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L’incarnation du chant platonicien:

Le «miracle florentin» et ses interprÈtes

 Il est bien rare que l’idéalité trouve quelque accord avec l’imperfection du monde humain et la labilité des temps historiques et l’on contemple l’Absolu au ciel des idées, à moins que l’histoire ne produise quelque miracle. C’est de «miracle italien» qu’il faut, à la suite du «miracle grec» de l’Athènes de Périclès, qualifier le modèle qu’offre à l’Europe politique, économique, intellectuelle et artistique la civilisation de l’Humanisme italien où, comme l’a si bien montré l’historien Fernand Braudel, «[…] la force donne rendez-vous à l’esprit, la puissance à la culture»[1].

C’est précisément dans ce «miracle italien», et plus exactement dans ce «miracle florentin», qu’a pu s’accomplir le «miracle du chant» qui allait faire entendre à l’Occident, au seuil de sa première modernité, la voix de l’Hellade et de ses grandeurs. Il faut en effet parler de miracle puisque à Florence le chant platonicien, relégué dans une République idéale au temps de Platon qui assistait à la décadence de la culture, s’est bel et bien incarné. Tel fut le prodige que sut réaliser la Camerata[2]du comte Giovanni de’ Bardi[3], rassemblant les humanistes florentins Vincenzo Galilei[4], père de Galilée[5], Jacopo Peri[6], Girolamo Mei[7], Jacopo Corsi[8], Ottavio Rinuccini[9] autour d’un cercle intellectuel qui pensa la musique comme l’une des grandes disciplines de l’esprit et réalisa l’idéal platonicien de l’unicité poésie-musique, un miracle qui n’a rien à voir avec le genre «opéra» qui naîtra quelques décennies plus tard à l’opposé de cet idéal.[10]. La création de ce fleuron parmi les plus beaux du patrimoine intellectuel et artistique de la civilisation italienne et européenne n’aurait pu s’accomplir si elle n’avait trouvé les artistes hors pair pour lui donner vie. Seuls les Florentins, imprégnés depuis Dante par la question de la poésie et de langue toscane et initiés aux mystères néoplatoniciens, pouvaient donner chair à ce chant inspiré. Tel fût le rôle essentiel qui revint à Giulio Caccini[11] (interlocuteur privilégié du comte Bardi) et à sa fille Francesca[12], cygnes les plus excellents de l’humanisme florentin qui en firent à la cour de France et en Europe résonner la voix. La Cecchina en donna l’expression la plus sublime, en développant de façon insurpassable cet art noble du chant italien par une virtuosité hors du commun au service d’une densité et d’une subtilité d’émotion rarement atteintes[13].

Nella Anfuso est la voix qui, par un miracle renouvelé, nous relie à cette catena aurea. Son art, le seul véritable représentant de l’ancienne école italienne du chant, nous permet de comprendre en son sommet ce que doit être l’interprète, ce corps chantant qui, dernier maillon du processus conduisant de l’idée à la chair, est en même temps le fiat lux de toute musique. Porter le chant platonicien, c’est avant tout porter les valeurs qui le constituent. C’est être avant tout une personne, au sens idéal que l’humanisme a conféré à ce terme. Nous avons montré que le chant, véritable cultura animi, était formateur de la personne. Réciproquement, seule une personne pourra former un chant véritable, et en transmettre ensuite les plus hauts secrets.

Les traités de chant du XVIIIe siècle livrent quelques règles d’instruction pour le chanteur: celui-ci ne doit pas être ignorant, savoir lire et écrire, afin de pouvoir comprendre le sens des mots! Comment ne pas être atterré par ces observations qui signalent la condition misérable du chanteur réduit à un organe? L’interprète lui aura su se faire poète, c’est-à-dire maître du mot tant dans l’organisation métrique de sa structure que dans la musicalité de sa chair. Sans doute un rapport spontané avec la parole ne saurait ici suffire et il faut comme Nella Anfuso posséder de véritables échafaudages intellectuels[14] pour parvenir à une telle perfection. Mais être poète, ce n’est pas en rester à cette littéralité. C’est créer une musicalité qui parvienne à l’au-delà du sens.

C’est sans doute ce que nous voudrions retenir du témoignage de Nella Anfuso et que seuls de très rares artistes, à la pureté proche de celle de l’ange, ont su délivrer au monde. C’est ce message de la musique que nous voulons entendre, celui qui nous plonge au cœur du mystère de l’expérience musicale, au cœur du mystère de l’expérience humaine. Celui d’une musique dont la perfection technique permet de faire entendre la pure résonance de l’âme. Celui d’un exercice spirituel qui élève le char de l’âme jusqu’à contempler le soleil des idées.

                                                                                                                  

Remercions Nella Anfuso de ce don inestimable qu’elle nous fait et gageons qu’un tel art du chant, puisant son amour de la beauté et de la sagesse aux commencements du monde, ne laisse pour l’éternité de délivrer sa leçon d’humanité.

 

Florence MALHOMME

Université de la Sorbonne -  Paris IV

Scala de Milan, le 18 septembre 2006

 


 

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[1] F. BRAUDEL, Le modèle italien, Paris, Flammarion, «Champs», 1994. p. 10.

[2] C. V. PALISCA, «Camerata», The New Grove Dictionary of Music and Musicians, ed. S. Sadie, 2nd. ed. London, Macmillan Publishers, 2001, IV, p. 870; id., «The Camerata Fiorentina: A Reappraisal », Studi musicali, 1 (1972), p. 203-236 ; id., The fiorentine Camerata. Documentary Studies and Translations, New Haven, London, Yale University Press, 1989; H. MARTIN, «La Camerata du comte Bardi et la musique florentine du XVIe siècle», Revue de Musicologie, XVI (1932), p. 63-65, 69‑70, 153, 159; D. GIACOTTI, «Il recupero della tragedia antica a Firenze e la camerata de’ Bardi», Contributi dell’Istituto di filologia moderna, Serie storia del teatro, I, Milano, 1968, p. 94-132; N. PIRROTTA, «Tragédie et comédie dans la Camerata Fiorentina», Musique et poésie au XVIe siècle, Colloques internationaux du centre de la recherche scientifique, Paris, 30 juin-4 juillet 1953, Paris, Éd. du C.N.R.S, 1954, 2e éd.1963, réimpr. 1973, p. 287-295; id., «Temperamenti e tendenze nella Camerata Fiorentina», Scelte poetiche di musicisti. Teatro, poesia e musica da Willaert a Malipiero, Venezia, Marsilio, 1987, p. 173-195.

[3] R. CANTAGALLI, L. PANNELLA, «Bardi, Giovanni de’», in Dizionario biografico degli italiani, Roma, Istituto della Enciclopedia italiana, VI, 1964, p. 300-303; G. GASPERINI, «G. B. de’ conti di Vernio», La Rinascita musicale, I, 12 (1910), p. 12-15 ; II, 4 (1910), p. 5-8; 5-6 (1910), p. 16-17; 7‑8 (1910), p. 12-15 ; 10-11 (1910), p. 14-23 ; C. V. PALISCA, «Bardi, Giovanni de’», The New Grove Dictionary of Music and Musicians, ed. S. Sadie, 2nd. ed. London, Macmillan Publishers, 2001, II, p. 719‑720 ; id., «The Musical Humanism of Giovanni Bardi», in Poesia e musica nell’estetica del XVI e XVII secolo, Atti del convegno internazionale di musicologia del Centro Studi Rinascimento Musicale , 3‑10 maggio 1976, a cura di H. Meyvalian, Firenze, Fondazione Centro Studi Rinascimento musicale, 1979, p. 45‑72 ; id., «A Discourse on the Performance of Tragedy by Giovanni de’ Bardi (?)», Musica Disciplina, 27 (1983), p. 327-343; «The Alterati of Florence, Pioneers in the Theory of Dramatic Music»,  Essays in Honour of Donald J. Grout, ed. W. W. Austin, Ithaca, New York, Cornell University Press, 1968, p. 9-38, repr. in Studies in the History of Italian Music and Theory, Oxford, Clarendon, 1994 .

[4] R. MELONCELLI, «Galilei, Vincenzo», in Dizionario Biografico degli Italiani, Roma, Istituto della Enciclopedia italiana, LI, 1998, p. 486-489; F. FANO, «Alcuni chiarimenti su Vincenzo Galilei», La Rassegna musicale, X (1937), p. 85-92; La Camerata Fiorentina: Vincenzo Galilei. La sua opera d'artista e di teorico come espressione di nuove idealità musicali, a cura di F. Fano, Milano, Ricordi, 1934 ; C. ORSINI, «Vincenzo Galilei», Il Fronimo, XVI, n° 62 (1988), p. 7–28; C. V. PALISCA, «Vincenzo Galilei and Some Links between “Pseudo-monody” and monody», The Musical Quarterly, XLVI (1950), p. 344-360; Vincenzo Galilei, atti del convegno di studi svoltosi nell'aprile 1987 presso la Biblioteca comunale, a cura di D. Bertoldi, R. Cresti, N. Anfuso, Pontedera, Bandecchi & Vivaldi, 1988 ; A. GIANUARIO, Vincenzo Galilei, la dissonanza e la seconda pratica, Discorso di Vincenzo Galilei intorno all'uso delle dissonanze (Ms. di Firenze), Artimino, Fondazione Centro Studi Rinascimento musicale, 2002.

[5] A. FAVARO, «Ascendenti e collaterali di Galileo Galilei», Archivio storico italiano, s. 5, XLVII (1911), p. 346-378 ; A. PROCISSI, La collezione galileiana della Biblioteca Nazionale di Firenze, I, Anteriori. Galileo, Roma, Istituto poligrafico dello Stato, 1959; S. DRAKE, «Vincenzio Galilei and Galileo», Galileo Studies: personality, tradition, and revolution, Ann Arbor, University of Michigan Press, 1970, p. 43–62;  D. P. WALKER, «Some Aspects of the Musical Theory of Vincenzo Galilei and Galileo Galilei», Proceedings of the Royal Musical Association, c (1973-1974), p. 33-47, repr. in Studies in Musical Science in the Late Renaissance, London, Warburg Institute, University of London, Leiden, Brill, 1978, p. 14–26; P. CANGUILHEM, «Tel père, tel fils ? Les opinions esthétiques de la famille Galilei», IRASM, XXIII (1992), p. 27–42.

[6] W. PORTER, T. CARTER, «Peri, Jacopo», The New Grove Dictionary of Music and Musicians, ed. S. Sadie, 2nd. ed. London, Macmillan Publishers, 2001, XIX, p. 397-401 ; M. MILA, «Jacopo Peri», La Rassegna musicale, VI (1933), p. 219-227; C. V. PALISCA, «Peri and the Theory of Recitative», Studi musicali, XV (1982), p. 51-61, repr. in Studies in the History of Italian Music and Music Theory, Oxford, Clarendon Press, 1994, repr. 2001, p. 452–466 ; T. CARTER, «Jacopo Peri (1561–1633): Aspects of his Life and Works», Proceedings of the Royal Musical Association, CVI (1978-1979), p. 50–62 ; id., «Jacopo Peri», Music and Letters, LXI (1980), p. 121–135; id., Jacopi Peri (1561–1633) : his Life and Works (New York and London, Garland Pub, 1989.

[7] C. V. PALISCA, «Mei, Girolamo», The New Grove Dictionary of Music and Musicians, ed. S. Sadie, 2nd. ed. London, Macmillan Publishers, 2001, XVI, p. 285-287; id., « Girolamo Mei Mentor to the Florentine Camerata», The Musical Quarterly, XL, 1954, p. 1-20; D. RESTANI, L’itinerario di Girolamo Mei: dalla "poetica" alla musica, con un’appendice di testi, Firenze, Olschki, 1990.

[8] P. MALANIMA, «Corsi, Iacopo», in Dizionario biografico degli italiani, Roma, Istituto della Enciclopedia italiana, XIX, 1983, p. 576-577; W. V. PORTER, «Peri and Corsi’s Dafne: Some New Discoveries and Observations», Journal of the American Musicological Society, XVIII (1965), p. 170–196; T. CARTER, «Music and Patronage in Late Sixteenth-Century Florence: the Case of Jacopo Corsi (1561–1602)», I Tatti Studies: Essays in the Renaissance, Firenze, Olschki, I, 1985, p. 57–104.

[9] F. RACCAMADORO-RAMELLI, Ottavio Rinuccini: Studio biografico e critico, Fabriano, Gentile, 1900; M. SCHILD, Die Musikdramen O. Rinuccinis, Würzburg, Buchdruckerei R. Mayr, 1933; C. CALCATERRA, Poesie e canto: studi sulla poesia melica italiana e sulla favola per musica, Bologna, Zanichelli, 1951; B. R. HANNING, «Apologia pro Ottavio Rinuccini», Journal of the American Musicological Society, XXVI (1975), p. 240-262; G. A. TOMLINSON, «Ancora su Ottavio Rinuccini», Journal of the American Musicological Society, XXVIII (1975), p. 351-356; id., «Monteverdi and the Claims of Text: Monteverdi, Rinuccini, and Marino», Critical Inquiry, VIII (1981–2), p. 565–589; B. BUJICS, «“Figura poetica molto vaga”: Structure and Meaning in Rinuccini’s Euridice», Early Music History, X (1991), p. 29–64.

[10] Poesia e musica nell’estetica del XVI e XVII secolo, Atti del convegno internazionale di musicologia del Centro studi rinascimento musicale, Villa medicea La Ferdinanda, 3-10 maggio 1976, a cura di H. Meyvalian, Artimino, Fondazione Centro Studi Rinascimento musicale, 1979; Musica Umanistica da Poliziano a Rinuccini (XV-XVII sec.), estetica e prassi esecutiva, Atti del XIX convegno internazionale de musicologia, Artimino, Fondazione Centro Studi Rinascimento musicale, 1995; J. W. HILL, « Oratory Music in Florence,  I: Recitar Cantando, 1583–1655», Acta musicologica, LI (1979), p. 108‑136.

[11] C. CASELLATO, «Caccini, Giulio », in Dizionario biografico degli italiani, Roma, Istituto della Enciclopedia italiana, XVI, 1973, p. 25-31; I. FENLON, «Giulio Romolo Caccini », The New Grove Dictionary of Music and Musicians, ed. S. Sadie, 2nd. ed. London, Macmillan Publishers, 2001, IV, p. 769-775; K. A. EHRICHS, Giulio Caccini, Leipzig, s. e., 1908; R. MARCHAL, «Giulio Caccini: l’union de la poésie et de la musique », La Revue musicale, VI (1924-1925), 4, p. 116-138 ; N. ANFUSO, La problematica delle alterazioni nelle Nuove musiche di Giulio Caccini, Firenze, OTOS, 1970 ; A. GIANUARIO, La monodia di Giulio Caccini: la sua realtà artistica e le manomissioni in atto, Artimino, Fondazione Centro Studi Rinascimento musicale, 1979; H. B. BROWN, «The Geography of Florentine Monody: Caccini at Home and Abroad», Early Music, IX (1981), p. 147-168; R. GIAZOTTO, Le due patrie di Giulio Caccini, musico mediceo (1551-1618): nuovi contributi anagrafici e d'archivio sulla sua vita e la sua famiglia, Firenze, Olschki, 1984; T. CARTER, «Giulio Caccini (1551-1618): New facts; New Music», Studi musicali, XVI (1987), p. 13-31.

[12] L. PANNELLA, «Caccini, Francesca», in Dizionario biografico degli italiani, Roma, Istituto della Enciclopedia italiana, XVI, 1973, p. 19-23; I. FENLON, «Francesca Caccini», The New Grove Dictionary of Music and Musicians, ed. S. Sadie, 2nd. ed. London, Macmillan Publishers, 2001, IV, p. 775-77 ; A. BONAVENTURA, «Un ritratto della Cecchina», La Cultura musicale, n° 6 (1922), p. 7‑12; M. G. MASERA, «Una musicista fiorentina del seicento: Francesca Caccini», La Rassegna musicale, XIV (1941), p. 181-207, 237-251 ; XV (1942), p. 249-266; D. SILBERT, «Francesca Caccini, called La Cecchina », The Musical Quarterly, XXXII (1956), p. 50-62 ; S. G. CUSIK, «Thinking from Women’s Lives: Francesca Caccini after 1627», The Musical Quarterly, LXXVII (1993), p. 484-507.

[13] Voir N. ANFUSO, «Problematica semiografica», in F. CACCINI, Florilegio. Musiche, Libro I, Firenze 1618, Artimino, Fondazione Centro Studi Rinascimento musicale, 2006, p. 7-14 ; id., «La vocalità di Francesca detta la “Cecchina”», op. cit., p. 15-17.

[14] Voir N. ANFUSO, A. GIANUARIO, Preparazione alla interpretazione della poiesis monteverdiana, Firenze, OTOS, 1971; A. GIANUARIO, Modalità e realtà fonetica nel Lamento d'Arianna di Claudio Monteverdi, prefazione di N. Anfuso, Artimino, Fondazione Centro Studi Rinascimento musicale, 1999.

 

LA INCARNAZIONE DEL CANTO PLATONICO

IL “MIRACOLO FIORENTINO” ED I SUOI INTERPRETI

 

È ben raro che l’idealità trovi qualche accordo con l’imperfezione del mondo umano e la labilità dei tempi storici e si contempli l’Assoluto nel cielo delle idee, a meno che la storia non compia qualche miracolo. È come “miracolo italiano” che bisogna, dopo il “miracolo greco” dell’Atene di Pericle, qualificare il modello che offre all’Europa politica, economica, intellettuale e artistica la civiltà dell’Umanesimo italiano dove, come ha sì ben mostrato lo storico Fernand Braudel, “ (…) la forza dà appuntamento all’intelletto, la potenza alla cultura”.

È precisamente in questo “miracolo italiano”, e più esattamente in questo “miracolo fiorentino” che ha potuto realizzarsi il “miracolo del canto”, che avrebbe fatto ascoltare all’Occidente, alla soglia della sua prima modernità, la voce dell’Ellade e la sua grandezza. Bisogna in effetti parlare di miracolo poiché è a Firenze che il canto platonico, relegato in una Repubblica ideale al tempo di Platone che assisteva alla decadenza dell’antichità, sì è completamente incarnato. Tale è stato il prodigio che ha saputo realizzare la Camerata del conte Bardi, riunendo gli umanisti fiorentini Vincenzo Galilei, padre di Galileo, Jacopo Peri, Girolamo Mei, Jacopo Corsi, Ottavio Rinuccini in un circolo intellettuale che pensò la musica come una delle grandi discipline dello spirito e realizzò l’ideale platonico della unicità poesia-musica,,, un miracolo che niente ha a che vedere con il genere “opera” che nascerà alcune decenni dopo, in opposizione a questo ideale. La creazione di questo gioiello fra i più belli del patrimonio intellettuale ed artistico della civiltà italiana ed europea non avrebbe potuto compiersi se essa non avesse trovato gli artisti eccezionali per dargli vita. Solo i Fiorentini, impregnati dall’epoca di Dante della questione della poesia e della lingua toscana ed iniziati ai misteri neoplatonici, potevano dare carne a questo canto ispirato. Tale fu il ruolo essenziale che toccò a Giulio Caccini (interlocutore privilegiato del conte Bardi) e alla figlia Francesca, i cigni più eccellenti dell’umanesimo fiorentino che fecero risuonare la loro voce alla corte di Francia e in Europa. La Cecchina ne dà l’espressione più sublime, sviluppando in maniera insuperabile questa nobile arte del canto italiano con una virtuosità fuori del comune al servizio di una densità e sottigliezza di emozione raramente raggiunti.

Nella Anfuso è la voce che, per un miracolo rinnovato, ci collega a questa catena aurea. La sua arte, la sola vera che rappresenti l’antica scuola italiana di canto, ci permette di comprendere nella sua sommità ciò che deve essere l’interprete, questo corpo cantante che, ultimo anello del processo che conduce dall’idea alla carne, è allo stesso tempo il fiat lux di ogni musica. Farsi portatore del canto platonico, è prima di tutto portare i valori che lo costituiscono. È essere prima di tutto una persona, nel senso ideale che l’umanesimo ha dato a questo termine. Abbiamo mostrato che il canto, veritiera cultura animi, era formatore della persona. Reciprocamente, solo una persona potrà formare un vero canto, e trasmetterne in seguito i più alti segreti.

I trattati di canto del XVIII secolo danno alcune regole di istruzione per il cantante: questi non deve essere ignorante, deve sapere leggere e scrivere, al fine di poter comprendere il senso delle parole! Come non essere prostrati da queste osservazioni che segnalano la condizione miserabile del cantante ridotto a un organo? L’interprete, lui, sa invece farsi poeta, cioè maestro della parola tanto nella organizzazione metrica della sua struttura che nella musicalità della sua carne. Senza dubbio un rapporto spontaneo con la parola non potrebbe qui bastare e bisogna, come Nella Anfuso, possedere delle superiori strutture intellettuali per giungere ad una tale perfezione. Ma essere poeta non significa restare in questa letterarietà. È creare una musicalità che vada al di là del senso.

È senza dubbio ciò che noi vorremmo conservare della testimonianza di Nella Anfuso, e solo rarissimi artisti, dalla purezza vicina a quella degli angeli, hanno saputo svelare al mondo. È questo messaggio della musica che vogliamo ascoltare, quello che ci immerge nel cuore del mistero dell’esperienza musicale, nel cuore del mistero della esperienza umana. Quello di una musica di cui la perfezione tecnica permette di fare ascoltare la pura risonanza dell’anima. Quello di un esercizio spirituale che eleva il carro dell’anima fino alla contemplazione delle idee.

Ringraziamo Nella Anfuso di questo dono inestimabile che ella ci fa e impegniamoci affinché una tale arte del canto, attingendo il suo amore per la bellezza e la saggezza dai primordi del mondo, non manchi per l’eternità di svelarci la sua lezione di umanità.

Florence MALHOMME

Université La Sorbonne- Paris IV

La Scala di Milano, il 18 Settembre 2006

La Voix et l'Esprit

Pour une philosophie du Chant

Lunedì 18 Settembre 2006 - Milano - Teatro alla Scala - ore 15.30

Florence Malhomme

Université de la Sorbonne - Paris IV

illustra

Francesca Caccini - Nella Anfuso

 

         

 

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  1. Ecco ch'io verso il sangue  (9.23)

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  2. Dispiegate  (4.11)

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  3. Rendi alle mie speranze il verde, e' fiori [Romanesca]  (4.32)

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  4. O chiome belle  (2.42)

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  5. Pietà, mercede, aita  (6.47)

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  6. Io veggio i campi verdeggiar fecondi [Romanesca]  (3.11)

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  7. Che t'ho fatt'io  (4.36)

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  8. Lasciatemi qui solo  (7.54)

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  9. Te lucis ante terminum  (4.16)

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10. Che fai misero core ecco ch'in Croce  (6.31)

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11. Giunto 'l di' che dovea 'l Cielo  (7.17)

 

 

 

 

 

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