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Nr.0901

An Frau v. Grandville

Paris, 28 Décembre 1859.

BIEN CHERE FILLE EN N.-S.,

Me voici à Paris depuis quelques jours; j'attends maintenant de vos nouvelles et de celles de votre famille. Vous m'avez laissé bien longtemps dans le silence; je pense que le Calvaire est passé et que nous sommes à la résurrection et à l'action de grâces, à laquelle je m'unis de tout mon coeur.

J'ai laissé notre maison de Marseille en plein exercice, avec l'exposition quotidienne: c'est un petit feu allumé dans cette grande ville.

Nous désirons maintenant en établir une autre, là où il plaira à notre bon Maître d'aller fixer son trône de grâces et d'amour. On me parle de Lyon. Je ne sais encore si c'est dans la volonté divine. Notre petite communauté augmente, nous voilà quinze; mais il nous faut des adorateurs véritables.

J'ai visité deux adorations en venant: une à Tarare, petite ville près de Lyon, où j'ai donné une petite retraite eucharistique, et l'autre à Amplepuis. Que j'ai donc été édifié et consolé de voir là de si nombreux et de si fervents adorateurs dans la paroisse!

Je commence par vous, bonne fille, toute la première pour vous souhaiter une sainte, heureuse et tout eucharistique année, car la sainte Eucharistie est toute la religion et toute la perfection en ce monde. Demandez pour moi l'amour de ce bon Maître, l'amour de Saint Pierre et de Saint Jean, et je serai content de vous.

Tout à vous.

EYMARD, Sup. S. S. S.


Nr.0902

An P. de Cuers

Lettre collective aux PP. et FF. du Cénacle de Marseille pour le Jour de l'An.

Paris, 30 Décembre 1859.

Bonne année, bien chers Pères et Frères! vous finissiez bien celle-ci: c'est Dieu qui a planté. Vous allez, dans celle qui va commencer, bien arroser, bien cultiver cet arbre de vie, vous allez prendre cette greffe divine et l'enter sur la pauvre nature d'Adam, afin que le sauvageon devienne naturel et fécond.

Oui, inspirez-vous bien de l'esprit de mort, et de la vie de la divine Eucharistie. C'est par la mort à nous-mêmes que Jésus règne en nous!

Tous les jours, renouvelez le don de tout vous-même à l'amour et à la gloire de Jésus Eucharistique, et vous verrez que vous aurez toujours quelque chose à immoler et à donner.

Que le Bon Maître vous bénisse, vous couronne de sa grâce, vous unisse dans son aimable charité, vous aime dans toutes vos actions! voilà mon voeu.

Demandez-en le retour pour moi et pour vos frères de Paris, qui s'unissent à moi pour vous embrasser bien affectueusement en N. S.

EYMARD.

Bon Père de Cuers, je pense que vous avez reçu le ciboire qui devait vous être rendu le samedi matin.

Nous attendons le mandement de Marseille.

Je vous suis mille fois tout uni en N. S.


Nr.0903

An Fräul. Billard=Sr. Joséphine sss

REGLEMENT DE VIE

Mademoiselle Billard, en religion Soeur Joséphine du S. Sacrement

........................................

Le dimanche, faire une heure d'adoration dans l'après-midi.

Pour les voeux :

1· Pour la pauvreté, agir dans la maison comme une bonne servante qui n'est que l'économe du divin Maître;

Faire toutes les dépenses nécessaires;

Rendre à Mlle G., tous les mois, compte de ses dépenses et recettes.

Si on peut prévoir, huit jours d'avance, les objets de mobilier personnel un peu important à acheter, on demande la permission.

2· Pour l'obéissance, observer son règlement ci-dessus.

3· Pour le voeu eucharistique:

Faire sa demi-heure de visite au Très Saint Sacrement, et, quand on ne le pourra pas, rester recueillie chez soi, en union avec les adorations que reçoit Notre-Seigneur au ciel et sur la terre.

Le dimanche et les fêtes fériées, faire une heure d'adoration que l'on peut diviser. Ne pas oublier alors que l'on gagne une indulgence plénière.

Avis.

Se souvenir toujours qu'une servante est toute au service de son bon Maître, le sert avec joie et dévouement.

Se souvenir qu'une épouse est toute à l'amour de son divin Epoux, et ne cherche qu'à lui plaire et à se complaire en lui.

Vivre de la divine Eucharistie et pour la divine Eucharistie, comme les Anges ne vivent que de Dieu au ciel.


Nr.0904

An Fräul. Billard=Sr. Joséphine sss

A Mademoiselle J. BILLARD. Sr. JOSEPHINE du SS.

Règlement de la journée

Quatre heures trois quarts: Lever

Cinque heures et demi: Méditation

Sept heures et demi: Déjeuner

Deux heures: Lecture

Trois heures cinq Pater pour le Chemin de la Croix

Cinq heures: Goûter

Huit heures: Travail manuel

Dix heures: Cinq Pater avec l'atelier

Onze heures cinquante cinq: examen particulier

Midi: Dîner

Une heur: Récréation

Six heures: Chapelet

Six heures et demi: Visite au S. Sacrement

Sept heures: Souper

Huit heures: Prière du soir

Neuf heures: Coucher

Bénir l'heure

_______________

(ce règlement est peut-être le complément de celui imprimé au Volume III des lettres imprimées, p. 215, Date: 1859)


Nr.0905

Mlle Louise de Brissac,

(fin 1859 ou 1860)

Mademoiselle,

Je viens répondre par quelques mots à vos désirs.

Au mois de septembre 1858, une demoiselle, âgée de trente et un ans, tomba malade. On vint, sur le soir, appeler son confesseur; on la trouvait plus fatiguée et elle-même le désirait. Voyant que le Père ne venait pas, je vais à la maison de la malade pour savoir de ses nouvelles, je trouve le confesseur qui en descendait: "Comment va la malade, lui dis-je? - Mieux, il n'y a pas de danger.- Vous l'avez confessé par précaution? - Oui. - Puisque je suis là, je vais lui présenter mes respects". Il monte avec moi au premier; je trouve la malade environnée de ses amies. Elle me reconnaît, me salue; je lui adresse quelques paroles de confiance et d'abandon entre les mains de Dieu. Puis, après une dizaine de minutes, voilà que l'état de la malade change tout d'un coup. Elle perd la parole, ses yeux deviennent fixes. Elle ne voit plus, elle n'entend plus. Je tâte son pouls, plus de pouls; arrive la transpiration froide, elle ouvre la bouche, c'est le râle de l'agonie. Alors, me tournant vers le confesseur: "Mais ne voyez-vous pas, lui-dis-je, qu'elle s'en va, que l'agonie commence. Encore quelques minutes et elle sera morte; donnez-lui vite l'Extrême-onction.- Hélas! me dit-il, c'est trop tard; je n'ai pas le temps d'aller chercher les saintes huiles."

Une amie entend cela, s'approche de la moribonde et lui verse dans la bouche quelques gouttes d'eau de La Salette. Les fonctions de la déglutition ne se fesaient (sic) plus. Après cette eau, le râle finit, plus de mouvement, plus de soupir, mais la froideur de la mort. Elle tombe raide et froide, sur son traversin, tout le monde la croit morte et l'on s'éloigne, stupéfait, atterré. "Qui annoncera cette triste nouvelle à sa famille", dis-je alors? Je me jette à genoux au pied du lit; je veux dire un De Profundis: je ne puis le finir. Toujours cette pensée me venait, et ce doux reproche à la T.S. Vierge: O bonne Mère, bonne Dame de La Salette, elle est morte, et morte sans avoir reçu les sacrements; et, cependant, on vous a invoquée, elle a bu de l'eau de La Salette. C'est trop fort! Vous si bonne!

Je reste encore un moment écrasé sous le poids de cette mort si inattendue. Je lève la tête vers la défunte, que vois-je? Elle ouvre les yeux, elle sourit et dit: "Qu'est-ce qu'il y a donc?" Je me lève, personne n'a le courage de lui répondre. "On vous a cru morte, lui dis-je.- Mais non! Je vais bien; je n'ai plus mal." Elle s'assied sur son lit; cause, rit. Tout le monde est dans la stupéfaction. Après un quart d'heure de surprise et de joie, nous nous en allons.

Je pensais bien que, de quelques jours, elle ne pourrait se lever; quand, le lendemain, disant la messe de six heures, la première personne que je communie, c'est la personne malade, marchant d'un pas ferme, la joie et la santé parfaite sur le visage. A cette vue, j'ai failli crier de surprise; je n'en croyais pas à mes yeux. Après l'action de grâces, je la fais prier d'entrer au parloir. "Comment, c'est vous! Et encore de si grand matin?" - "Je suis guérie, dit-elle, point de mal; il fallait bien remercier le bon Dieu et la Sainte Vierge".- "Mais que vous est-il donc arrivé et comment avez-vous été guérie? Vous souvenez-vous de m'avoir vu hier soir?" -" Non, tout ce que je sais, c'est qu'après ma confession, je me suis sentie défaillir et mourir peu à peu. Je n'ai plus vu, ni entendu, ni rien senti. J'étouffais; puis il m'a semblé que je ne tenais plus à la vie que par un filé et que j'avais déjà un pied levé pour entrer dans l'éternité, quand la Sainte Vierge est venue et m'a dit: "Ma fille, je t'ai obtenu miséricorde" et j'ai ouvert les yeux; je n'ai plus eu de mal."-" Mais comment était-elle, la Sainte-Vierge?" - "Elle avait une couronne de diamants sur la tête, comme des rayons qui montent inégaux; sa robe était blanche; mais d'un blanc comme je n'en ai jamais vu; éclatant comme la lumière. Il y avait des fleurs sur le devant; puis elle avait une grande croix sur la poitrine, avec des tenailles et un marteau.- Pourquoi, me demanda-t-elle, la Sainte Vierge avait-elle cette croix sur sa poitrine? Je n'ai jamais vu la Sainte Vierge ainsi"." Mais, lui dis-je, c'est N. D. de La Salette qui vous a guérie; nous l'avons invoquée, vous avez bu de l'eau miraculeuse et vous voilà guérie; aussi, devez-vous bien l'aimer et la servir!" - "Oh! oui, me dit-elle, car autrement je serais bien ingrate."

La personne guérie se porte bien aujourd'hui, et elle a tenu parole. Elle aime bien N.D. de La Salette, et sert bien le Bon Dieu.

Voilà, Mademoiselle, le narré de cette grâce dont j'ai été le témoin. Si je n'avais pas cru à la vérité de l'Apparition de la T. S. Vierge à La Salette, cela m'aurait ouvert les yeux.

Bien des gens n'y croient point encore; ils ne sont pas condamnables pour cela; car les préjugés, l'ignorance, les influences, le servilisme, tout cela peut mettre un voile sur les yeux. Puis, aujourd'hui, on ne veut plus de miracles, on se rit du merveilleux; on refuse volontiers à Dieu le pouvoir de se communiquer à ses créatures pauvres, ignorantes, misérables, pleines de défauts, etc... On craint l'illusion et on se jette dans le rationalisme. On crie à l'imposture, et on ose condamner tout ce qui croit à La Salette; comme si c'était une question d'intérêt, de parti ou d'ambition.

On vient sans cesse vous dire: Ce n'est pas possible que la Sainte Vierge ait apparu à ces deux enfants! Un mot de réponse à tous ces misérables subterfuges: Dieu le peut-il, oui ou non? S'il le peut, nous disons, nous: il l'a fait; et nous vous montrons le pèlerinage de La Salette avec ses conversions, ses grâces obtenues, ses miracles bien constatés, son triomphe au milieu de tous ses ennemis, sa gloire sans la gloire humaine, sa confiance en Celle qui a daigné promettre le salut au monde, si les hommes font pénitence. - Hélas! on ferait bien mieux de se convertir.

Ce qui me réjouit, Mademoiselle, c'est de voir la dévotion de N.D. de La Salette prendre toute sa vie et toute sa mission dans ce qui est sa fin, savoir: dans l'adoration réconciliatrice. - On fait maintenant l'adoration sur la sainte montagne; le T. S. Sacrement est exposé, solennellement, à différents jours de la semaine; les pèlerins deviennent adorateurs. Ils viennent en aide à N.D. Réconciliatrice, disant: "Je ne puis soutenir le bras de mon Fils; les péchés des hommes le rendent trop pesant et provoquent la vengeance divine." Eh bien! il faut venir se mettre aux pieds de Notre Sauveur, à côté de Marie, notre bonne Mère; et nous désarmerons la juste colère du Ciel, et nous sauverons le monde malgré lui.

Excusez, mademoiselle, cette longue lettre; le coeur a emporté la plume, mais je sais que nous pensons de même.

Mes respectueux hommages à M. et à Mme de Brissac, et croyez-moi, en N.S.J-C. votre respectueux serviteur.

Eymard, Sup.

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APPENDICE: Autres documents, non transcrits dans la copie de la Curie Généralice, qui est en possession de la Revue contenant ces Documents.

1. Album du sanctuaire: 18 août 1852. (Réf. B.M.S. n.562, p.200)

Texte manuscrit de St.P-J.Eymard.

"Si je n'avais le bonheur d'être Mariste, je viendrais demander à mon évêque comme la plus insigne faveur, de me consacrer corps et âme au service de N.D. de La Salette. J'ai eu le bonheur de proclamer, le premier à Lyon, le fait miraculeux de l'Apparition et je suis heureux aujourd'hui de venir baiser avec amour et reconnaissance, cette terre bénie, cette montagne du Salut. EYMARD, pr.mariste".

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Nr.0906

An Frau Chanuet

Paris, 1 janvier 1860

Bonne Mère,

Je m'unis aux voeux de vos chers enfants, et viens les bénir et les rendre mieux en Notre-Seigneur.

Depuis que je vous ai vue, votre pensée me suit toujours aux pieds du T.S.Sacrement et je vous offre sans cesse à ce bon Maître pour sa plus grande gloire, car vous n'êtes mère que pour lui.

Regardez-nous aussi comme votre petite famille et vos enfants.

Daignez faire agréer à votre cher fils, (M.Amédée) à Madame votre fille, à M.Blanc de S.Bonnet, tous mes voeux, toutes mes religieuses affections et me croire en N.S., bonne Mère, tout à vous

Eymard.


Nr.0907

An Frau Jordan

Paris, 1er Janvier 1860.

BONNE FILLE,

Je commence par vous ma première lettre de bonne année. Je ne devrais pas au moins le dire, mais je tiens à ce que vous sachiez que vous êtes toujours ma première fille en Notre-Seigneur et que je vous conserve votre droit d'aînesse. Eh oui! encore une année écoulée, finie, passée, comme le soleil d'un jour, comme l'eau du torrent; mais pour Dieu, je l'espère; alors elle est retournée nous attendre dans l'éternité.

Quelle année vous souhaiter, bonne fille? le règne de l'amour de Dieu en vous? Oh! oui, ce règne, car c'est tout. Si Dieu règne en nous, sa vérité sera notre lumière, toujours vraie et juste; sa volonté, la règle de la nôtre; sa loi, notre loi inviolable; sa gloire, notre fin.

8 janvier. - Voyez donc à quelle date je reprends ma lettre.

Je viens de donner une retraite à notre Communauté pour cinq novices qui ont fait leurs voeux le saint jour de l'Epiphanie; c'est ce qui m'a absorbé.

Votre bonne dame est donc morte? Espérons que Notre-Seigneur l'aura reçue dans sa miséricorde; mais il faut bien prier pour elle, car le Purgatoire est long et douloureux. Il faut être si pur pour aller au Ciel!

Priez et faites dire quelques messes pour le repos de l'âme de votre ancien Curé Mr Brun-Buisson, et vous ferez une excellente oeuvre de miséricorde.

J'ai pensé à offrir pour mes étrennes à Notre-Seigneur une chape blanche; il me manque l'essentiel: je n'ai que 60 fr. et elle me coûte vers 100 fr. Je viens voir votre bourse pour m'aider. Ainsi vous aurez la part du bon saint Martin; mais pas encore, car le jour de l'an a d- épuiser votre bourse; seulement, faites vos économies d'ici à Paris: voilà mon bouquet.

Adieu, bonne fille, je cours vite à d'autres.

Je reste en N.-S.

Tout vôtre.

EYMARD, S. S.

P.-S. Mes voeux et bénédictions du Ciel et de la terre à votre bonne et chère Mathilde.


Nr.0908

An Frau Rottier (Sr. Antoinette sss)

1er Janvier 1860.

Je vous envoie, bonne dame, pour étrennes, une petite fille du bon Dieu, afin que vous l'instruisiez de sa religion. Avec elle, mon coeur vous a, ce matin, bénie au saint Autel, et tous vos bons désirs.

EYMARD.

A Madame Rottier,

14, Impasse des Feuillantines,

Paris.


Nr.0909

An Marianne

Paris, 1er Janvier 1860.

BONNES SOEURS,

Je ne veut pas me coucher sans venir vous souhaiter la bonne année; je vous l'ai souhaitée ce matin au saint Autel, ce soir je vous la souhaite en famille.

Que Jésus soit votre joie, votre amour et votre bonheur! Croissez toujours en vertu devant lui, comme l'arbre arrosé du ciel! Vous êtes bien libres pour le servir et servir les pauvres; servez-vous bien de cette liberté, faites tout le bien que vous pourrez pendant que vous avez un peu de courage et de forces, car viendront les infirmités, puis les années où l'on n'a plus le courage.

Mr le Curé me dit que vous faites beaucoup de bien et qu'il est content de vous; c'est bien! mais il faut que le bon Maître dise: Amen!

La personne malade va mieux, elle a été à deux doigts de la mort. Dieu nous la laisse encore pour notre édification: c'est la personne dont je vous avais parlé.

Nous sommes un peu plus nombreux: quinze, ce qui me donne une grande occupation.

Le jour de la fête des Rois, quatre vont faire leurs voeux; priez pour eux.

4 Janvier. - Je n'ai pu finir ma lettre le premier jour de l'an, je viens le faire ce matin, de bon matin. Ma santé est assez bonne, mes migraines ne viennent presque plus; je suis un peu enrhumé comme tout le monde. Paris va à l'ordinaire, chacun se court après et désire ne pas se rencontrer en ces jours de visites; c'est une triste vie que cette vie du monde!

Nous sommes bien heureux d'avoir le devoir de nos adorations pour nous tenir liés à la maison et à notre si beau service.

Notre maison de Marseille va bien, Notre-Seigneur y est bien honoré, le peuple y vient en foule. Les Quarante-Heures se sont établies dans le diocèse à notre occasion; c'est une grande chose!

Adieu, bonnes soeurs, aimez toujours bien Notre-Seigneur et faites-le bien aimer de tous.

Tout à vous en lui.

Votre frère.

EYMARD, Sup.

P.-S. Voilà vos étrennes, prononcez votre consécration après la communion.


Nr.0910

An Frau Tholin

Paris, 3 Janvier 1860.

Merci, bonne fille, de vos voeux aux pieds de notre petit Sauveur; qu'ils croissent avec lui et viennent se consommer avec lui en son divin Sacrement!

Je suis heureux de vous savoir dans la famille Dalaca; je sais que là, rien ne vous manquera pour la santé; cette bonne famille est si bonne! Mais peut-être n'avez-vous pas le soleil.

Je vous aime assurément mieux là qu'à Hyères; je suis persuadé que Mr Laure n'a rien arrêté, rien conclu, et par conséquent, que vous ne serez pas liée; cependant, je suis étonné qu'on ne vous ait pas écrit, ce qui m'indiquerait qu'on n'a rien fait.

Jouissez de Jésus, de son soleil, de sa liberté, de sa bonté divine.

Adieu, bonne fille, donnez-moi de temps en temps de vos nouvelles.

Tout vôtre en N.-S.

EYMARD.

Madame Tholin.


Nr.0911

An P. de Cuers

Paris, 4 Janvier 1860.

Bien cher Père,

Je viens vous féliciter de votre fête eucharistique des XL Heures, et de l'insigne honneur de commencer ainsi l'année; mais honneur oblige! que ne sommes-nous avec vous pour en pratiquer le glorieux service!

Nous sommes en retraite depuis lundi; le beau jour de l'Epiphanie sera en outre célébré par la profession du P. Clavel et de Mr Carrié, du frère Michel et du frère Charles; priez et faites prier pour eux, afin que ce soit une garde eucharistique véritable.

Le P. Champion a d- vous annoncer votre cire. Je pense que vous l'avez reçu ou la recevrez aujourd'hui. Nous avons lu dans l'Univers un extrait du mandement, nous attendons le mandement lui-même; il me semble que les jours où vous ne faites pas l'adoration comme adoration des XL heures du diocèse ordinaire, vous devez vous en tenir au luminaire de douze, pour les jours ordinaires; ce que Mgr. a fixé pour les XL heures de son diocèse, ne nous regarde pas; c'est aussi le sentiment du P. Champion. Nous avons un portier tailleur, ex-militaire, il paraît bien disposé; nous avons aussi un nouveau cuisinier qui paraît un bon religieux; frère Michel travaille au jardin et à l'intérieur.

L'abbé Amatori n'a pas encore paru: je pense que Mgr de Lyon l'a retenu pour les fêtes. Celui d'Angers m'a écrit pour me demander positivement l'entrée. Rien autre de nouveau, sinon les visites de Premier de l'An qui ne nous laissent pas de temps.

Bon courage, bons Pères.

Tout vôtre en Notre-Seigneur.

EYMARD, S.


Nr.0912

An Fräul. Danion

Paris, 10 Janvier 1860.

BONNE SOEUR EN N.-S.,

Que Jésus soit votre vie et votre vertu: voilà mes voeux pour vous! Que vous vous consumiez pour son règne adorable en son divin Sacrement: en voilà la couronne! Oh! qu'est-ce que la vie la plus riche, la plus honorée, la plus heureuse, sans Jésus et sans sa gloire?

J'ai le coeur bien triste et les larmes aux yeux de voir le triomphe du démon sur la terre; les apôtres de Satan plus fidèles et plus dévoués à la ruine des âmes que les apôtres de Jésus notre bon Sauveur; de voir encore si peu de fidèles comprendre Jésus-Christ et son Evangile, si peu d'adorateurs au pied du divin Tabernacle.

Hélas! l'enfer triomphe, et l'homme du mal méprise, avec orgueil et joie, la religion de Jésus-Christ et son sacerdoce... Ah! nous n'avons pas été assez vigilants et dévoués à la cause de Dieu, nous n'avons pas assez combattu pour sa gloire, et déjà les nuages qui recèlent les tempêtes s'approchent. Il faut donc bien prier et se faire victime de réparation.

Depuis que je ne vous ai pas écrit, j'ai été à Marseille, mettre en mouvement notre petite fondation; j'y ai laissé trois prêtres, un ecclésiastique et deux frères: en tout, six. Ils ont l'exposition quotidienne; un grand nombre de personnes pieuses suivent l'adoration.

Depuis le 1er janvier, Mgr l'Evêque a établi les Quarante-Heures dans le diocèse. Nous avons pu être un complément, car, sans nous, le diocèse n'aurait pas assez d'églises pour l'adoration perpétuelle. Quelle consolation pour nous, d'avoir servi au moins à cette grande grâce!

Nous sommes neuf ici, quelques vocations s'annoncent; mais, hélas! on a peur de l'adoration; cette vocation eucharistique, pourtant si belle, si sainte et si aimable, effraie. J'entends toujours dire: "Moi, il me faut de la vie active"; comme si l'amour divin n'était pas actif, comme si la flamme qui s'exhale du foyer n'était pas vive et puissante! Mais c'est la nature qui parle, et on croit que c'est le zèle.

Je n'ai pas reçu de nouvelles de votre bon et excellent vicaire; il obéit, c'est bien, mais il m'a paru un bon adorateur, il est un homme de Dieu.

J'ai établi l'Agrégation à Marseille. Monseigneur a voulu être le premier Agrégé; une grande foule s'y est enrôlée. - En revenant à Paris, j'ai visité les adorations paroissiales de Tarare et d'Amplepuis, près de Lyon, et les ai agrégées. C'est la préparation à quelque chose de plus parfait.

Je vous envoie aussi votre titre, c'est bien juste; puis vous m'enverrez mes étrennes.

Je vous laisse en Notre Seigneur et Maître et suis en sa divine charité,

Bonne soeur,

Tout à vous.

EYMARD, Sup. Soc. SS.

P.-S. J'enverrai les pouvoirs d'agréger aux prêtres que vous me désignerez.


Nr.0913

An P. de Cuers

Paris, 21 Janvier 1860.

Bien cher Père,

J'attendais votre lettre pour répondre à toutes vos demandes, afin de n'avoir pas à accuser réception de votre lettre chargée.

J'ai reçu les 500 f., dont 200 pour le cire, 100 f. pour des messes, et 200 f. pour la maison.

Mr Picard s'est mis lundi passé à votre travail et a promis bien sûr que vous les auriez à l'époque fixée; seulement, a-t-il dit, il est possible qu'il mette la caisse à la petite vitesse jusqu'à Lyon, et à Lyon (lieu de long séjour des marchandises pour Marseille) par la grande vitesse, ce qui, dit-il, ne fera pas une grande augmentation.

Le jour de Fête de l'Epiphanie a été bien joyeux et pieux; les quatre professions ont eu lieu avec beaucoup d'édification, et sont suivies d'un grand changement en mieux. C'est la grâce des voeux, c'est le fruit béni de l'arbre qui est tout à Dieu.

Mr Chanuet a fait son voeu d'obéissance et il nous édifie tous: c'est une âme d'élite, un véritable adorateur.

Mr Amatori n'est pas arrivé; il ne viendra pas, je crois, car quand on reste sans donner signe de vie, c'est preuve ou que l'on est sans éducation, ou bien sans vocation fixe. J'ai appris qu'à Rome il avait demandé l'entrée aux PP. du Saint-Esprit, qui l'avaient refusé comme inconstant.

Mr de Leudeville vient nous voir; mais il n'a pu faire encore sa retraite, le P. de Pontlevoy n'étant pas libre jusqu'après le Carême.

Mais Dieu a remplacé ces deux traînards: Mr l'abbé Bissey d'Angers est ici depuis le treize, et Mr l'abbé Martin, diacre de Nantes, depuis le onze.

EYMARD, Sup.


Nr.0914

An Fräul. Bourges

Tout pour l'amour et la gloire de Jésus-Hostie .

Paris, 22 Janv[ier] 1860.

Bonnes et chères demoiselles,

Les amis passent souvent les derniers, mais c'est afin de leur donner davantage de temps. Merci de vos bons souhaits, et surtout de vos bonnes prières. J'y tiens beaucoup, vous êtes un peu ma famille. Tout ce qui vous intéresse m'est cher, surtout votre amour pour notre bon Maître et votre bel apostolat sur ces jeunes coeurs que vous formez si bien à la vertu. Aussi faut-il aimer la vie pour cela, et soigner un peu mieux votre santé pour travailler plus longtemps. Au Ciel on se repose, il vaut mieux travailler à la gloire de Dieu. Le temps vaut en quelque sorte plus que le Ciel, puisque le Ciel le remplacera éternellement.

Aimez bien le Bon Dieu, chères demoiselles et filles en Notre-Seigneur, car c'est là tout l'homme et tout Dieu. Mettez votre règle de vie dans la grâce de son amour; vos vertus dans une seule: celle de l'amour, et vous serez bien agréables à Dieu.

Quand irai-je vous voir? Je le désire, mais je ne le sais pas. J'y vais tous les jours du saint autel. Dieu est plus grand que le monde, tout vit en lui; c'est là que je vous bénis et reste,

Chères demoiselles,

Toujours tout à vous.

EYMARD, Sup.


Nr.0915

An P. de Cuers

Paris, 25 Janvier 1860.

Bien cher Père,

Je viens vous accuser réception de votre lettre chargée. Merci, c'est un secours de la Providence.

Merci aussi des renseignements que vous me donnez sur Mr Bissey; jusqu'à présent, nous n'avons été qu'édifiés de sa conduite et de ses conservations; il a été très ouvert avec moi; son attrait à lui est plutôt la vie d'adoration, le zèle n'est qu'en second; il me paraît très instruit. Jusqu'à présent, je ne puis donc que remercier Notre-Seigneur.

J'étais si pressé, en vous écrivant la dernière fois, que j'ai oublié de vous parler de la visite du P. Hermann; elle m'a bien surprise et j'en suis à me demander le pourquoi; mais je pense et je crois que c'est par un sentiment de sa vieille amitié.

Il a su aussi que je m'étais arrêté à Lyon, peut-être cela lui a-t-il fait de la peine d'apprendre cela, et que je ne sois pas allé le voir: je ne le devais pas après la lettre qu'il avait écrite, et j'étais bien résolu de le laisser de côté, jusqu'à ce qu'il plût à Dieu de me mettre dans l'occasion de briser le silence.

Notre conversation a été bienveillante; mais nous n'avons pas causé de détails de la Société, parce qu'il y avait du monde; puis ce n'était pas le cas.

Je lui ai rendu sa visite, il m'a dit plusieurs fois: "Restons unis, restons unis".

Mon coeur a trop souffert de sa conduite et de ses paroles pour s'ouvrir comme avant: cela viendra peut-être, mais jusqu'à nouvelles preuves...

Pour l'emprunt, je comprends bien que ce serait honorable de payer le plus pressé. Je n'ai rien pu trouver ici, le moment n'est pas favorable, on est inquiet sur l'issue des événements d'Italie. Vous avez dit un mot au frère Carrié pour Mr Guérin: voilà une bonne pensée.


Nr.0916

An Frau v. Grandville

Paris, 12 Février 1860.

MADAME ET CHERE FILLE EN N.-S.,

Vous êtes bien un peu cause que je ne vous ai pas écrit. Vous m'annonciez, dans votre avant-dernière lettre, une lettre plus explicative, j'ai eu tort de l'attendre, puis mille choses m'ont poussé jusqu'à ce jour.

Je pense bien être à Paris pour l'époque que vous me marquez; si je devais changer de place, je vous l'écrirais d'avance. Je serais bien heureux de vous voir: qu'il y a donc longtemps que je ne vous ai vue! Puis, la dernière fois, vous avez été si éprouvée!

Quant à votre projet de la Salette, c'est trop tôt, il fait encore trop froid sur nos montagnes; il faut attendre au beau temps. Vous vous exposeriez à ne pouvoir même pas gravir la sainte Montagne et peut-être vous exposeriez-vous. Non, non, attendez le beau temps, et comme je dois faire un voyage à Marseille, si nous pouvions combiner ce départ jusqu'à la Salette, je le ferais volontiers; mais à une condition, c'est que vous vous arrêterez une demi-journée dans ma petite ville natale, à La Mure.

Je vous dirai qu'une de vos amies est sur le point de mourir à Paris, Mme Georges. Je viens de la voir, je l'ai confessée, elle a été administrée, elle désire bien aller vers le Bon Dieu; quelle belle âme! Je vais la voir quand je peux. La mort lui sourit. Oh! qu'il est doux de mourir quand on aime le Bon Dieu! Elle a été heureuse d'apprendre que je vous connaissais et moi de savoir qu'elle est votre amie...

Je voudrais, bien bonne fille, que Dieu nous voulût à Nantes, au milieu de ce bon peuple! Je demande maintenant au bon Maître où il veut que nous lui élevions un troisième cénacle! demandez-le lui pour nous. Qui sait si Mgr l'Evêque de Nantes voudrait nous recevoir! Ne pourriez-vous pas le lui demander? parce qu'alors nous nous préparerions pour cela, ou bien je laisserais agir pour Lyon. J'ai toujours aimé Nantes; mon père était royaliste, c'est le pays des grands courages.

Ne cherchez pas à connaître d'autre volonté de Dieu, bonne fille, que celle du moment de la confiance et du saint abandon; c'est le meilleur.

Ne cherchez pas d'autre vertu que celle de l'amour filial qui va vers Jésus pour lui et par lui, et non par vous ni pour vous. Oh! belles misères, bonnes pauvretés qui vous rendent Notre-Seigneur si nécessaire!

Le pauvre aime ses mauvais habits parce que c'est son titre à la charité. Communiez tous les jours, bonne fille; et si l'on pouvait communier cent fois le jour, je vous dirais: Communiez cent fois; pour vous c'est la vertu et la vie.

Adieu, bonne fille, je n'ai pas le temps de relire ma lettre, j'ai eu jusqu'à présent une fluxion de dents qui m'a rendu paresseux.

Tout à vous.

EYMARD.


Nr.0917

An die Familie Rosemberg

Paris 17 février 1860

Bien chers Amis,

J'espère vous arriver demain soir samedi, s'il plaît à Dieu.

Je n'ai pas besoin de vous dire la joie de mon coeur d'aller vous voir. Ce qui me fait aussi hâter mon voyage, c'est le désir d'aller voir et consoler ce bon et saint M.Dupont. Je pensais descendre chez lui, à moins que vous ne l'aimiez autrement.

Ayez la bonté de faire prévenir ma bonne mère Marceau. Je crains de n'avoir pas le temps de lui écrire.

Tout vôtre.

Eymard.


Nr.0918

An Frau v. Grandville

Paris, 25 Février 1860.

BONNE DAME ET CHERE SOEUR EN N.-S.,

Ce matin, à dix heures, j'ai vu Monseigneur de Nantes; j'ai été bien heureux de faire la connaissance de ce pieux et aimable Evêque. Nous avons beaucoup causé de notre petite Société, de sa fin, de ses oeuvres; et il m'a écouté avec une sympathique bonté, et en me quittant m'a dit qu'il espérait que la Société travaillerait un jour dans son diocèse. Par tout ce que m'a dit sa Grandeur, j'ai pu comprendre que notre Oeuvre plairait à sa piété; Mr son Grand Vicaire paraissait aussi s'y intéresser.

Voilà, bonne dame, le premier pas fait, vous ferez le second si Dieu vous l'inspire, et s'il nous veut à Nantes, sa bonté nous en fournira les moyens; on m'a dit qu'il y avait une jolie chapelle libre et propre à l'adoration: c'est celle de l'Oratoire.

Ce serait vraiment providentiel si, dans le courant de l'année, nous commencions l'exposition à Nantes. Nous commencerions avec six, comme à Marseille; ce nombre suffit pour l'exposition du jour et tous les jours.

J'ai reçu une lettre de Mlle Aglaée de Martel qui me demande une agrégation; peut-être s'intéresserait-elle à l'Oeuvre?

Quelle grâce pour Nantes, si Dieu le veut! Nous sommes à voir si c'est par Lyon ou par Nantes qu'il nous faut commencer; quelques villes du second ordre nous désirent, mais, comme je l'ai dit à Monseigneur, nous voulons choisir de préférence les grandes villes, afin de pouvoir agir sur un plus grand rayon.

L'excellente dame Georges est morte, il y a une dizaine de jours, dans les sentiments de la plus douce et de la plus vive confiance en la miséricorde de Dieu. Elle était heureuse de votre lettre et de votre amitié. Elle me disait, dans son grand désir d'être unie à Dieu et de ne plus l'offenser: "Mon Père, dites-moi que je vais mourir bientôt. Oh! comme je serais contente si vous me disiez si je mourrai aujourd'hui! j'ai bien offensé Dieu, mais il est si bon que j'espère en son infinie miséricorde." Puis, quand quelques craintes voulaient troubler son âme, elle s'écriait: "O Marie! Marie! ma bonne Mère! j'espère en vous, en vous si bonne, vous que j'ai aimée, que j'aime. Oh! non, vous ne m'abandonnerez pas." Puis elle me disait: "J'ai peur que la sainte Vierge ne m'aime plus. - Et pourquoi? - Parce que je ne puis plus dire mon office de l'Immaculée Conception ces jours-ci. Est-ce qu'il y a un péché pour moi? Il y a huit ans j'ai promis à la sainte Vierge de dire tous les jours, jusqu'à ma mort, son office, et je l'ai toujours dit. - Non, non lui dis-je, votre état vous en dispense et moi aussi." Alors je lui fixe une petite prière. "Vous croyez donc que Marie m'aime encore? - Oh! oui, et beaucoup." Alors cette mourante qui ne pouvait se faire entendre, il fallait même s'approcher de bien près, lève ses mains vers le Ciel, et s'écrie d'une voix qui retentit par toute la maison: "O Marie! Marie! ma bonne Mère, mon espérance, oui, oui, tous ceux qui vous ont invoquée n'ont jamais été abandonnés; assistez-moi en ce moment, défendez-moi contre mes ennemis. Je veux vous devoir mon salut. Je vous aime, oh! oui, je vous aime!" En disant cela elle est retombée en son état d'agonie, elle est morte quelques heures après. Oh! l'heureuse mort!

J'arrive de Tours où j'ai prêché les Quarante-Heures à l'Oeuvre d'adoration de Mr Dupont, mon ami. C'est ce qui explique mon retard. Je pensais bien à vous; si vous n'aviez été qu'à quelques heures je serais allé vous voir.

Je ne puis vous dire encore si je serai ici à Pâques, je vous l'écrirai plus tard.

Adieu, bonne dame et chère soeur en N.-S. Aimez bien Notre-Seigneur et soyez toute à sa gloire.

Tout à vous en Jésus-Christ.

EYMARD, S.

Je reçois votre lettre: merci. Priez, allez droit à Monseigneur, et voyez s'il y a espérance; j'irai volontiers faire le voyage de Nantes, pour aviser aux moyens. Je sens quelque chose au fond du coeur qui me pousse fortement vers Nantes. Eh bien, vive Nantes en

Notre-Seigneur!


Nr.0919

An Frau Gourd

Paris, 27 Février 1860.

Madame Gourd.

Merci, bonne fille, de votre bonne lettre; je désirais bien recevoir de vos nouvelles. C'est vrai que je suis en retard avec vous; je vous ai fait mes voeux au pied du Très Saint Sacrement, et vous savez ce que je vous désire, l'amour de Notre-Seigneur, mais un amour simple, filial, d'abandon; mais un amour qui n'a rien à soi, qui ne fait rien pour soi, qui ne veut rien pour soi d'humain de personne. Oh! heureuse l'âme qui aime ainsi; à qui Jésus est tout bien, toute joie, tout désir!

Bonne fille, soyez comme l'aveugle, le paralytique, le pauvre de Dieu, et vous vivrez de Jésus-Christ. Permettez que mes voeux, que je vous donne, soient aussi pour votre chère fille; il y a bien longtemps qu'elle ne m'a pas donné signe de vie. Quant à la lettre du P. M., je l'ai lue avec beaucoup de plaisir; à travers ses paroles, on voit une âme pieuse et toute à Dieu, mais un peu embarrassée de demander. Maintenant, quant à la question d'argent, si ce n'était le P. Mayet qui vous fait dire son projet, je vous dirais non, parce que la pensée sera réalisée tout de même; mais il me semble qu'il y a une question de délicatesse. Alors, faites votre petite offrande.

J'espérais vous voir venir à Paris, mais Dieu vous retient; qu'il en soit tout de même béni! Je vous bénis, bonne fille, ainsi que cette chère Stéphanie. Que Dieu vous remplisse de son saint amour!

Tout vôtre en N.-S.

EYMARD.

P.-S. - J'ai bien regretté de ne pas avoir vu votre neveu; je lui aurais indiqué un médecin polonais, prêtre au Cimetière du Père-Lachaise, qui a la permission du ministre de traiter les maladies d'yeux. Nous ne cessons de prier pour votre père, Mr G. et tous les vôtres. Oh! comptez sur la miséricorde de Dieu!

Hélas! voici le fruit des mauvaises têtes, cette femme de chambre a fait du mal, aussi pardonnez les fautes de coeur, de bêtises, etc..., mais soyez ferme pour l'autorité.

Mademoiselle Boisson, institutrice aux Thorins,

Romanèche (Saône-et-Loire).


Nr.0920

An den Architekten Perret

Paris 4 mars 1860

Bien cher Monsieur Perret,

J'avais commencé une lettre pour vous, puis mille choses me l'ont fait laisser, celle-ci sera, je l'espère, plus heureuse.

Nous avons bien pris part à votre douleur et à vos peines dans la maladie et la mort de votre cher frère, vous êtes toujours le consolateur de tous - aussi j'espère bien que votre consolation est grande en la miséricorde de Dieu, et que votre frère vous devra en partie une mort chrétienne; d'ailleurs, il était si bon, si généreux pour les pauvres! puis il a souffert - ce sont là des précurseurs, des introducteurs dans la grâce du salut - nous prions toujours pour lui.

Vous êtes donc malade, bon Monsieur Perret, cela m'a fait une bien grande peine, car je sais bien que vous avez les soins de la famille, mais ici nous aurions été si heureux de vous voir et de vite vous guérir - je pense que ce sont toutes ces émotions pénibles, toutes ces veilles qui vous ont alité.

Nous allons bien prier pour que vous nous reveniez vite, il y a si longtemps que vous êtes loin de nous! Vous trouverez ici de bons amis et frères: M.Chanuet, le P. Bissey, à coeur d'or et autres.

Notre Exposition est maintenant quotidienne et tout le jour - nous n'avons plus qu'une ambition, celle de la voir jour et nuit perpétuelle.

Nous sommes 11 ici et 6 à Marseille. J'aurais aimé fonder la 3 ème maison à Lyon, cette ville de Marie, aux pieds du pieux Fourvière, où j'ai reçu tant de grâces! et surtout la 1 ère pensée de l'oeuvre du T.S.Sacrement, mais il paraît que le bon Maître ne le veut pas, puis Son Eminence de Lyon n'en veut pas.

L'oeuvre de la 1 ère Communion va toujours en grandissant - 63 enfants plus 4 vieux adultes - et des mariages à faire. - 35 enfants se préparent pour la 1 ère Communion à Pâques - Ils sont sages - les loteries font toujours merveille, les bons points sont comme l'or de la Californie. - M.Le Rebours nous a obtenu 300 Fr. pour nous aider à habiller les enfants, mais cela ne suffira pas.

Que n'êtes-vous ici, bon Père Perret! - c'est votre oeuvre, vous l'avez semée et arrosée! voyez comme Dieu la bénit. Nous avons fait un petit règlement de l'oeuvre, il est neuf, je vous en envoie un exemplaire - M.Prével l'a aimé.

Donnez-nous de vos nouvelles et faites-nous dire comment vous allez - s.v.p.

Je vous suis tout affectionné et dévoué en N.S., bon ami et frère.

Eymard Sup.

P.S. Une nouvelle! il y a quelques jours on me dit: le portier est parti emportant montre, argent, messes etc.... il paraît que nous sommes destinés à être pauvres. - J'ai couru chez vous, les portes étaient bien fermées - l'Ange les gardait - J'ai vu votre cordonnier.

Monsieur Louis Perret Architecte

8 Quai de l'Archevêché Lyon.


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