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Marseille, 19 Janvier 1862.
Chère fille en Notre-Seigneur,
Je vous écris en chemin de fer, n'ayant eu ni [le] temps, ni la possibilité de le faire à Marseille.
Je vais dire un petit bonjour à ma soeur. Samedi matin, j'irai dire ma Messe à Fourvière, si c'est possible; j'y verrai vos bonnes soeurs un moment, puis Mme Marcel.
Je partirai le soir pour Tarare, où je resterai quelques jours; puis je partirai pour Paris, pour arriver à la fin de la semaine. Voilà mon itinéraire. Si vous aviez à m'écrire, ce serait, ou chez vos soeurs, ou à Tarare, chez Mr le Curé de la Madeleine.
J'ai été un peu fatigué du froid du mistral; j'ai eu une petite courbature d'un jour et demi. Tout cela s'en va par le chemin de fer.
L'air de la mer m'éprouve ordinairement un peu par un peu d'irritation de poitrine.
J'ai été bien édifié de notre petite maison de Marseille, elle est édifiante; le Maître y est bien servi, il doit être content. Le P. de Cuers, quoique un peu rude à l'extérieur, est très bon au fond. Il gagne à être connu: c'est un saint homme, il en a tout des intentions si droites. Le bon Dieu l'a bien éprouvé, il lui doit une ample bénédiction, et il le bénit.
Le P. Leroyer est un véritable apôtre du Très Saint Sacrement.
Le P. Locudent s'était bien mal conduit ici, il avait mis la désunion, avait vilipendé la maison à l'extérieur, décourageait les vocations, jamais nous n'avions encore eu un si déplorable novice.
Hélas! après avoir été si bon pour lui!
Veuillez donner de nos nouvelles au bon Père Champion, je lui écrirai plus tard; faire mes excuses à la mère du Bon-Pasteur et lui dire que la nécessité n'a pas de loi.
Dites à soeur Benoîte que je suis content de sa lettre, et encore plus si elle est bien sage et prie beaucoup. Mes bons et bien dévoués souvenirs à toutes vos soeurs, je ne les ai pas oubliées, c'est la famille: comment pourrait-on l'oublier?
Je vous bénis toutes et surtout la mère et la servante de toutes en l'amour de Notre-Seigneur.
Tout à vous en Notre-Seigneur.
EYMARD.
Marseille, 19 Janvier 1862.
BIEN CHERES SOEURS,
Je vous écris deux mots pour vous dire que je suis en chemin de fer pour Valence où je coucherai ce soir et arriverai à La Mure demain lundi soir vers les six heures.
Je vais bien. A bientôt !
Tout à vous en N.-S.
Votre frère
EYMARD, Sup. S. S.
Paris, 9 Février 1862.
Bien cher Père,
Me voici à la vie ordinaire.
J'ai trouvé la maison bien; un manque au service, c'est le fr. Louis, le dernier venu de Moulins; son père est un disciple du Siècle, il a vu tout ce que l'on dit contre les Ordres religieux, il a obligé son fils de quitter, malgré la permission par écrit qu'il avait donnée.
En arrivant, le P. Champion m'a exposé assez fortement ce que je vais vous soumettre.
Il faut que l'autorité soit honorée en tout ce qui constitue pas privilège, mais qui est de droit commun; or il voudrait que la messe de communauté de la Maison-Mère fût toujours dite par le supérieur. C'est dans l'ordre, dit-il, et dans la convenance: un Père doit communier ses enfants; il doit être le centre et l'union de la prière: dans les autres Ordres, dit-il, cela se fait.
Il doit en être alors de même de l'hebdomadaire, qui doit reprendre sa place ordinaire au choeur, dès que son office est fini, s'il y a un autre office différent: que pensez-vous, cher Père, de cela? Pour moi, j'aimerais mieux le rien; on dit qu'ici ce ne doit pas être une question personnelle.
De même on dit qu'il faudrait que, quand le Supérieur entre, tous se lèvent.
Répondez-moi comme vous le voyez devant Dieu et pour le mieux. Je vais vous voir souvent en esprit, j'y suis toujours de coeur avec vous, surtout aux pieds du Bon Maître.
Je vais bien. J'ai des choses en retard à faire peur: tout se fera.
Le P. Clavel a fait ses voeux le 8 Décembre et nous écrit une bonne lettre. Mille amitiés eucharistiques à tous.
Tout vôtre en Notre-Seigneur.
EYMARD, S. S.
Paris 11 février 1862
Madame,
Je viens vous remercier de votre religieux souvenir et hommage à N.S.; des cierges de dévotion ont brûlé sur son autel en reconnaissance de la grâce reçue, nous demandons bien à ce bon Maître de la continuer, de la bénir, de vous rendre heureuse mère.
Il est si bon qu'il vous donnera encore plus que tous nos voeux et nos désirs! - Aussi ayez toujours bien confiance en sa bonté si tendre - consacrez-lui votre fruit, donnez-vous encore plus à son bon service et on vous dira heureuse au Ciel et sur la terre. Les Saints sont toujours le fruit des prières et des pénitences.
Je vous prie, Madame, de vous souvenir un peu de moi dans vos prières et de me croire en N.S.
Votre respectueux et dévoué serviteur.
Eymard Sup.
Paris, 17 Février 1862.
BIEN CHERES SOEURS,
Me voici au milieu de toutes mes occupations si multipliées, n'ayant pas un moment à moi; c'est à en faire bien souvent le sacrifice et à dire: Mon Dieu, je vous l'offre! - J'ai bien reçu l'argent que vous m'avez envoyé, je vous en remercie.
En arrivant à Grenoble, j'ai trouvé l'adoration à Notre-Dame de la Salette et j'y ai prêché le soir; il y avait beaucoup de monde, comme à l'ordinaire.
Le vendredi matin, étant allé faire une visite à Monseigneur, je n'ai pu refuser son invitation à dîner avec un bon évêque de l'Amérique que je connais et qui se trouvait là, ce qui m'a retardé pour Lyon où je n'ai fait que passer d'abord. J'ai prêché une retraite du Très Saint Sacrement à Tarare, ville de douze mille âmes, et où il y a sept cents adorateurs ou adoratrices; j'y ai été bien édifié et consolé, j'y ai prêché soir et matin pendant sept jours et il y a eu une communion générale très nombreuse. Le Bon Dieu a encore de bien bonnes âmes. Assurément, vous auriez besoin d'une bonne mission à La Mure, car, hélas ! c'est bien froid, et cependant il y a des coeurs chauds.
Cette pauvre Françoise est donc morte ! J'ai commencé à dire moi-même ses quarante messes et les dis avec plaisir, parce que je l'estimais beaucoup et qu'assurément elle est sauvée. Mais on n'a pas été en Purgatoire. Je ne sais rien.
Nous avons un très beau temps... Ma santé se soutient bien. - Mlle Guillot va assez bien, ainsi que ses soeurs. J'ai vu Mlle Prost, je tâcherai de lui venir en aide.
Allons, mes bonnes soeurs, quand on a le Très Saint Sacrement, qu'on le connaît, qu'on l'aime, qu'on le reçoit souvent, on se passe de bien des choses. Le Maître remplace suréminemment tous ses serviteurs; seulement vivez bien du saint recueillement en Notre-Seigneur.
Je vous bénis
Tout vôtre en N.-S.
Votre frère
EYMARD, Sup.
L. J. C.
Paris, 19 Février 1862.
Bien cher Père,
Je vous remercie bien de votre réponse et de son contenu, savoir:
1· de la messe du supérieur, c'était ma pensée, je voulais savoir la vôtre.
2· Pour la petite et aimable monition des repas, vous avez raison; aussi depuis, j'ai suivi cette Règle.
3· Pour Londres, le P. Champion aime cette pensée, il a écrit, pas de réponse encore; c'est que c'est une affaire importante.
Je prie beaucoup pour cette troisième maison et m'offre à Notre-Seigneur pour souffrir pour elle, car une fondation est un crucifiement, et une résurrection, si Dieu la veut et nous trouve fidèles.
4· J'ai remis à Mr Gondon ses 100 fr.; il en avait grand besoin; son affaire marche; j'ai vu son mémoire, il a fait impression sur les hommes d'Etat, il espère un dédommagement.
5· Vous pensez sérieusement à Rome, c'est bien; pour moi cette idée n'est pas encore clairement voulue de Dieu, car si la Société n'a rien à recevoir, je ne dois pas y aller; puis, je pense que le moment ne sera pas favorable pour traiter les affaires particulières, avec la présence de tant d'Evêques: à la Sainte Volonté de Dieu! J'en ai parlé au P. Champion, il est hésitant; peut-être, le moment venu, se décidera-t-il.
6· Le P. Champion a été fatigué pendant trois à quatre jours par la fièvre qui court; il n'a pas tenu le lit cependant, la voilà guéri et à tout, depuis trois jours. Les autres vont bien, sauf le frère Simon, de Verdun, qui souffre un peu de la tête.
7· M. Fouquet, si vous le voulez, vous arrangera la clef du Tabernacle en la soudant avec l'anneau, si cela vous convient; vous pourriez la lui envoyer par la poste, cela ne coûte que 10 centimes: c'est peut-être le meilleur moyen d'avoir une jolie clef.
8· J'ai soldé tous vos petits comptes, le P. Carrié a commandé votre cire; il faut que le Bon Maître paie un peu son compte de luminaire.
Quand vous enverrez des caisses à Paris, ayez soin de défalquer le poids brut de la caisse, autrement on paie tout comme cire.
9· J'ai appris avec peine que vous avez été un peu souffrant, ainsi que le bon Père Leroyer. Allons! entretenez la lampe pour qu'elle brûle longtemps! Je remercie bien le bon P. Leroyer de ce qu'il m'a envoyé, cela m'a fait grand plaisir, j'en profite.
I0· Comme nous l'avions dit, tâchez, bon Père, de voir en direction toutes les semaines vos petits novices, c'est le moyen efficace de les former et de les attacher à la Société.
Je vous embrasse tous in osculo sancto, et suis en l'amour du Bon Maître.
Tout vôtre.
EYMARD S. S.
L.J.C.
Paris, 20 Février 1862.
Cher ami et frère en N.-S.,
Je viens répondre à votre aimable lettre: elle m'a d'abord effrayé, car c'est difficile à résoudre. J'ai attendu quelques jours, j'ai prié.
Vous avez raison de vouloir tirer la chose au clair, elle en vaut la peine; puis, vous y êtes seul intéressé. Dans les questions de conscience, il faut toujours remonter aux principes et avoir une règle précise. Or, voici mes réponses:
Il y a trois sortes d'impressions: les impressions de caractère, les impressions accidentelles et celles de la passion. - Les impressions accidentelles sont de peu d'importance, parce qu'elles sont imprévues et n'ont pas de racine dans la volonté, mais seulement sont sur le rang des tentations simples à mépriser. - Les impressions de caractère sont plus sérieuses; elles ont leur racine et leur force dans notre nature; elles peuvent facilement devenir des tentations naturelles et par conséquent plus puissantes sur nous: telles me paraissent, cher ami, les vôtres citées dans trois faits. Ces trois faits ne sont pas une cause grave et même une cause volontaire de péché, parce que le mouvement de tentation, de critique, de condamnation intérieure, repose sur un bon principe et non sur les personnes, savoir: sur l'amour de l'ordre, de la générosité et de l'abnégation. C'est vrai que l'application en devient ensuite personnelle et par comparaison et parallèle: c'est là la véritable tentation. Le premier mouvement est une impression pure et sans péché; le second, s'il était réfléchi et sans mandat de justice, pourrait devenir une faute vénielle. Mais quelle faute vénielle? Chez vous, vénielle d'impression première, parce que vous étiez vif, ardent et luttant; il faut, après, vous en humilier devant Dieu, quand cela regarde des étrangers ou des personnes sur lesquelles vous n'avez pas de droits ou de responsabilité. Mais vous êtes dans votre droit et devoir quand cela regarde les vôtres, vos commis; et ici la justice passe avant la charité. Seulement, rendez la justice aussi charitable que vous le pourrez.
Je n'ai pas besoin de vous parler des impressions de passion, cela ne vous atteint pas, grâce à Dieu. Ces impressions sont non le principe, mais la suite d'une passion mauvaise aimée ou voulue: ainsi les impressions d'un homme haineux, jaloux, impur, sont très dangereuses, parce qu'elles partent non d'un mouvement de faiblesse, mais d'un esclavage, d'un mauvais fond. - Quoiqu'en principe les impressions ne soient jamais péché par elles-mêmes, mais seulement une tentation à l'état sensible, cependant elles sont bien à craindre sous l'empire d'une passion.
Voilà, cher ami, ma réponse. Je suis content de votre question; elle m'a montré qu'avant tout [vous mettez] le salut et votre désir d'y marcher sûrement. Elle me donne aussi la satisfaction de vous remercier de votre si aimable hospitalité, et de vous renouveler mes sentiments bien affectueux et dévoués à vous et à votre chère famille, que j'aime comme mienne. Donc,
Tout vôtre en N.-S.
EYMARD, Sup.
Paris, 23 Février 1862.
MADAME MATHILDE,
Je viens, bonne fille, répondre à toutes vos questions. Elles me prouvent que vous m'avez bien compris et que vous avez la bonne et sérieuse volonté d'être à Dieu de tout votre coeur et par toute votre vie.
Posons d'abord le grand principe:
Allez à Dieu, à vos devoirs, au prochain par un esprit d'amour, et d'amour de sa sainte Volonté actuelle, et parce que Dieu le veut ainsi.
Tout alors sera l'exercice varié de cette divine Volonté. Vous serez dirigée par cette aimable Volonté divine, vous resterez en liberté sur tout le reste.
Vous n'aurez donc qu'une pensée générale, universelle et particulière: Dieu le veut, Dieu ne le veut plus, Dieu ne le veut pas.
Le moyen d'arriver à l'esprit de ce grand principe, c'est de prier, c'est de méditer quelques jours sur son excellence, c'est de lire ce qui y a trait, comme le traité de la Conformité à la Volonté de Dieu de Rodriguez, etc., c'est de faire souvent des aspirations d'amour de cette Volonté dirigeante, concomitante, subséquente de toutes nos actions et de tous nos états.
Je viens au détail de votre lettre. Vous me dites: Il est assez facile de voir la Volonté de Dieu dans les devoirs d'état, mais ce qui m'embarrasse ce sont des inspirations sur des choses qui ne sont pas obligées, comme de renoncer à un plaisir permis, de faire une mortification, etc.
Réponse. - 1· Suivez les inspirations de conseil quand elles sont accompagnées de paix et d'attrait de grâce: Dieu le veut de votre bon coeur.
Rejetez celles qui se combattent avec d'autres devoirs et mettent votre âme dans la tristesse du trouble, de l'inquiétude, et vous laissent dans le vague, si Dieu le veut ou non: c'est une fausse lumière.
2· Soyez plus généreuse dans les mortifications de sensualité, quand l'idée vous vient avant, mais laissez-les quand c'est pendant une action commencée. C'est trop tard. Ce n'est qu'une inquiétude de piété ou de conscience perplexe.
3· Méprisez cette crainte d'une vie trop parfaite: elle vient de ce que vous vous mettez dans la mortification, dans le moyen et non dans la liberté de la vie en Dieu, dans le grand principe de la vie.
4· Combien de fois à peu près dois-je me fixer de penser à Dieu dans la journée?
Réponse. - Prenez un signe extérieur qui vous rappelle le souvenir de Dieu: quand l'heure sonne, par exemple, quand vous commencez une action un peu durable, quand vous recevez une visite, etc.
L'amour pense en ce qu'il aime. Plus l'amour est grand, plus le souvenir est doux et libre en même temps.
Mais que l'amour de Dieu soit naturel, c'est-à-dire en rapport avec ce que vous faites, ou avec les dispositions intérieures, mêlé à ce que vous aimez.
5· Quelle pénitence? - A un temps libre, seule, courte. Jamais autrement, et mieux le matin, si le soir vous n'êtes pas seule. Dans ce cas, il vaudrait mieux les laisser.
6· Pas de méditation avec la plume, mais avec le coeur toujours, et un peu l'esprit, quand il n'est pas fermé. Mais peu de réflexions pures; réfléchissez en affection, en dialogue avec Dieu, etc.
7· La confession de tous les quinze jours suffit. Cependant, s'il survenait quelque chose d'extraordinaire et d'insurmontable et de très positif qui vous empêchât de communier, il vaudrait mieux aller vous réconcilier, parce que la sainte Communion est la fin de la vie et sa perfection.
8· La sainte Communion est pour vous le grand exercice des vertus chrétiennes, l'acte royal de l'amour, la pluie du matin.
Il faut donc aller à la sainte Communion comme à la grâce souveraine de sanctification, et en bonne petite fille qui n'a rien, et en bonne pauvre qui a besoin de tout et à qui Notre-Seigneur veut se donner de faveur et de prédilection.
9· Quant à l'examen du soir, examinez d'abord les devoirs envers Dieu, puis envers le prochain, enfin les manquements intérieurs qui ont été vus ou sentis par la conscience, et pas plus.
Quant aux fautes intérieures d'amour-propre, de paresse, de dissipation, il faut s'en débarrasser au fur et à mesure qu'elles passent devant vous, comme les moucherons de l'état, ou comme la poussière du vent.
10· Pour combattre votre défaut dominant, la paresse, c'est de ne jamais renvoyer un devoir, quand le moment est venu de le remplir et que vous le pouvez sans trop vous gêner.
Aimez bien le Bon Dieu, bonne fille, mais d'un amour d'esprit en sa divine beauté et vérité, d'un amour de coeur affectueux et tout filial, d'un amour dévoué, jeune comme la flamme du foyer qui ne se replie jamais sur elle-même.
Adieu. Je vous bénis et prierai toujours bien pour vous et les vôtres, qui me sont bien chers.
EYMARD, S.
Paris, 23 Février 1862.
MADAME ET CHERE SOEUR EN N.-S.,
Vous grondez bien fort, et cependant je ne suis resté que quelques heures à Lyon, malgré les deux nuits. Je suis resté tout le reste du temps sur la montagne de Fourvières à y visiter les Communautés, etc.; donc Lyon n'a pas eu la plus grande partie de mon temps. Puis il faut dire aussi que je ne sais pas me débarrasser du monde et qu'alors je reste trop là où il ne faudrait pas; bref, vous avez assez grondé, ou fait semblant. Est-ce donc que vous n'êtes pas vieille fille en Notre-Seigneur!
Me voici tout disposé à recevoir vos deux nièces et à leur donner tout le temps qu'elles voudront; mais il faut qu'elles viennent, et comme à Paris les courses sont longues, si elles pouvaient m'écrire un mot la veille pour me dire l'heure à laquelle elles viendront, ce serait mieux.
Il est vrai que je suis toujours à la maison à 4 heures, heure du salut, libre avant ou à 4h.1/2.
Vous voilà toute en courses et visites, et vous vous en trouvez bien; tant mieux! Souvent la vie intérieure a besoin d'une expansion et même d'un exercice pénible; l'âme ne s'y dissipe pas, elle s'y exerce et dépense son trop plein. Ainsi sachez converser avec Dieu et avec le prochain, conservez Dieu en vous au milieu du monde; et quand vous avez fait trop de dépenses de vie intérieure, remplissez de nouveau ce vase vide et redevenez un réservoir plein et surabondant; c'est nécessaire!
Je prie toujours pour vous. Il est dans la vie de ces grandes figures que l'on n'oublie jamais, parce que c'est un miroir toujours vivant devant Dieu.
Adieu donc, je vous laisse et vous bénis.
Tout à vous.
EYMARD.
Paris, 25 Février 1862.
BIEN CHERE SOEUR EN N.-S.,
Il n'y a que quelques jours que je suis arrivé de Marseille; et ce n'est qu'aujourd'hui que j'ai eu le plaisir de lire votre chère lettre.
Je viens vite y répondre.
Merci d'abord de vos messes, j'aime à les dire moi-même tous les mardis.
J'ai trouvé onze adorateurs à notre maison de Marseille, dont trois prêtres; ils comprennent la Très Sainte Eucharistie, et c'est tout dire. Ils l'aiment et ils sont tout dévoués à son service. L'Oeuvre rayonne dans tout Marseille. Là, le culte du Très Saint Sacrement par les Quarante-Heures perpétuelles y est ravissant. Figurez-vous l'église des Quarante-Heures ouverte toute la nuit. Jusqu'à midi elle est ordinairement pleine; de minuit à 5h., beaucoup de monde encore, et cela dans chaque paroisse.
En revenant à Paris, je me suis arrêté à Tarare, près de Lyon; j'y ai donné une retraite eucharistique à la ville de 12.000 âmes. Là se trouvent 700 adorateurs ou adoratrices, et dans les deux paroisses l'adoration diurne est perpétuelle. C'est très consolant et édifiant.
Ici, à Paris, nous sommes 14, dont 7 prêtres et le reste aspirants ou frères.
Notre oeuvre de la Première Communion des adultes va grandissant. 150 à 160 ouvriers ont le bonheur d'être préparés à la Première Communion; ce sont les pauvres chiffonniers, les pauvres enfants des fabriques abandonnés. Belle et aimable mission; c'est la mission royale des noces eucharistiques.
Les riches, les grands, et même les grands savants, laissent la sainte Eucharistie; les pauvres ignorants du siècle les remplacent. Ce qui me fait une peine mortelle, c'est de voir beaucoup de prêtres qui n'ont point de dévotion au Très Saint Sacrement, qui n'estiment que les oeuvres extérieures, ou la science. Hélas! aussi, que font-ils? Rien. - Echos arides, paroles mortes, ils ne savent presque plus parler de Notre-Seigneur. C'est désolant! déchirant!
Aussi, il faut river la chaîne de son coeur au pied de l'autel à présent.
Ah! chère soeur, prions, souffrons, immolons-nous devant l'adorable hostie; jamais plus de besoins, jamais plus de réparation. - Que font donc les chrétiens? les âmes pieuses? L'enfer est déchaîné, le règne du mal s'étend, l'incendie du vice impur gagne de proche en proche, les ténèbres de l'incrédulité s'épaississent et s'étendent; et nous dormons! et nous disons: Tout va bien! Hélas! hélas! Si l'on voyait ce que doit souffrir le coeur de Jésus, le coeur de Marie, la tristesse des Anges!
Je vous laisse, ma soeur, je vais adorer Notre-Seigneur et Dieu, pour vous et pour moi, en union avec vous et toutes les âmes qui l'aiment.
Votre silence n'est jamais blâmé, ni jugé; mais, bonne soeur, vous n'êtes pas encore en Paradis, d'où l'on n'écrit plus, ni crucifié. Soyez un peu plus économe de votre temps.
Tout à vous en N.-S.
EYMARD, S.
L. J. C.
Paris, 28 Février 1862.
Bien cher Père,
Il faut bien des épreuves à une si belle Oeuvre! J'avoue que celle de Michel m'a été bien sensible, j'avais fait le sacrifice de ce qu'il avait volé, mais les messes m'inquiétaient.
Enfin Notre-Seigneur nous a fait rendre de quoi payer le pain du mois; j'avais été trop content d'avoir de petites avances.
Nous avons reçu votre argent et l'avons appliqué selon vos intentions; merci des 25 fr. pour la maison, mais gardez votre petite Providence pour vous et vos besoins, qui deviennent grands avec la famille.
Pour ceux qui se présentent, voyez s'ils viennent de Dieu, attirés vers et par Notre-Seigneur; il faut recevoir en frère ceux que Dieu a choisis et qui correspondent à sa grâce, et viennent avec l'honorabilité de la vertu et de l'état présent, avec la bonne volonté.
Vingt-cinq ans est un bel âge, il me plaît. Dieu fortifie le vicaire. Hélas! qu'il y a peu de prêtres qui ont le courage de tout briser, arrêtés par mille petits riens!
Pour le déjeuner de vos novices, agissez comme vous le croirez le mieux; il peut se trouver des estomacs fatigués à qui cela ne suffirait pas, comme nous en avons ici. Je crois que le plus sage, pour moi, est de laisser cela à la prudence des supérieurs. Je trouve cependant que la pensée est très bonne, et j'en tirerai profit.
Londres est encore en missives, le lord n'est pas trouvé, le P. Bernin de Londres aime cette pensée, il va tenter d'autres moyens, la chose est sur le métier, le P. Champion est plein de zèle: prions. Mais, adieu la soutane au dehors, l'Autorité ecclésiastique l'a défendue pour des raisons graves de prudence. Tout le monde se conforme à cette décision du Concile provincial, on porte seulement le collet blanc et un demi-costume ecclésiastique; tout le monde qui connaît Londres parle ainsi: donc, si vous allez à Londres, vous serez tenu à la clôture.
Rien de nouveau dans la maison. - Le Maître divin vit et règne.
Adieu, mille amitiés à tous.
Tout vôtre en Notre-Seigneur.
EYMARD.
Paris 6 mars 1862
Bonne Mère et Soeur en N.S.,
Enfin me voilà à vous! et comment cela est-il arrivé ? je n'en sais rien, mais assurément mon silence n'a pas été muet devant N.S., et votre pensée et votre sacrifice me sont toujours devant les yeux, c'est ce qui me fait dire que c'est bon et très bon devant Dieu. (Il s'agit de la prochaine entrée en religion de Mme Chanuet) Ce que vous éprouvez est ce qu'éprouvent tous ceux qui ne cherchent et ne veulent que Dieu, sa sainte volonté est assez attirante, mais pas assez claire pour ne laisser que la paix et la confiance; en certains moments de grâce, tout est radieux, beau, entraînant, puis à cela succède la peine, l'anxiété et même le trouble; on craint, on a peur, tout s'insurge, c'est le jardin des Olives du sacrifice.
Oh! que j'ai souffert de cet état; non trop du doute de ma vocation, mais de mon indignité, de ma présomption. Je demandais comme une grâce la mort subite plutôt que d'aller contre la volonté de Dieu. Dieu soutient en cet état de guerre, on sent en son intérieur une force puissante au dessus de l'ordinaire. Puis dans un moment de grâce, on oublie tout ce que l'on a souffert, on aime, on désire les sacrifices, on accepte tout, on veut tout comme Dieu le veut et parce qu'il le veut.
Seulement il ne faut pas ouvrir la porte au doute pratique, à l'indifférence des deux vies, il faut incliner son coeur vers ce qu'il y a de plus parfait, de plus glorieux pour N.S.
L'indifférence serait une infidélité commencée. Dieu garde!
Quand donc, bonne mère, la vue de vos enfants à laisser vous arrive avec toutes ses émotions, faites-en un bouquet de fleurs, regardez Abraham, la T.Ste Vierge, Notre Seigneur.
Quand les difficultés ne viennent que de vous, du sacrifice de votre liberté, de vos aises, de votre personne, Alleluia (malgré le Carême), c'est la victime d'agréable odeur, le vrai Isaac; plus il y en a, plus le triomphe est grand.
Oh! désirez venir bientôt! Venez donc à l'ombre de ce divin palmier, qui nourrit et revêt l'âme solitaire et ombragée à ses pieds: il n'y a que des vocations de passage, hors de la grande vocation de Notre-Seigneur.
Au moins soyez toujours ici, avec le coeur, l'esprit, la vie; alors vous serez en mission seulement chez vous, ce sera votre office du moment.
Adieu, Bonne Mère, maintenant que la porte est ouverte, je serai plus expéditif et sage.
Tout vôtre en N.S.
Eymard
Madame Vve Chanuet
18 rue Ste Hélène, Lyon.
A Madame Blanc de Saint-Bonnet, née Chanuet.
(Paris) 10 mars 1862
Madame et chère Soeur en N.S.
Je joins un petit mot à la lettre de votre cher frère, afin de dire d'être toujours à la disposition d'amour de N.S., d'être toute sien, comme sa chose, son bien, afin qu'il fasse de vous ce qu'il voudra et vous mette à tout ce qui lui fera plaisir.
Voyez bien N.S. en toutes choses, mais N.S. dans sa bonté, dans sa divine et aimable Providence de salut, disposant toutes choses pour notre plus grand bien.
Communiez toujours avec l'obéissance d'un enfant, la simplicité de l'amour et l'action de grâces du pauvre. Il faut que votre vie naturelle et surnaturelle vous vienne de par la Ste Eucharistie. Allez-y toujours dans le désir du bon Sauveur qui vous appelle, vous attend et vous aime.
Vous n'avez rien, mais vous avez besoin de Jésus; vous n'avez ni vertus ni mérites à offrir, mais vous avez votre coeur, et la grâce que Dieu vous donne.
Je remercie bien le bon Dieu de vous voir un peu mieux, et surtout bien conformé(e) à la Ste Volonté de Dieu; c'est tout ce que vous pouvez faire de mieux.
Mes affectueux (respectueux) (respects) à Monsieur, à la maman et toute sa famille, à Melle Zénaïde et à tous vos enfants.
Je vous bénis. Tout à vous en N.S.
Eymard Sup.
Paris, 10 mars 1862.
MADAME ET CHERE SOEUR EN N.-S.,
Continuez votre collation comme vous la faites; la faim n'est pas la preuve du bon jeûne, mais la volonté et la loi extérieure accomplie.
Je vois par votre lettre que vous commencez par les autres, puis vous: c'est un progrès en charité; mais ce cauchemar de voyage à Lyon n'est donc pas encore un passé? C'est expérience acquise qu'il faut me voler et me lier; une fois dans la rue, je ne suis plus à moi, ni à personne.
J'ai vu vos bonnes nièces, trois types avec leurs bonnes qualités.
Je leur ai donné tout le temps libre que j'avais; aussi vous devez être contente de moi, parce que je vous ai obéi.
Quant à mes décisions, elles vous le diront: Dieu, la grâce, le temps sont les trois grandes puissances du chrétien; celui qui ne veut que Dieu et sa volonté du moment est toujours en paix et en ferveur.
Merci à votre chère Mathilde de sa petite lettre; je pense que la maman lira la mienne et l'expliquera, s'il en est besoin, et aussi y prendra quelques bons désirs.
Merci à votre bonne amie du 4e qui vous est si affectionnément dévouée. J'ai reçu sa lettre ce matin; j'en suis content comme toujours. Je partage sa pensée, mais j'espère mieux.
Adieu donc, bonne et vieille fille en Notre-Seigneur. Vous savez bien que vous avez des droits que nulle autre n'a, aussi je compte bien que vous m'obtiendrez de Dieu une de ces grâces qui font les saints.
Tout à vous en N.-S.
EYMARD.
Jésus-Hostie
Paris 12 mars 1862
Bonne Dame,
Je n'ai aucun projet pour cette semaine ni pour l'autre, ainsi vous pouvez venir.
Le mercredi je sors l'après-midi jusqu'à 4 heures, mais pas toujours.
Je suis heureux de ce que vous m'annoncez de votre bonne et excellente fille, heureux si je puis lui faire du bien, ainsi qu'à vous, excellente Dame à qui je suis, en N.S., Tout vôtre.
Eymard Sup.
L.J.C.
Paris 14 mars 1862
Bonne Mère et chère Soeur en N.S.,
J'approuve bien votre plan d'aller passer quelques jours à Lantignié, puis vous viendrez prendre possession ici de votre prie-Dieu, et ensuite pourrez retourner pour votre déménagement, etc.
J'aime le calme et l'ordre dans votre détermination; votre départ doit être digne, aimable et saint, il le sera.
Pensez, bonne fille, que c'est à la cour divine que vous venez, que c'est au milieu des Anges que vous vivrez, que Jésus va remplacer Père, Epoux, enfants, le ciel et la terre, et par conséquent que tout est honneur et gain, amour et bonheur.
J'aime à vous présenter tous les jours au Bon Maître, à vous bénir, donc Tout à vous en N.S.
Eymard Sup.
Madame Vve Chanuet
18 rue Ste Hélène
Lyon
Paris 14 mars 1862
Bien chers amis,
Comment commencer ma lettre ? Si vous n'étiez pas si loin, j'irais vous le dire avec un gros acte de contrition, car je suis ici depuis un mois et j'ai encore devant moi un monceau de lettres; mais je viens vers vous avec cette tendre amitié en N.S. que vous m'avez inspirée et que deux baptêmes ont resserrée, vous êtes bien ma famille, je vous affectionne ainsi et je vous offre tous les jours sous ce titre à notre bon Maître.
Oh oui! je prie bien pour vous tous les jours, mes voeux, vous les savez, ils sont toujours les mêmes: aimons bien Notre-Seigneur Jésus-Christ, aimons-le royalement en son aimable Sacrement, servons-le avec joie et bonheur, comme les Anges et les Saints au Ciel. Soyons toujours contents du bon Dieu, de sa sainte et toujours adorable volonté. Trouvons tout bon, tout bien ce qui nous vient de sa main paternelle. Abandonnons-lui avec amour le soin de l'avenir, le pardon du passé et marchons sous le beau soleil de sa grâce.
Oh! qu'ils sont malheureux, ceux qui ne connaissent pas Jésus, ce bon Sauveur, qu'ils sont ingrats, ceux qui le méprisent! qu'ils sont coupables, ceux qui le renient! et il y en a tant aujourd'hui qui regardent les hommes, un maître, pour savoir s'ils doivent croire en J.S., le servir et l'honorer.
Oh! que nous aurions d'apostats lâches et mercenaires, s'il y avait un choix à faire entre une position et la foi, un protecteur et J.C., Luther ou le Pape!
Prions, bons amis, voyez comme le bon Maître sait faire les affaires de son Eglise tout seul ! comme il démasque ses ennemis! comme ils sont vaincus, parce qu'ils sont les ennemis de Dieu, de l'Eglise et de toute société honnête.
J'ai bonne confiance en la miséricorde divine et en la protection de l'Immaculée Vierge Marie.
Vous êtes en action de grâces perpétuelle, chers amis, restez-y toujours, que Dieu vous en donne mille fois de plus le sujet d'amour!
Je bénis Père, mère et chers enfants. J'embrasse toute la famille, surtout ma bonne petite
Madeleine, et cette charmante Catherine.
Merci de vos portraits, ils m'ont fait le plus grand plaisir, je vous laisse tous devant moi, et vous mets sous le T.S.Sacrement à partir de dimanche 16 jusqu'à la fin du mois, il n'y a pas de plus belle place sur terre, c'est bien là que vous serez tous bénis!
Assurément ce sera une fête pour moi d'aller à Tours, quand le Bon Dieu le voudra, j'y ai de si bons amis en N.S. Il y a si longtemps que je n'ai pas vu le bon Père Dupont! j'en ai faim; dites-lui ce bonjour du Bon Dieu qui sera un jour éternel.
Adieu, chers amis, mes sympathiques souvenirs à tous vos amis qui sont les miens.
Tout vôtre en N.S.
Eymard Sup.
L. J. C.
Paris, 22 Mars 1862.
Bien cher Père,
Je n'ai pas besoin de vous dire ma peine à la lecture de votre lettre. Je comprends bien votre peine personnelle, je vois bien que votre intention ne porte que sur votre amour de la Société et la crainte de lui nuire.
Sans entrer dans l'examen de vos raisons, je viens vous prier de continuer jusqu'à temps votre charge; je ne suis pas prêt pour nommer un autre Supérieur; vous, vous avez la première grâce, un autre a besoin d'instructions.
Je connais tout ce que vous pouvez faire et ne pas faire, cher Père, je m'en charge; votre conscience doit avoir la consolation d'avoir bien dit votre état, et vous en reposer sur la grâce de Dieu et la sainte obéissance.
Je suis convaincu qu'un changement en ce moment serait plus nuisible qu'utile. Allons, bon Père, j'ai assez de croix, épargnez-moi encore celle-là. Je vous prie au nom de Notre-Seigneur, portez encore un peu votre croix, il n'y a pas d'honneur aujourd'hui à être supérieur, il n'y a que du sacrifice: le temps n'est pas encore venu.
Allons, bon Père, regardez cela comme une tentation. Je vous bénis in osculo sacrae dilectionis.
Tout vôtre en Notre-Seigneur.
EYMARD S. S. S.
Paris 30 mars 1862
L.J.C.
Mademoiselle,
Je viens vite vous remercier de votre bon souvenir; j'ai lu votre lettre avec l'intérêt tout particulier d'une âme que Dieu vous confie, d'une famille que l'on aime. Et d'abord oui, nous prions et prierons toujours pour vous et pour tous les vôtres, c'est un contrat spirituel et perpétuel devant Dieu;
Non! Non! Notre-Seigneur ne vous abandonnera pas, il ne vous laissera pas ...votre place sera toujours gardée, vous avez celle d'amour en son coeur divin. Vous êtes toute à ce Bon Maître, à tous pour lui, en tous en lui.
Cette sensibilité n'est pas un mal, cependant elle peut aller trop loin; quand elle va jusqu'au trouble, à la tristesse permanente, il faut l'arrêter, la combattre même par votre soumission filiale à la Ste Volonté de Dieu.
Le Bon Dieu ne défend pas d'aimer tendrement les siens, au contraire, il le veut. Tâchez de diriger finalement toutes ces affections vers N.S., le royal amour de votre coeur.
Je comprends que les peines de votre famille vous soient plus sensibles que les vôtres, c'est toujours là le sceau et la preuve de la bonne amitié, et ici encore rapportez à Dieu toutes ces croix, afin qu'il les ôte ou les bénisse.
Je vous enverrai plus tard mes méditations, j'ai besoin de les revoir et de les compléter, seulement ne craignez pas de me les redemander. Je suis un bon débiteur, mais un peu négligent et oublieux.
Je voudrais bien que votre cher frère vendît sa campagne, mais bien et bientôt, ce serait un repos pour lui; je vous promets une neuvaine à cet effet, qui commencera mercredi en l'honneur de S.Joseph.
Je comprends votre peine et votre joie au sujet de la résolution de Mme Ch(anuet), j'en suis moi-même étonné. Je ne pensais pas à cette vocation de si tôt, mais Dieu y pensait, il voulait ce grand coeur, cette âme si ardente au bien; vous ne la perdrez pas, elle sera toujours bonne mère, bonne grand-mère, bonne amie; elle ira revoir ses enfants, quand il sera utile.
Je suis convaincu que sa généreuse détermination tournera à bien pour toutes ses familles; elle a été à tous, elle le sera toujours, mais d'une autre manière.
Nous vous gardons, bonne fille, votre place ici, mais votre mission n'est pas finie encore; restez là-bas, et soyez toujours toute à N.S. dans le don du coeur, dans l'abnégation habituelle de votre volonté.
âme si elle entrait un peu plus en l'intérieur de Jésus ».
Voilà ma commission faite, maintenant. Je me recommande à vos bons souvenirs devant Dieu. Croyez-moi toujours en N.S.
Tout à vous.
Eymard.
/nur in der Rom-Ausgabe:
Nota: Cette lettre se trouvait dans les 27 lettres originales remises en juin 1953 par l'Archeveché de Lyon. On ne savait pas à qui elle était adressée, on avait pensé à Melle de Couchies (S. Philomène); mais le contexte concorde tellement avec les 2 lettres à Melle Blanc de S. Bonnet du 12 déc. 1861 et du 19 juin (Fête-Dieu 1862), qu'il n'y a plus d'hésitation possible./