LA CARRIĒRE

Wiener graben était, jusqu'en 1943, la dénomination de cette carrière. Les SS en prennent possession avec la perspective de construire à proximité un camp d'extermination. Plus tard, elle devient la carrière de Mauthausen, rendue célèbre par son escalier aux 186 marches de hauteur inégale pour rendre son ascension plus terrible. Ce fut un des lieux de supplice les plus redoutés. De ce rocher haut de 80 mètres, on extrait journellement des tonnes de granito. Tout est prétexte à la brimade et aux coups. Les Kapos, bâtons en main, frappent sans discontinuer, sous les regards jouisseurs des SS. Pas question d'outillage mécanique; tout est fait par l'homme, plutôt ce qui resta de l'homme. Nous sommes soumis aux travaux forcés. Les wagonnets chargés à la main sont tractés de la même façon; malheur au déraillement. Les coups pleuvent jusqu'à la remise sur les rails, mais plusieurs camarades baignent dans le sang. Tous les jours à midi l'équipe des dynamiteurs pose les mines dans le roc; il s'ensuit de formidables explosions. Les équipes chargent ensuite les blocs de pierre sous un soleil de plomb ou sous une pluie glaciale. Le travail ne s'arrête pas, et ainsi, tous les jours, tous les mois, toutes les années, c'est la même cadence. Le soir, chaque bagnard charge un bloc de 20 à 30 kilos sur l'épaule et c'est la remontée sous les coups et les hurlements de ces brutes déchaînées. Impossible d'aider un plus faible, c'est la mort ... Souvent, la chute d'un pauvre détenu avec son chargement entraîne plusieurs camarades. Les malades, les morts, doivent être remontés du fond pour être présents à l'appel du soir.