous languit, vous avez tant eu d'épreuves!

Je vous bénis, chère fille, de la meilleure bénédiction du Très Saint Sacrement auquel je vous donne et consacre sans cesse comme sienne.

EYMARD, S.S.S.


Nr.2162

An Marg. Guillot

Saint-Maurice, 27 Mai 1868.

Chère fille en Notre-Seigneur,

Je reçois ici votre lettre du 25, je viens y répondre.

1· Si la Très Sainte Vierge ne vous guérit pas, il faudra bien aller à Vichy; votre santé appartient à la famille.

2· soeur B. a retiré sa nièce, c'est autant de fait; elle a compris sa position vis-à-vis de ces dames.

Vous ferez bien d'écrire au père de cette petite l'adresse de soeur Benoîte, qui a son enfant. Votre prudence taira le reste; à lui de faire ce qu'il voudra.

3· Les voeux de Nemours ont toujours été soumis à l'autorité épiscopale d'Angers, car Monseigneur a oublié qu'il avait consenti à la fondation; et enfin jamais je n'ai pensé autrement et ai toujours regardé les Soeurs de Nemours comme les filles d'Angers.

Or c'est moi que cela regarde, et non le Professeur de la Sorbonne, qui n'a pas mission ni science de la chose. Je voudrais bien le connaître. Il a sans doute répondu comme on répond à une malade qui se plaint d'un mal qu'on ignore.

Est-ce que les Soeurs n'ont pas renouvelé entre mes mains leurs voeux à la retraite dernière?

Dites-leur que leurs voeux ont toujours été de la Société et pour la Société.

4· Vous faites bien de couvrir le P. Champion. Maintenant on s'appuie de lui parce qu'on se sent condamné par moi.

Je lui ai écrit; il m'a répondu qu'on lui ferait dire le contraire.

Voilà-t-il des femmes à agiter et à troubler le monde pour leurs questions personnelles! Pauvres têtes! Dieu vous en a débarrassées, c'est une croix de moins!

Rien de nouveau dans nos deux procès, ils vont leur train puisqu'il n'y a pas moyen autrement. Cependant les lettres sont toujours séquestrées, et nous y tenons et y tiendrons.

5· Laissez travailler le zèle et le dévouement de Mr Grolleau pour vous. Je lirai les notes de soeur Marie. Patience pour la maison future.

6· Travaillez bien à faire mourir l'irritation de sentiment contre toutes les personnes. Travaillez encore plus à les oublier.

Il faut reconquérir la liberté et la sérénité de l'esprit, afin qu'il puisse être simplement et clairement à tout.

Nourrissez-vous de l'esprit de la gloire de Dieu par vos divers états corporels et spirituels. Dieu nous fait remplacer quand il nous emploie à autre chose. On n'est bon et bien que là où Dieu a mis notre travail et notre pain.

Dieu remplace la communion sacramentelle par la communion de sa présence de grâce et d'amour. Il faut cependant désirer la première, parce que Jésus et l'Eglise le veulent.

Je ne sais quand j'irai à Angers, peut-être bientôt. Je négocie la vente de quelques obligations romaines; je prie Dieu pour cela. A bientôt donc, chère fille, si Dieu le veut.

Je vous bénis et vous ordonne de demander votre guérison à la bonne Mère avant la fin de son beau mois.

Tout à vous en Notre-Seigneur.

EYMARD.

P. S. - Le P. Dauphin, Supérieur des Maristes à Paris, m'a présenté une bonne fille pour vous: trente-quatre ou trente-cinq ans, habile couturière, bonne santé. Elle me paraît bien vertueuse et une âme intérieure.

Je l'examine; je l'ai vue deux fois. Peut-être est-ce un trésor caché; cependant il faut attendre. Je regarde le côté de l'humilité, de l'abnégation, et de la mortification dans les petites choses.


Nr.2163

An Fräul. Thomas

A.R.T.E.

Saint-Maurice, 28 Mai 1868.

BIEN CHERE FILLE EN N.-S.,

Merci de votre lettre. Dieu vous a fait faire un bon voyage, je l'en avais prié. Vous voilà près de votre tante, soyez-y comme un ange de prière et de consolation. Quant à l'abnégation personnelle, il n'y a rien à faire de plus, sinon de lever souvent les yeux vers le ciel et d'y envoyer cet encens du Calvaire; il y est toujours le premier reçu.

Dieu voulait bien ce voyage, vous voyez les choses par vous-même.

Je vois bien que vous n'avez qu'à regarder et que votre position est délicate, pénible même; mais c'est là la loi de prudence: rappelez-vous que rien n'est despote comme une domestique rendue nécessaire ou qui se croit ainsi.

Combien resterez-vous de temps sur ce calvaire? Restez-y, chère fille, tant que le devoir le dit ou la vraie et actuelle charité. Il est bien sûr que si cet état devait se prolonger, mieux vaudrait revenir.

Tenez-vous unie à Dieu par vos exercices pieux surtout, lisez mon petit livre si bon, je désire qu'il vous fasse grand bien. - Je vais repartir pour Paris. Je suis comme vous m'avez vu dimanche, mon coeur bat toujours en palpitations, c'est nerveux je pense; la migraine vient jusqu'à la porte, puis s'en va, c'est l'effet des chaleurs. - Dimanche nos ordinands entrent en retraite, priez pour eux. Je ne cesse de le faire pour vous, chère fille, et vous bénis bien en N.-S.

EYMARD.

Mademoiselle Théodorice Thomas,

1, rue des Gobelets,

à Saulieu (Côte-d'Or).


Nr.2164

A Mademoiselle Adèle.

Saint-Maurice, 29 Mai 1868.

Chère fille en N.-S.,

Ne vous découragez pas pour m'écrire, quand bien même je ne réponds pas de suite; au moins je réponds de suite devant Dieu en priant spécialement selon votre état et les besoins que m'exprime votre lettre. Puis, écrivez toujours comme vous pensez: c'est au moins naturel et simple; vous ne pourriez faire autrement, d'ailleurs.

Je ne vous apprends rien que vous ne sachiez peut-être, chère fille; mais vous le saurez mieux, le sachant par deux.

C'est bon de rendre compte de son âme de temps en temps; le démon ne peut se cacher dans ses plis et replis, la nature n'a pas le temps de s'endormir, et la grâce y gagne parce qu'elle est mieux connue.

Vivez du jour au jour, chère fille, et vous accomplirez bien mieux tous vos devoirs et vous ferez mieux les sacrifices du voyage en vous disant: Ce sera fini ce soir.

D'ailleurs, il y a une grande loi de sainteté toujours vraie, toujours bonne et toujours puissante en oeuvres: c'est la loi de la sainte Volonté de Dieu sur nous. Dans cette divine volonté actuelle et personnelle se trouve la grâce spéciale qui nous sanctifie, et cette grâce spéciale est attachée à chaque heure, à chaque action; passée l'heure, le temps de l'action, cette grâce est finie.

Maintenant, écoutez bien mes conseils, chère fille: 1· Vous êtes la religieuse de l'amour de Jésus. Le Carmel a fait place à cette vocation personnelle: agissez selon la signification de ce beau nom!

2· Un maître nourrit sa servante: Communiez donc tous les jours. Que sera votre travail si vous ne mangez pas le pain de la vie! Mangez pour pouvoir travailler.

Comme vous êtes l'épouse voyageuse de Jésus, gardez-lui fidélité d'honneur et d'amour. Faites-vous consoler et fortifier par Lui, renvoyez-lui la gloire de tout.

Soyez toujours gracieuse devant le devoir; aimable à vos parents, à vos amis; contente de tout et de tous, puisque Dieu le veut ainsi.

Mais l'oraison avant tout: c'est la provision matinale de la manne du ciel, le mot d'ordre pour tout le jour, et, le faisant, vous passerez une bonne journée. Puis, mettez-moi au budget de vos prières; j'en ai tant besoin!

Je vous bénis bien eucharistiquement en N.-S., chère fille.

EYMARD, Sup.


Nr.2165

An Fräul. Thomas

Paris, 2 Juin 1868.

CHERE FILLE,

J'ai reçu votre lettre ce matin, je vous en remercie, car vous comprenez notre peine et nos prières.

Il faudra bien boire le calice jusqu'à la lie, puisque c'est Dieu qui vous le présente; mais buvez-le en vraie fille de la croix, car celui-là ne reviendra plus.

Je comprends bien votre peine, je m'attendais à votre générosité; nourrissez bien ce feu de la grâce, de la prière et des saintes lectures, afin de vous consoler en Dieu.

Je suis allé ce matin chercher votre eau de La Salette. Je vous l'envoie de suite, vous la recevrez par le même courrier. J'ai trouvé deux lettres sous votre porte, je vous les envoie.

Allons, chère fille, c'est le moment du travail pour Dieu et purement pour Dieu, travaillez bien le travail de sa gloire.

Soyez assurée que nous ne vous oublions pas dans nos faibles prières.

En Jésus

Chère fille,

Tout à vous.

EYMARD.


Nr.2166

An P. Stafford

Paris, 2 Juin 1868.

BIEN CHER PERE,

Impossible d'aller à Saint-Maurice, remplacez-moi. Notre-Seigneur vous a fait commencer la retraite; c'est Lui qui vous la fera continuer et achever.

Tout à vous en N.-S.

EYMARD, S.


Nr.2167

An Gräfin v. Andigné

Sainte-Trinité, 1868, 7 Juin.

CHERE FILLE EN N.-S. J.-C.,

Je viens vous écrire deux mots afin de remplir ma promesse et vous tirer de peine; je vais bien depuis deux à trois jours, j'ai repris tous mes exercices depuis jeudi.

Notre Ordination a été bien édifiante, elle a eu lieu à Versailles; nous y avons un minoré, un diacre et un prêtre.

Le fr. Frédéric a dit ce matin sa première Messe à 8 h. Je l'ai assisté; il l'a bien dite et pieusement dite. Le bon Mr T... y a assisté, il va bien; je voulais le garder à dîner, il était retenu. Votre fille vous attend avec bonheur, je crois qu'elle finira par triompher de cette tentation. Je le désire, car son salut y trouvera grâce et force.

Et vous, chère fille, que faites-vous? Tout ce que Dieu veut et comme il le veut. Vous soupirez sans doute après votre Saint Sacrement qui vous désire aussi vivement. Mais le devoir! le grand devoir vous voulait là!

Que Dieu vous bénisse bien et vous ramène un peu mieux.

Je vous bénis bien en N.-S.

EYMARD.


Nr.2168

An Frau v. Andigné

ohne Datum!

Sainte Trinité.

Ne pas laisser la sainte Communion pour les inquiétudes du passé - sous peine de pénitence.

Savoir que :

1· Les répugnances du devoir ne sont jamais péchés.

2· Que la Volonté de Dieu du moment, manifestée par la nécessité ou la convenance d'état pour le prochain, doit être la règle souveraine de la vie.

3· Que lorsque Dieu a changé un devoir pieux par un devoir de charité, par exemple des visites à recevoir, l'exercice de piété a été remplacé par un meilleur.

4· Péché douteux - péché nul.

5· Devoir douteux - devoir nul.

6· Etat de trouble - tentation à laisser passer et attendre que le nuage soit passé. Ou, si l'on est obligé d'agir, se dire : Si je n'avais pas ce trouble, qu'est-ce que je ferais? Eh bien, le faire.

Enfin :

Vous laisser conduire par la grâce du moment, - aller à Dieu par la liberté, - vous recueillir en son amour.

Que Jésus vous bénisse!

EYMARD.


Nr.2169

An Fräulein Thomas

Paris, 8 Juin 1868.

BIEN CHERE FILLE EN N.-S.,

Vos lettres nous consolent de votre absence et nous feraient redoubler de prières si nous ne vous étions pas tout dévoués. Voilà le fr. Frédéric prêtre: il vous écrit un petit mot. Hier, il a dit sa première messe avec piété et édification; j'ai prêché le soir sur le Sacerdoce: comment Dieu prépare et fait les prêtres, et ce que les prêtres doivent faire pour sa gloire. Voilà le fr. Marius diacre et fr. Vincent de Bruxelles minoré.

Le bon Maître augmente sa petite famille insensiblement; heureux si elle lui est toujours agréable.

Nous avons pris chez vous les étoffes du dais; le fr. Frédéric le fait coudre par une de ses parentes, venue à son ordination, de Marseille.

Vous êtes toujours sur la croix, chère fille, restez-y bien unie à Jésus crucifié; vous faites vos preuves d'amour et la vertu entre avec les plaies et le sang. Oui, quand la nature voudrait éclater, mettez la main de la grâce sur elle et tenez-la ferme; il faut qu'elle soit plutôt étouffée que de la laisser prendre le dessus. Oh! oui; il en coûte l'agonie et la mort de garder un silence de vertu.

Je vous quitte, je vais à Saint-Maurice pour un jour, leur donner la retraite du mois. - Que Dieu vous bénisse, chère fille, et vous console!

Tout à vous en N.-S.

EYMARD.


Nr.2170

An Marg. Guillot

Paris, 12 Juin 1868.

Chère fille,

J'ai reçu vos deux lettres, merci; j'ai écrit aujourd'hui à Mr Grolleau sur l'avance que je vous ai demandée étant à Saint-Maurice et n'ayant que le temps juste d'une dépêche. Je lui ai expliqué.

Je savais votre secours de Providence, j'avais écrit votre embarras sur cette question.

Si, à Lantignié, on ne répond rien, on veut les 11.000 francs. Ces dames ne m'écrivent plus, je ne puis me mettre en avant. Je vous envoie votre liste avec quelques notes.

Pour les petites choses, il faudra être large.

C'est le frère Charles qui a mis la caisse, que j'ai apportée d'Angers, au chemin de fer. Dans la lettre que vous leur ferez écrire par une Soeur, le leur dire: qu'elles la réclament alors à la gare de Belleville.

J'ai remis à soeur Philomène la montre de soeur Benoîte.

Que je les plains, ces pauvres filles! Elles ne voient pas, elles ne voient que naturellement. Oh! bonté! oui, nous avons nos défauts, mais c'est l'Oeuvre de Dieu qu'il faut voir, c'est son service.

Elles croyaient que l'on ferait un couvent où elles seraient maîtresses! le bon Dieu nous a préservés de cette faute et de ce malheur.

Je les crois dans une certaine bonne foi qui les excuse, et je leur pardonne encore plus, et je voudrais les voir dans leur grâce et dans le bon service du Maître.

Obéissez bien à votre médecin et à votre Supérieur, surtout pour Vichy, s'ils y tiennent. Votre santé ne vous appartient pas. Il faut soigner la monture pour le voyage et tourner la meule de l'obéissance.

Les maladies sont les retraites de grâce des Supérieurs, c'est le temps de leur repos en Dieu. Dieu est alors le Supérieur de la maison, et tout ne va que mieux.

Je vous bénis, chère fille. Dès que nos obligations seront vendues, j'irai à Angers, je n'attends que cela.

Tout à vous en Notre-Seigneur.

(Cette lettre a été copiée sur le texte de la Révérende Mère Marguerite, non sur l'original).


Nr.2171

An Hochw. Grolleau, Angers

Paris 12 juin 1868

Cher Monsieur le Supérieur,

Je voulais vous écrire mercredi, mais les préparatifs de la Fête-Dieu m'ont tellement absorbé que je n'ai pas eu un moment.

Je me suis trouvé pris par une demande du P. Audibert, pressée. N'étant pas à Paris, il avait besoin de 7.000 Fr. J'avais remis des obligations à vendre `la bourse, mais ne me trouvant pas à Paris, et la chose demandant quelques jours de retard; sachant de la donatrice à qui j'avais écrit les exigences de Soeur Benoîte, l'envoi par elle des 11.000 Fr, j'ai envoyé à Brétigny une dépêche pour dire au P. Audibert de demander l'avance des ces 7.000 Fr à la Mère Marguerite, comme il les fallait à midi. vous m'excuserez, cher Monsieur le Supérieur, si je ne me suis pas adressé à vous de suite et directement, je craignais n'arriver pas à l'heure; sous peu de jours je les porterai.

J'ai reçu la visite de l'oncle de S. Philomène, qui est venu me faire bien des questions, auxquelles j'avais déjà répondu déjà (c'est M. Rattier). Pour ne pas les brouiller, je coupe court, j'ai dit que peut-être plus tard cela s'arrangerait, - ce bon Monsieur est un très bon chrétien, mais il souffre de voir sa nièce dehors. - Il vous écrira certainement, je tenais à vous dire que je n'ai rien précisé. Ces Dames de Lantignié ne m'écrivent plus, elles m'ont bien compris. - Je les plains, je prie pour elles, elles ne comprennent pas leur position vis-à-vis de la Maison-Mère d'Angers, - après tout, elles étaient simples religieuses, sous les lois et les ordres de l'obéissance, leur départ a laissé la maison en paix.

J'espère, cher Monsieur Grolleau, aller bientôt à Angers, dès que j'aurai vendu nos Obligations, ce sera, je l'espère, dans 10 ou 15 jours, car je suis tenu ici pour l''Octave de la Fête-Dieu.

J'écris au P. Champion sur les tableaux et le Christ - je ne doute pas qu'il ne donne de suite l'ordre à ces Dames de rendre ce qui ne leur appartient pas.

Le P. Champion ne pourrait les donner sans ma permission, et je ne pouvais donner ce qui n'est pas donné à nous. C'est l'alphabet à apprendre à ces Dames.

Croyez-moi, cher Monsieur le Supérieur,

Votre tout affectionné et dévoué serviteur.

Eymard Sup.


Nr.2172

An Marianne Eymard

Paris, 13 juin 1868

Bien chère Soeur,

Je suis bien peiné d'apprendre que vous êtes fatiguée et que vous avez pris chaud et froid lundi. Que Dieu vous soulage et vous guérisse! Vous êtes trop courageuse, quand vous voyez que vos forces manquent, ménagez-vous, puis prenez du bouillon gras et mangez de la viande, la décision du médecin suffit.

Puis faites-moi vite une neuvaine à votre Souverain Médecin, & Notre-Dame de La Salette; et si je puis aller vous voir, nous irons remercier la Bonne Mère ensemble sur la Ste Montagne. Ecrivez-moi, chère Nanette, parce que je serais inquiet. Je vous en prie. Le Bon Dieu aime à visiter les siens par quelques petites croix. Ce sont les fleurs du Calvaire.

Nous avons été très occupé ces temps passés; nous avons une ordination de trois religieux, puis des retraites et beaucoup de monde toujours. La vie de Paris est tellement absorbante qu'on ne sait comment le temps s'en va; je vais aux demoiselles CROS aujourd'hui ou demain.

Ayez la bonté, chère Nanette, de demander au frère de notre frère aimé s'il n'a pas reçu un paquet dans lequel se trouvait du tabac pour Monsieur le Curé, et s'il le lui a remis.

N'ayant rien reçu de Mr. le Curé, je crains qu'il ne l'attende et qu'il se soit perdu.

Melle Thomas est depuis 3 semaines près de sa tante malade, et Mme Tenaillon a perdu son frère.

Je leur ait dit votre souvenir.

Je vous bénis, bien chères soeurs. Ayez soin de vous et si vous avez besoin de quelque chose, écrivez-le moi.

Votre frère attentionné

(S) Eymard

P.S.- Dites bien aux Delles CROS que Mr. BARON, leur neveu, se porte bien. Je l'attends demain.


Nr.2173

An Fräul. Thomas

A.R.T.E.

Paris, 13 Juin 1868.

CHERE FILLE EN N.-S.,

Merci de votre lettre d'aujourd'hui. Je craignais recevoir une nouvelle de mort, cette idée me poursuit aujourd'hui. Je prie bien pour votre tante; en effet, c'est inexplicable. Dieu la laisse expier, elle reçoit beaucoup de grâces, c'est un temps de miséricorde pour elle, peut-être plus grande que nous le pouvons penser.

Vous souffrez aussi beaucoup, chère fille; Dieu le veut pour sa gloire et votre plus grand bien. Vous n'avez jamais voulu diminuer une peine, une croix venant de Dieu pour n'être pas infidèle; quoique la nature souffre et souffre beaucoup, la grâce l'emporte. Dieu y gagne, accrochez-vous à l'accomplissement de la volonté de Dieu comme à votre boussole. Que le coeur fasse les frais du service, ne vous inquiétez pas de la tête, ni de vos impuissances; le feu vit de sa chaleur et non de sa lumière.

Allez souvent à Dieu comme il est, par ce qu'il veut, par ce qu'il fait, et vous serez dans un bon milieu.

Nous avons bien fêté la Fête-Dieu: nous avons chanté une belle messe, le P. Crépon a prêché à vêpres et moi à Notre-Dame des Victoires pour l'Oeuvre de la Première Communion.

Quête.......................................................450 fr.

De ma quêteuse, Mme Maréchal...........1.100 --

---------

Total: 1.550 fr.

Voyez que nous avons à remercier Dieu. le soir, à 7 h., nous avons fait la procession; demain, nous en ferons une seconde. Je ne dis pas: Que n'êtes-vous ici! Vous nous manquez bien! venez donc! Il faut vous vouloir où Dieu vous veut, où est la loi du devoir.

Comme le bon Maître nous a tous aveuglés dans ce moment de crise de votre tante! Il vous voulait près d'elle; soignez-vous; si vous avez besoin de quelque chose, écrivez-nous.

Je vous bénis bien eucharistiquement en N.-S. en qui je suis

Tout à vous.

EYMARD.

P.-S. Je garde la facture acquittée de 14 fr.10. Soyez tranquille sur le voeu de votre tante, son état la dispense de tout.

Je reçois une lettre de Nanette; elle m'annonce que ma soeur a pris lundi une fluxion de

poitrine; cependant, elle ne va pas plus mal. Elle m'écrit ceci: - P. Stafford me prie de vous annoncer que le dais est fait.

Mademoiselle Théodorice Thomas,

1, rue des Gobelets,

Saulieu (Côte-d'Or).


Nr.2174

An Gräfin v. Andigné

A.R.T.E.

Paris, 13 Juin 1868.

Madame en N.-S.,

Voici le résultat de la quête :

Sermon ..................................... 450 fr.

Une Dame quêteuse a apporté 1.100 "

______

1.550 fr.

Nous voilà riches pour habiller nos chers enfants. Mr le Curé de la Madeleine m'a promis un sermon pour l'an prochain dans son église.

J'espère aller à Angers vers la fin de juin, si Dieu le veut. Je vais porter un peu d'argent pour l'église que nous bâtissons; je fais vendre quelques obligations. Je suis tout heureux de donner à Notre-Seigneur l'argent qui lui appartient, puisqu'il est le seul Maître et que nous ne sommes que ses pauvres serviteurs.

Pour vous, Madame, gardez-le, ce bon Maître; et, à tout prix, ne le laissez pas vous quitter. - Il y a un Tabernacle au Bagne, dans les hôpitaux, dans les paroisses sans religion, et vous êtes le Béthanie de Notre-Seigneur.

Je vous approuve dans ce que vous me dites de la concentration et de l'indifférence, suite de la souffrance ou de la vertu qui ne fait que de s'immoler sans cesse.

Si vous pouviez vous épanouir à la vue des fleurs, de votre campagne, de la visite de quelque Ange du Ciel, vous feriez bien, je vous le souhaite. Quel malheur....(une ligne effacée)......


Nr.2175

An Fräul. Adèle Julhien

Paris, 14 juin 1868

Mademoiselle bien chère en N.S.

Enfin vous êtes décidée à m'écrire ! Je vous en remercie, car votre lettre m'a fait plaisir. - Je remercie bien N.S. de la tonsure que votre cher et pieux neveu a reçue! ce qui prouve qu'il est bien à sa vocation et que ses Supérieurs l'estiment. Que Dieu le bénisse et le fasse arriver bientôt jusqu'au St.Autel, pour la gloire de Dieu, le bien des âmes et pour votre consolation.

Je voudrais vous savoir en bonne santé; pour y arriver, évitez toute émotion pénible, toute peine des autres, - soyez un peu plus forte contre les vents et les tempêtes extérieures.

Mais ce que je désire le plus, c'est que votre âme soit confiante en Dieu pour l'avenir. Dormez tranquille sur les mains de la divine Providence! Soyez joyeusement pieuse au service du Bon Maître, comme étant la vierge de son coeur et l'heureuse servante de son amour, soyez impitoyable, sévère sur le passé, vous défendant la vue libre, la pensée arrêtée, la colère même juste. - Le baptême efface tout, - le second baptême y ajoute un mérite de plus.

Il le faut à tout prix, et sans aucun prétexte - vous savez bien combien votre âme m'a toujours été chère, et que j'ai demandé à Dieu votre guérison pour mieux le servir et longtemps.

Soyez donc jeune d'amour pour N.S., reprenez cette joie du printemps de votre vie.- Vous êtes blanche, pourquoi rembrunir cette belle fleur? Vous êtes l'aimée de N.S., ne pleurez pas toujours, mais réjouissez-vous en sa divine bonté.

Que Dieu vous garde et vous soit tout en tous. Mes bien affectueux souvenirs à votre chère Anaïs que j'aime bénir avec vous.

Eymard.


Nr.2176

An P. Leroyer

Paris, 14 Juin 1868.

Bien cher Père,

Je suis bien content que vous ayez visité le bon Père de Cuers; il a dû être sensible à cette marque d'affection fraternelle; vous me faites grand plaisir de lui venir en aide, car il le mérite.

Je vois que la divine Providence est toujours veillante sur nous: les uns partent, d'autres viennent prendre leur place au service du Bon Maître, il en sera toujours ainsi: Multi vocati, pauci electi. Beatus qui non fuerit scandalizatus in me, en Jésus si pauvre et si délaissé.

Qu'il y a peu de vocations qui ne viennent que pour Notre-Seigneur!

Notre noviciat a une douzaine de novices, sur lesquels il y a cinq scolastiques.

Le frère Frédéric est donc prêtre, le frère Marius diacre et le frère Vincent, de Malines, minoré; la Société marche lentement, mais elle marche vers Notre-Seigneur.

Quelle joie pour moi de penser que, le jour de la Fête-Dieu et pendant cette royale octave, Notre-Seigneur allait être bien honoré, bien glorifié dans les maisons de la Société: plût à Dieu que nous comptions par centaines de trônes eucharistiques! Nous faisons ce que nous pouvons ici dans notre petite chapelle, nous prêchons tous les jours.

Quant au billet des Dames de la Compassion, si ces Dames veulent nous en refaire un, je veux bien consentir à annuler le premier: elles ne peuvent s'en offenser. Mr Martigny a brouillé cette question; dans le cas où on annulerait le premier billet, il faudrait en faire un à Mr Guérin pour la somme qui lui est due. Vous m'en enverriez le modèle, et je le signerais ici.

Que devient la question du loyer que devait tirer le P. Billon? Peut-être n'est-ce qu'à la Saint-Jean prochaine.

Mgr de Constantine est venu me voir; c'est un Evêque bien apostolique et bien simple; je l'ai en vénération, mais ne lui accorderai pas ce qu'il me demande, un prédicateur pour son Carême de Constantine.

Soyez heureux et glorieux en la fête royale de notre Dieu et notre Roi, cher Père.

Tout vôtre en son amour.

E Y M A R D, S. S.


Nr.2177

An Frau Lepage

Paris, 15 Juin 1868.

BIEN CHERE FILLE EN N.-S.,

Je vous attends ou le 25 ou le 26 ou le 28 juin, comme vous me le faites espérer. Je serais si content de vous revoir! il y a si longtemps depuis mon voyage à Rennes!

Vous savez qu' Allevard est presque mon pays. J'y connais du monde. J'y ai un bon ami, médecin, aussi pieux que savant: Mr Laure. Vous n'auriez qu'à me nommer; j'ai élevé son fils et suis l'ami de toute sa famille.

Vous êtes si près de la Salette à Grenoble! est-ce que vous n'y irez pas? Je me demande si quelque motif me conduisait par là, je vous y accompagnerais et vous ferais connaître ma chère soeur à La Mure.

Nous faisons notre fête royale aussi belle que nous le pouvons, mais notre chapelle est si petite! Vous me faites le plus grand plaisir de me dire votre état consolant.

Oh! oui, accrochez-vous à la confiance et au saint abandon; c'est la chaîne qui ne se brise pas. C'est le soleil qui n'a pas d'éclipse, c'est la vraie vie du coeur.

Je vous bénis comme je vous suis uni en N.-S., chère fille.

EYMARD.


Nr.2178

An Fräul. Julia Bost

A. R. T.

Paris, 15 juin 1868.

Mademoiselle Antonia.

BIEN CHERE FILLE EN N.-S.,

Je mérite bien le reproche que je vous adressais il y a quelques semaines. Cependant je vous assure que ce n'est pas oubli, ni indifférence. Je ne sais comment le temps s'enfuit pour moi. Comment oublier ce que Dieu a donné et le temps enraciné?

Je ne veux pas attendre vos reproches de vive voix; j'aime mieux les prévenir.

Croyez-moi. Ayez la dévotion à la sainte absolution. Recueillez sur votre chemin sacramentel quelques rayons de lumière et de chaleur, s'il y en a; un peu de consolation de Dieu, si Dieu vous en envoie. Mais à présent vous savez le chemin du Ciel; vous connaissez Notre-Seigneur et savez lui parler et lui plaire. Vous avez votre régime spirituel tracé, votre état de vie fixé.

Eh bien, allez droit devant vous, et s'il y a quelques sentiers inexplorés, quelque ténèbres que vous ne pouvez sonder, quelques voix qui ne vous comprennent pas ou qui vous sont étrangères, demandez-en raison à Dieu et à moi.

Vous savez que si je suis lent dans le bien, je serai prompt dans la souffrance et le besoin.

Je suis bien content que vous fassiez ce petit voyage avec votre excellente amie. L'âme et le corps y gagneront. Je vous attends.

J'écris par le même courrier à votre amie de Nancy.

Je vous bénis de tout mon âme en N.-S.

EYMARD, S. S.


Nr.2179

An Marg. Guillot

Paris, 18 Juin 1868.

Chère fille,

Le meilleur moyen pour Vichy, c'est de prendre l'express à Angers le soir, d'arriver à Paris le matin, puis de repartir à 11 heures 20 min. pour arriver à Vichy à 7 heures 51 min. du soir.

Par ce moyen, vous auriez à Paris quelques heures de repos, et j'aurais la consolation de vous voir. Vous m'écririez le jour et l'heure de votre arrivée, et je vous ferais reposer dans une chambre que l'on a mise à ma disposition, près de chez nous.

Voici un autre plan:

Ce serait de partir d'Angers le matin à 9 heures: vous arriveriez à Paris à 5 heures du soir, vous vous reposeriez un peu, et vous pourriez repartir le soir à 8 heures 20 min. et arriveriez à Vichy à 4 heures 10 min. du matin, et vous éviteriez la chaleur.

Le P. Champion m'écrit qu'il a reçu le Christ et le tableau des demoiselles Lieutaud. Je les apporterai quand j'irai à Bruxelles.

Je vous laisse. Je suis un peu souffrant d'une sciatique, et je ne sais quel jour je pourrai aller à Angers.

Je vous bénis en Notre-Seigneur.

EYMARD.

P. S. - On m'écrit de la Mure que ma soeur est malade d'une fluxion de poitrine, mais qu'il y a un peu de mieux. Priez pour elle.


Nr.2180

An P. Audibert

Paris, 18 Juin 1868.

J'envoie votre lettre à Mr Ratons. Je l'ai lue à nos Pères; tous en ont loué la dignité et la raison. Je ne sais s'il y répondra, mais s'il n'ouvre pas les yeux et ne consulte pas sa conscience, je le plains. Il doit connaître la vie religieuse lui, dit-on, qui a été frère.

J'espère aller vous voir, cher Père, dans une ou deux semaines, vous porter l'argent emprunté, que j'ai tout prêt entre les mains, et vous porter un peu d'autre. Nous avons la Première Communion de nos jeunes ouvriers le 28 juin; cela ne pourra être qu'après. Combien je désire vous voir jouir de vos grands travaux pour la plus grande gloire de Notre-Seigneur! Avec ces grandes chaleurs, ménagez-vous un peu.

Ces Dames de Lantignié viennent d'envoyer au P. Champion le Christ et le tableau des Dlles Liautard. A fructibus eorum...

A bientôt, cher Père,

Tout vôtre en N.-S.

EYMARD, p.

Au Rév. Père Audibert,

Supérieur


Lettres précédentes / Lettres suivantes

Index Lettres Vol VI / Index allemand / Index général