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LA STRAFKOMPAGNIE

La Strafkompagnie existait dans tous les camps de concentration; c'était le commando dit «des punis», composé de détenus ayant commis une faute grave: vol, sabotage ou refus d'obéissance. Pour ce kommando, le travail consistait à remonter de la carrière, profonde de 80 mètres, des blocs de granit pesant en moyenne de 20 à 30 kilogrammes par un escalier aux cent quatre-vingt-six marches toutes disjointes et d'inégale hauteur, ce qui en augmentait la difficulté et rendait son ascension encore plus meurtrière. Du camp à la carrière, les punis devaient courir au pas de gymnastique. La remontée étant un véritable calvaire, les corps buttant dans ces affolantes escalades, évitant ceux qui tombaient avec leurs charges mortelles, et s'ils n'étalent pas écrasés ils étalent battus à mort par les kapos. Ceux qui ne pouvaient se relever étaient abattus au pistolet par les SS qui accompagnaient cette marche dantesque. En août 1944, au cours d'un raid de l'aviation alliée, plusieurs avions furent tou­chés par la «flack». Les pilotes durent sauter en parachute. Arrêtés par les polices locales, ils furent amenés au camp et livrés à la strafkompagnie dans leur tenue de vol. Cela n'a guère duré; dans la journée ils moururent. Certains d'entra eux se suicidèrent au cours du premier voyage en s'élançant vers les fils de fer électrifiés entourant la carrière. Ils étaient aussitôt abattus par les sentinelles placées dans les miradors. Nous regardions passer cette «colonne» chargée de souffrances avec une certaine crainte. Du fond de nos cœurs, nous voudrions les encourager à supporter cet infernal supplice. Ces massacres avalent lieu aussi pour servir d'holocauste à certains anniversaires. Toutes ces pierres extraites de la carrière, montées à dos d'hommes et qui constituaient les remparts du camp, représentent pour nous des sommes de souffrances surhumaines dont le poids ne peut probablement se retrouver dans l'histoire du monde en si peu de place.