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Nr.0961

An Fräul. Bourges

Tout pour Jésus-Hostie.

Paris, 11 Juillet 1860.

Bonnes demoiselles,

J'ai pris et prends bien part à la croix qui pèse sur vous. Hélas! faut-il que la joie soit si vite finie en ce monde: joie bien sainte, puisqu'elle est sur une si bonne mère! Cette cruelle maladie fait bien souffrir; aussi faut-il compatir à tant de souffrances comme votre coeur et votre piété savent le faire! Dieu vous veut toujours sur la croix, bonnes demoiselles; il paraît qu'il se trouve bien chez vous, et que, l'aimant par-dessus tout, il vient se reposer un peu chez vous, en allant au Calvaire et de là au Ciel.

Ayez la bonté d'exprimer à votre bonne mère, de ma part, toute l'affection que nous prenons ici pour son état de souffrances; nous sommes tous en prière pour la soulager et la guérir. Je serai si heureux de la revoir, cette bonne mère, à Marseille, quand Dieu me fera la grâce et la joie de m'y envoyer, ce que je ne sais pas encore, car ici, nous sommes très occupés par nos premières Communions d'adultes, qui sont très nombreuses.

Vous voilà tous réunis en famille; il n'en manque plus qu'un: celui qui était le centre et la gloire. Mais il est au Ciel; sa couronne était finie, ce bon frère! - Voici les vacances, vous devez être, bonnes demoiselles, comme le soldat à la fin du combat, tombant de fatigue. Allons! vous allez un peu vous reposer, car il y a encore du chemin à faire.- J'ai vu à Paris l'excellent Mr Seigneret, j'en ai été bien heureux. Mais à Paris, on se manque, on se court après. J'espère, à Marseille, lui rendre sa bonne visite.

Croyez-moi en N.-S.,

Bien chères demoiselles,

Tout votre

Eymard, Sup.

P.S. Mes bonjours de vive et vielle affection à votre cher frère.

Mlle Bourges,

Mese de pensionnat, rue Curiol, 29

Marseille


Nr.0962

An P. de Cuers

Paris, 18 Juillet 1860.

Bien cher Père,

Comme votre dernière lettre était empreinte de tristesse à notre sujet, je vais vous dire que la paix et la charité sont dans la maison, depuis que j'ai renvoyé ce nouveau frère cuisinier. Il n'y a rien eu depuis, qui ait pu offenser la charité.

J'ignore ce que vous ont dit ces Dames, le P. Clavel et le frère Martin: chacun peut parler dans son sens, ou sous une impression. Je vous connais trop frère et trop religieux pour condamner le supérieur que des accusations et sans lui.

Comme aussi, ne croyez pas que tout ce malaise ne vienne que du frère Michel; non, non, le diable d'abord, puis chacun un peu, et tous coupables.

Quelque habile que soit un marin, la tempête vient malgré lui et l'emporte avec sa voile et ses machines. Ainsi, le temps vient d'en haut; notre faute, c'est de n'être pas prêt à résister à la tempête.

Vous vous plaignez de ce que je ne vous donne pas de nouvelles de la maison. Toutes les fois qu'il y a quelque chose d'important ou d'intéressant, je me fais un plaisir de vous l'écrire; mais des on-dit, des petites misères, des nuages qui passent sur le soleil, on n'y pense pas.

Je suis peiné de voir que vous croyez que notre maison de Paris ne va pas. Dans ce cas, ce n'est pas à moi de dire qu'elle va bien; tout ce que je puis dire, c'est qu'il y a bonne volonté.

Il paraît que le P. Clavel se trouve bien; que Dieu en soit béni! J'espère qu'il nous enverra son remplaçant.

Nous avons demain l'installation du nouveau curé de St Jacques, Mr Hiron; on regrette bien l'ancien, devenu curé de St Thomas d'Aquin.

Nous aurons quarante Enfants pour la première Communion de l'Assomption; ils paraissent disposés.

Point de nouvelles pour le T. S. Sacrement. Ces jours ici, vous recevrez la visite de Mr Nègre, diacre.

Croyez-moi en N. S., bien cher Père,

Tout à vous.

EYMARD, S. S.

Au R. P. de Cuers,

Supérieur des religieux du T. S. Sacrement,

7 rue Nau.

Marseille.


Nr.0963

An Fräul. Giguet

Tout pour l'amour et la gloire de Jésus-Hostie

Paris 18 juillet 1860

Mademoiselle et chère Soeur en N.S.

Vous voilà donc française, tant mieux! Je suis tout content de voir la pieuse Savoie redevenue française!

Vous me disiez, dans votre dernière lettre, que vous étiez triste et découragée, que le noir s'emparait de vous, que vous étiez effrayée de vos communions.

Je comprends bonne fille, que la pauvre nature soit triste et découragée quelquefois, vous avez tant souffert! et souffrez encore; mais ne regardez pas trop votre croix, ni les champs de bataille où vous avez été attaquée, regardez le ciel, J.C., sa grâce, sa miséricorde infinie envers vous, sa charité qui vous porte. Et ainsi vous serez plus sage.

Je sais bien que vous n'avez jamais aimé le monde, ce n'est pas à présent que vous allez commencer.

Ne vous troublez plus de votre passé, tout est pardonné il y a bien longtemps; ne vous inquiétez pas de l'avenir, Dieu vous y attend avec son amour de Père et de Sauveur.

Allons! traînez-vous avec vos béquilles comme le Bon Dieu le veut et soyez joyeuse de porter votre croix pour l'amour de Dieu.

Adieu, bonne fille, si j'allais près d'Yonne, oui, j'irais vous voir et vous bénir.

Tout à vous en N.S.

Eymard.


Nr.0964

An Elisab. Mayet

Paris 19 juillet 1860

Tout pour l'amour et la gloire de Jésus-Hostie

Bonne fille en N.S.,

Je suis toujours en retard avec mes amis; je les sais si bons et si indulgents, que je finis par en avoir un grand regret. -

Merci de votre lettre et de l'heureuse nouvelle qu'elle m'apprenait de l'ordination de ce bon et pieux neveu. Comme il a dû bien dire cette 1ère Messe! Comme la Ste Trinité a dû recevoir avec complaisance les deux sacrifices, celui de J.C. et celui de son nouveau Prêtre! Comme son saint Père a dû être heureux du haut du ciel de voir ce cher et bien-aimé fils, devenu J.C. en action - J.C. en sainteté !!!

Je jouis encore du bonheur de tous: de sa bonne et pieuse mère qui, ce jour-là, ne devait plus avoir aucune douleur, ni aucune tristesse, puisque le Ciel et la terre étaient là - autour de l'autel, oh! heureuse mère ! d'avoir un tel fils, qui sera la bénédiction de J.C. dans la famille !

Comme elle devait être heureuse, cette bonne Marie! en voyant son frère si près de J.C., si J.C.....Marie et Moïse, Marie et J.C.. Elle a dû pleurer de joie et de reconnaissance d'être si grande en son bien-aimé frère.

Et ce bon Joannès devait être là - avec sa foi de jeune homme et son coeur de Frère - à lui d'autres combats, une autre gloire - mais, fût-il Roi - il sera toujours frère d'un si bon frère.

Et ce bon et aimable Tonny. Il a bien souffert, s'il n'a pu comme le premier chef de la famille, se trouver là à sa place de père. Il devait y être, son coeur ne connaît pas d'obstacles.

Et vous, bonne fille, que faisiez-vous à Belley ? Vous pleuriez, vous priiez, vous aimiez, vous étiez le peintre de la Cène et l'amie de tous.

Est-ce donc que le bon Père Mayet ne serait pas venu à Belley ? Je lui en voudrais, s'il a fait cela pour le mieux. J'espérais un peu qu'il serait passé par Paris et que j'aurais eu le bonheur de le voir.

Oui, c'est un bien que Claudius finisse par comprendre que la bonté a un terme, ou plutôt qu'il faut cependant devenir un homme et un homme parfait; il a tout ce qu'il faut pour le bien et le mal. Pauvre enfant!

Adieu, bonne Demoiselle et chère fille, centre de la famille, soyez toujours la joie et le bonheur.

Je vous reste bien religieusement uni en N.S. Mes amitiés à tous, mais à Père Mayet de coeur et d'âme.

Eymard.

P.S. Tout va à l'ordinaire ici. Melle Guillot aussi. La petite famille augmente, elles vont être 9. Elles aiment bien Notre Seigneur et il doit les aimer.


Nr.0965

An Fräul. Prouvier, Gründerin der Jungfrauen Jesu und Mariens

Tout pour l'amour et la gloire de Jésus-Hostie.

Paris, 19 Juillet 1860.

Mademoiselle et chère soeur en N.-S.,

Voilà déjà 19 jours de date, et je ne vous ai pas encore répondu! Vous voyez ce qu'il faut attendre des hommes. Et cependant, j'ai été si content d'apprendre que vous aviez eu l'exposition du saint Ciboire, c'est-à-dire du Dieu voilé! Que vous êtes heureuses d'avoir été les premières dans ce divin service! d'avoir reçu si tôt la faveur du Pain de vie! Aussi, gardez-le bien, pour que des coeurs plus purs et plus fervents ne vous supplantent pas! Le service du Roi doit être en tout royal, beau, magnifique, souverain; tout lui est soumis, tout lui est d-.

Soyez persuadée que c'est là, pour vous et pour vos filles, le trésor caché, la grâce de la vie, la mission de l'amour; le reste n'en sera qu'une forme, qu'un rayon.

Dirigez du côté du corps eucharistique tous les mouvements des ailes des aiglons. Je dis aiglons, vous n'êtes pas encore des aigles; cela viendra sous l'action divine de l'amour.

Vous me dites, bonne soeur, que vous êtes retombée sur vous-même; mais alors vous avez d- vous faire mal, car on se fait mal en tombant sur une pierre acérée.

Il faut vite vous relever et marcher la tête en haut et le coeur encore plus haut; la tête tourne quand on regarde un abîme ou un courant rapide.

Il faut manger pour avoir des forces; mais manger le Pain des forts, et non ces débilitants qui vous fatiguent. Quand donc Dieu sera-t-il notre force et notre soutien? Allons! souvenez-vous bien que vous êtes aveugle, et qu'il vous faut une main divine pour guide; sourde, et qu'il vous faut prêter l'oreille à l'inspiration de la grâce et de l'amour paralytique; et qu'il vous faut le commandement de Jésus pour marcher; mais, par-dessus tout, n'oubliez pas que vous êtes l'épouse du Coeur eucharistique et que votre dot est la pureté du coeur, ainsi que votre ornement. Soyez donc bien belle de pureté, bien limpide dans vos intentions, bien désintéressée dans vos actions, bien dégagée dans vos affections. Soyez libre dans la vie d'amour, comme l'amour est libre et heureux dans son centre d'action. Plus de toiles d'araignées, plus de ces fièvres d'amour-propre, plus de ces mendicités stériles vers ceux qui n'ont rien à donner. Vous avez le Coeur noble de Jésus, cela suffit; laissez souffler les tempêtes stériles.

Adieu, bonne soeur, soyez du feu, - d'abord sous la cendre, concentré en lui-même, pour ramasser sa force d'explosion.

Je vous bénis dans toute l'affection de la charité de notre bon Maître, en qui je suis

Tout à vous.

EYMARD, Sup.

P.-S. - Le Coeur eucharistique de Jésus a eu sa belle part à Rouen et à Tours. J'ai fait un sermon spécial à Tours. C'est la semence.

Mademoiselle Prouvier, à Lons-le-Saunier (Jura).


Nr.0966

An Fräul. Danion

Tout pour l'amour et la gloire de Jésus-Hostie.

Paris, 19 Juillet 1860

BIEN CHERE SOEUR EN N.-S.,

Qu'il y a longtemps qu'un grand silence règne à Mauron! Vous êtes donc toujours sur le champ de bataille? toujours à mille demandes? Allons! pas tant d'oubli pour les anciens.

J'aurai d- vous accuser réception de votre dernière lettre. Je le fais, ainsi que de tout ce qu'elle contenait. Merci.

Vous êtes donc dans le travail du Calvaire. Oui, il le faut; il faut ce sang divin mêlé à notre sang pour féconder une oeuvre de Dieu, et surtout l'oeuvre eucharistique.

Les oeuvres du Très Saint Sacrement ne commencent pas comme les autres; c'est juste, elles méritent l'honneur du premier poste auprès du bon Maître puisque c'est lui qui est l'oeuvre même.

Aussi, comme elles grandissent là où les autres oeuvres s'épuisent! comme la grâce triomphe de la nature, Jésus des hommes, et des hommes qui devraient être des aides!

A Jésus toute la gloire.

Ne vous laissez pas décourager ni abattre, bonne soeur; les tempêtes enflent la voile, purifient le temps.

Une oeuvre eucharistique se fonde sur la mort et vit de Dieu seul. Oh! que je le vois tous les jours! toutes les fois que l'homme veut mettre du sien, il fait souffrir l'oeuvre de Dieu.

Ayez confiance en votre grâce et poursuivez-la comme une mission d'amour qui vous coûtera l'immolation. L'obéissance à la volonté de Dieu connue est le premier acte d'amour et le dernier.

J'ai eu la consolation de parler de Jésus au Très Saint Sacrement à Rouen et à Tours; on est bien venu, on a écouté avec dévotion: ce sera une semence.

Jésus-Eucharistie n'est pas connu! même de ceux qui devraient le faire connaître! Oh! qu'il est peu aimé! même des siens! C'est à effrayer et à épouvanter. Comme la dévotion des personnes pieuses est mal éclairée, mal dirigée! On amuse ces pauvres personnes à de petits riens pieux, on les enlace dans une servitude de petites pratiques, on les rend scrupuleuses sur des grains de sable. Hélas! hélas! que c'est triste! Aussi je pense que la divine miséricorde affranchira ces esclaves par la grâce de l'Eucharistie.

Nous avons bien aussi, chère fille, nos petites croix; quelquefois c'est une tempête qui éclate de toutes parts et l'on ne sait plus où se mettre, puis Jésus reparaît dans son soleil de bonté et l'on est comme le naufragé sauvé.

Adieu, bonne soeur, nous sommes vôtres en la divine Eucharistie.

EYMARD, Sup.

Mlle Virginie Danion, à Mauron (Morbihan).


Nr.0967

An Sr. Antoinette (Frau Rottier)

19 Juillet 1860.

MADAME,

Bien volontiers je changerai l'heure de la conférence de ce soir, nous la mettrons à 4h.«»

Demain je dirai aussi la sainte Messe pour vous.

Vous dites vrai, c'est dans le Paradis que vous allez entrer: le Paradis est là où est Jésus Roi et Dieu.

Faites bien ce pas, de ce monde à Dieu.

Tout vôtre en N.-S.

EYMARD.


Nr.0968

An Mariette Guillot

Paris, 26 Juillet 1860.

CHERE FILLE EN N.-S.,

Sr Benoîte va vous voir, j'en suis content pour vous ......

Je suis heureux de vous savoir guérie; cela aura été une petite retraite: le Bon Dieu vous a montré qu'il fallait bien profiter des grâces en la santé ............................................................ ..........................................................................

............ (3 lignes effacées) ...................

Aussi, que cela vous console et vous fortifie dans toutes les épreuves...... Dieu content doit vous être tout votre bonheur.

Assurément, on a bien prié pour vous ici, et voilà pourquoi vous avez été si forte.

Oui, bonne fille, l'abandon filial à la sainte Volonté de Dieu, voilà votre couronne et votre perfection. N'en cherchez pas d'autre.

Laissez à Dieu le soin de votre vie et de votre avenir; n'ayez qu'un désir, qu'un plaisir: celui de le servir selon sa sainte Volonté.

Adieu, bonne fille.

Tout vôtre en N.-S.

EYMARD.

A Mademoiselle Mariette Guillot,

17, rue du Juge de Paix,

Fourvière, Lyon.


Nr.0969

An Fräul. Prouvier

Paris, 1er Août 1860.

Bonne fille en N.-S.,

Je viens vite répondre à votre lettre. J'espère que ce sera le bon Maître qui m'aura inspiré la réponse.

1· Soignez votre corps, ainsi que le veut le médecin.

2· Mais soignez encore plus votre âme, dans la douce et aimable union en Notre-Seigneur.

C'est une grâce de recueillement que Dieu vous ménage.

3· Prenez votre orgueilleuse Marie avec beaucoup de douceur et de patience, elle est trop malade pour supporter de violents remèdes. Ouvrez-lui les yeux par votre compatissante charité.

Et priez beaucoup pour elle, et aussi pour nous vos petits frères en l'amour de N-S. J-C.

Tout à vous.

EYMARD.

Mademoiselle Prouvier,

à Lons-le-Saulnier (Jura)


Nr.0970

An P. de Cuers

Paris, 9 Août 1860.

Bien cher Père

J'ai reçu tout l'argent que vous m'avez annoncé et envoyé par Melle Marie. J'en ai fait la répartition indiquée. Je vous envoie les factures.

A la chancellerie de la Légion d'honneur, on a répondu que ce ne serait qu'au mois de Juillet 1861 qu'on vous donnerait avis, si vous pouvez retirer le traitement à Marseille, et tous les six mois.

J'ai donné la retraite la semaine passée à ces Dames du 66. Une aspirante de Toulon, Mlle Vital (à l'incognito de Toulon), y est venue pour examiner sa vocation, elle est repartie il y a trois jours, elle paraît s'y décider; elle est libre maintenant. Cette Delle de Marseille se met avec courage à sa nouvelle vie; elle aura des sacrifices à faire; elle est un peu souffrante en ce moment, d'un chaud et froid; il paraît qu'il faisait bien chaud à Marseille, et ici on a presque froid, et toujours la pluie.

Nos petits théologiens vont passer leur second examen de théologie; le frère Carrié commence à s'y mettre, il a bien souffert au commencement, ne comprenant pas assez bien son auteur classique.

Nous aurons une belle première Communion, trente-sept jeunes adultes dont plusieurs ont 17, 18, 19 ans, et deux filles. Je désire que ces Dames commencent aussi l'oeuvre des premières Communions des filles. Elles vont en avoir après l'Assomption.

Un théologien se présente; c'est celui de Gien qui était avec Mr Golliet, et qui, n'ayant pas son Dimissoire, avait été ajourné; il m'écrit que son Evêque ne lui a pas refusé. Je lui ai répondu qu'avant tout il fallait se voir et faire une retraite d'examen. Je n'ai pas encore reçu sa réponse, il a déjà fait un an ou deux de théologie.

Rien de nouveau pour la question de l'expropriation.

C'est une bonne nouvelle que celle que vous m'annoncez de l'espérance que Mr Olive fera cette bonne oeuvre de payer le mémoire dû; il le peut, et c'est un beau prêt à Notre-Seigneur.

Croyez bien, cher Père, que mon affection pour vous est la même.

J'espère bien aimer la divine Eucharistie; or comment n'aimerais-je pas son premier chevalier, l'adorateur avant la première heure, un compagnon d'armes!

En vous écrivant la dernière fois, ma plume a donc bien mal rendu ma pensée; je ne voulais que vous prémunir contre les impressions fausses ou exagérées, que les personnes ou les circonstances pourraient faire naître; je suis plus fâché de votre peine que de la mienne, car je sais bien que vous ne voulez que le bien et le plus grand bien de l'Oeuvre, et le mien. De vive voix, je vous expliquerai la chose.

Je souffre de n'avoir personne à vous envoyer, au moins pour un mois, pour vous donner le temps de venir à Paris; si j'avais un peu d'argent, je proposerais au P. Champion ou au P. Bissey d'aller passer quelques semaines à Marseille, quoique cela peut-être nous gênerait bien ici et pourrait faire parler du petit nombre; mais tout cela ne serait rien. J'ai retiré le 7 Août vos intérêts, 50 fr., de chez Mr Marzioux; on espère réussir dans le transatlantique, l'expérience du Gazomoteur inventé par un ami de Mr Marzioux a bien réussi. J'ai remis les 50 fr. au frère Carrié.

Je n'ai que la place et le temps d'être en N.-S.

Tout vôtre.

EYMARD.

S. S. S.

P. S. - Vous n'aviez mis que 320 fr. au lieu de 330 pour vos ornements, nous avons compté avec le frère Carrié quatre fois.


Nr.0971

An Fräul. Danion

Paris, 17 Août 1860

CHERE FILLE EN N.-S.,

Vous allez recevoir vos croix. Votre livre du saint Abandon est introuvable. Je vais harceler pour qu'on le réimprime. Merci de votre bon souvenir devant Dieu. Renouvelez-le souvent: j'en ai besoin.

Tâchez de devenir pierre, marbre et diamant sous les coups du marteau; tout cela est triste. Il devrait demander son changement, on devrait le demander pour lui: ce serait une grâce. Le voilà, la tête à moitié perdue, incapable d'entendre raison; très fort à semer le feu, encore plus à vous disputer.

Je vous permets de vous fâcher, mais jusqu'à la colère, quand il vient chez vous: c'est de l'imbécillité de vouloir raisonner la folie: c'est une charité stupide.

Je vous en prie, plus de ces faiblesses de patience, d'humilité et de souffrance: c'est à ne plus en finir! Mieux vaut briser entièrement: votre réputation est à Dieu, votre liberté à vous. - Bien faire et laisser dire; ne vouloir même pas qu'on vous en parle; enterrez ce nom-là à cinquante pieds sous terre, puis vous serez libre et sage. Aimez bien le Bon Dieu, et que vous importe le reste?

Servez bien Notre-Seigneur, et que vous fera le moucheron de la vallée?

Soyez heureuse, assise, paisible, fixée aux pieds du bon Maître, et laissez crier les petites Marthe.

Je vous bénis bien en N.-S.

EYMARD, S.


Nr.0972

An Fräul. Stéphanie Gourd

Paris, 19 Août 1860.

Vous voilà guérie, bonne fille! Que Dieu en soit remercié et béni! car c'était une grande affliction pour nous de vous sentir si malade.

C'était une maladie de la gloire de Dieu comme celle de Lazare. Oh! aller déjà au Ciel si jeune! C'est trop tôt et puis votre mission eucharistique n'est pas encore faite.

Ainsi Dieu a exaucé nos prières, qu'il en soit béni! Une maladie vaut une bonne retraite! Vous voilà donc toute purifiée, toute à Dieu.

J'ai bien souffert d'apprendre la conduite de cette S. Oh! oui, dites-le à sa Supérieure; c'est une charité, car on dénonce celui qui a la peste. Cependant, que la Supérieure soit discrète pour ne pas révéler votre nom, c'est inutile; et même, si vous aviez cette crainte fondée, imposez-lui le secret, afin que vous puissiez en conserver le silence.

C'est le bon Maître qui vous a guérie! Alors il a ses desseins, c'est que vous soyez toute à sa gloire. Eh bien, oui!

Vous voyez ce que sont et font les hommes! Hélas! pauvre humanité! mais Dieu est le meilleur médecin.

On dit qu'il n'y a pas de pire médecin qu'un ami de famille.

Refaites-vous bien aux eaux et suivez-y le traitement exigé sans scrupule.

Soyez à Dieu par le coeur, mais non par la tête.

Adieu, bonne fille, je vous bénis de toute mon âme.

Tout à vous en N.-S.

EYMARD.


Nr.0973

An den Architekten Perret

Paris 20 août 1860

Bien cher Monsieur Perret,

Nous partageons bien tous la peine et la douleur de votre coeur en ce moment. Nous le faisons surtout par la prière, demandant à N.S. pour vous force et résignation et pour votre bien-aimé frère cet amour de Dieu qui couronne une si pieuse vie et un zèle apostolique si caché et si constant.

Pauvre ami! hélas! que de croix cette année! assurément Dieu y trouve sa gloire et vous votre couronne. Voilà la vie de ce triste monde, une vie d'adieu ou de rendez-vous éternel aux pieds de Dieu.

Vous placez bien votre fortune, vous! puisque c'est la fortune des pauvres du bon Dieu. -

Aussi les voleurs ne vous la prendront pas.

Notre 1ère Communion le jour de l'Assomption a été ravissante, 37 adultes bien pieux et tous habillés à neuf formaient le petit bataillon de J.C. Parmi ces 37 il y en avait qui étaient des Anges.- J'ai été saisi jusqu'aux larmes en voyant ces pauvres enfants de rue abandonnés, ayant presque tous des parents sans religion et même hélas! moins que cela, prier avec tant de ferveur, s'approcher de la Ste Table avec une modestie saisissante. - Que ne peut pas la grâce de Dieu et la charité de J.C. ?

Voilà 107 jeunes qui depuis un an ont fait leur 1 ère Communion - voilà la semence de vos visites à la Fosse aux Lions! Il y avait aussi deux filles qui ont fait leur 1 ère Communion et qui étaient abandonnées.

Le soir après Vêpres Monseigneur de Charbonnel Capucin est venu les confirmer tous dans notre chapelle, de sorte que la fête a été complète.

Ce qui nous a bien consolés, c'est que pas un des communiants n'est allé à la fête civile, le feu d'artifice et ils sont restés tranquilles chez eux.

Cette fois-ci la retraite a été plus complète - nous les avons gardés pendant trois jours - et nous leur avons donné à déjeuner le matin, alors nous en étions plus maîtres.

Hier dimanche ils sont venus se faire recevoir du scapulaire. Que Jésus et Marie les gardent!

Rien de nouveau ici, c'est un peu comme au ciel, toujours le même service divin.

Tous les Pères et frères me chargent de vous exprimer leurs sympathiques sentiments et celui de leur affectueux dévouement et moi, cher Monsieur Perret, je vous reste bien uni en N.S.

Eymard.

PS. Veuillez faire agréer à votre cher frère tous mes vieux sentiments d'affection et d'union en N.S. Je prie sans cesse pour lui.


Nr.0974

An Frau Chanuet

Paris 23 août 1860

Madame et chère Soeur en N.S.

Merci! grand merci de votre dernière lettre, elle nous a initiés à la grande joie et au bonheur de (la) 1 ère réception, que Dieu en soit béni! C'est bien la joie du retour de Tobie! et vous serez l'heureuse mère! J'ai tant demandé à N.S. de vous donner une partie de notre Centuple, que j'espère me voir exaucé.

Laissez Madame Blanche vous rendre ses devoirs de fille, elle y gagne et vous aussi. C'est son devoir et son bonheur.

Le lendemain de votre lettre, j'ai vu ici l'excellente Dame (de) Couchies, elle a été heureuse de ce que je lui ai dit de sa chère Blanche, elle ira vers vous avec Melle Benjamine, quand on l'appellera, elle est tout heureuse d'aller vous voir, elle est libre, son frère est reparti pour Sens.

Vous allez avoir un peu plus de temps à vous, Bonne Mère, et il faut même savoir le prendre pour être plus à Dieu et à Jésus au T.S.Sacrement, il faut faire travailler les jeunes.

Le F.Michel se repose un peu; je leur ai donné 15 jours de cessation d'études; il en profite pour s'unir davantage à N.S., il a bien raison, car la vie est toute là; allez souvent, Bonne Mère, boire à cette fontaine d'eau vive, et cela, par le coeur et le don de la volonté...faites bien vos affaires avec N.S. et il fera les vôtres.

Adieu, bonne Mère, j'aime bien recevoir de vos nouvelles, ce sont des nouvelles de famille.

Tout vôtre en N.S.

Eymard Sup.

Madame Chanuet mère

chez M.Blanc de St.Bonnet

à St.Bonnet par Vaugneray

Rhône

P.S. La Ste Vierge dirait à son divin Fils: ils n'ont plus de vin. Ayez la bonté de faire de même, mais une condition: c'est que nous en solderons la valeur. Comme il est difficile ici de se procurer du vin naturel, j'ai pensé tout simplement à vous, quoiqu'avec réserve. Mais de grâce, si vous n'en aviez pas à vendre, regardez ma demande comme non faite; car autrement je serai timide une autre fois.


Nr.0975

An P. de Cuers

Paris, 3 Septembre 1860.

Bien cher Père,

Le P. Bissey partira de Paris dimanche 9 septembre, à 1 heure et 45 minutes après midi, et vous arrivera le lundi à 6h. 30 du soir. En vous envoyant ce cher confrère, je vous prouve que je vous aime plus que moi-même; car je pense que ce n'est pas pour un mois, mais à demeure fixe, puisque vous seriez trop seul.

Ce qui me fait grand plaisir, c'est que vous serez bientôt quatre prêtres; car le frère Martin approche.

Nous allons rester deux ici, mais j'espère que Dieu, qui nous a toujours assistés dans le besoin, nous enverra du secours quand il le jugera bon; en attendant, nous pouvons continuer son saint service, même la nuit.

Demain, nos petits théologiens qui ont eu quinze jours de repos, vont reprendre leur théologie; ils sont peu, mais pourvu qu'ils soient bons, cela suffit.

On nous a parlé d'un prêtre de Sens qui a la pensée de venir; j'attends sa demande, sera-t-il des élus? Je ne le sais pas.

Nous recevrons avec grand plaisir le bon P. Leroyer; si nous avions été plus nombreux ici, j'aurais préféré aller vous faire la retraite annuelle, et, pour clôturer, recevoir ses voeux; mais ce n'est pas possible: le service du Maître en souffrirait.

Adieu, bon Père, les épreuves sont semences de grâce; j'ai renvoyé le frère qui se présentait. Il savait à peine lire le latin. Le frère Martin est toujours un peu breton, mais a bon courage, je le désire un peu plus calme, et surtout très charitable envers ceux qu'il ne croit pas bons.

Je vous suis en N.-S., bien cher Père,

Tout uni.

EYMARD.

P. S. - Votre caisse est partie hier par la petite vitesse; nous avons grondé M. Carpentier, car ici aussi nous n'étions pas si contents.

Au R. P. de Cuers,

Supérieur des religieux du T. S. Sacrement,

7 rue Nau.

Marseille.


Nr.0976

An Herrn Josef-August Carrel

Paris, 6 Septembre 1860.

Cher ami et frère en N.-S.,

Quelle surprise ce matin! La divine Providence m'envoie par vous du pain pour ses enfants, des nouvelles d'un bon ami que j'attendais ici à son ordinaire, une bonne invitation de Béthanie.

Merci donc au nom de notre bon Maître. C'est bien chez vous que j'irai loger quand le bon Maître m'enverra dans quelques mois à Marseille. Vous êtes donc infirme, cher ami du Bon Dieu! Est-il possible que vous en soyez là, vous, demandé de tous côtés! Le bon Maître le veut, qu'il en soit béni! Mais je vais vite lui demander de vous guérir, et il vous guérira.

Remerciez pour moi la bonne Mère, puisque c'est par vous qu'elle m'a envoyé le don de Dieu.

Heureusement que notre Maître est riche et puissant, bon et aimant, il paiera tout cela largement en ce monde et en l'autre.

Tout va à l'ordinaire ici; le Maître est tout et nous rien.

Je vous embrasse toto corde et animo.

Tout vôtre en N.-S.

EYMARD, Sup.


Nr.0977

An Fräul. Bourges

Paris, 6 Septembre 1860.

Mesdemoiselles et chères soeurs en N.-S.,

J'ai bien pris part à la grande douleur que vous a causée la mort de votre bonne et chère mère. Hélas! elle est bien triste, cette vie qui vous fait faire de si pénibles adieux, et vous en avez déjà tant fait! Pauvres demoiselles, il ne faut pas cependant trop vous affliger, car vos parents sont de saints, et vous les retrouverez un jour au Ciel. Puis, c'est une dernière consolation d'avoir pu assister les siens à ce moment suprême, et d'avoir rempli autour d'eux le dernier devoir de l'amitié.

Elle était si bonne votre mère! elle aimait tant ses enfants! Dieu l'a purifiée en sa divine miséricorde dans sa dernière maladie, afin de la couronner plus tôt. Je prie toujours bien pour elle, pour votre bien-aimé frère (16) qui, j'espère, est au Ciel, et pour votre père, que Dieu a reçu dans sa miséricorde.

Je ne sais pas, bonnes demoiselles, quand j'irai à Marseille, mais vous aurez ma première visite.

Reposez-vous bien pendant ces vacances, vous devez en avoir bien besoin. Surtout, reposez-vous aux pieds de Notre-Seigneur.

Adieu, bien chères soeurs en N.-S.

Je vous bénis de tout mon coeur.

Tout à vous.

Eymard, Sup.

Melles Bourges,

Mese de pension,

29, rue Curiol,

Marseille.


Nr.0978

An Frau Chanuet

Paris 7 septembre 1860

Bonne Mère,

Je ne puis écrire à Mr.Amédée sans vous dire un petit bonjour de N.S.

La mère a dirigé la main des fils et voilà notre Bon Maître couronné demain de votre piété. Je vous en félicite, Bonne Mère, car il est bon et riche votre débiteur divin! merci du vin annoncé par votre fermier, c'est un compte ouvert chez vous, n'est-ce pas, Bonne Mère ?

Je vous reste bien uni en N.S.

Tout vôtre.

Eymard Sup.


Nr.0979

An Herrn Josef-August Carrel

Paris, 9 Septembre 1860.

Cher ami et frère en N.-S.,

Je n'ai pu m'empêcher de rire ce matin, à la réception d'une lettre de Mme de la Goutte expliquant l'envoi de 200 francs pour ses enfants en voyage. Je me suis cru riche de 200 francs de plus pendant quelques jours; belle illusion! Et maintenant, je me trouve riche de plus de la moitié, puisque c'est le Bon Dieu qui sera mon débiteur. Ainsi, bon ami, c'est une méprise de ma part. Ce qui n'empêche pas mon bonheur et ma joie d'être en N.-S.

Tout vôtre.

EYMARD.

P.-S. - Les 200 francs sont à la disposition de Mr Paul à son passage. Ayez la bonté de faire passer cette lettre à Mr Creuset, Tierçaire, je ne sais son numéro.

Monsieur Carrel,

Ft de blanc, 3, quai d'Orléans,

Lyon (Rhône).


Nr.0980

An den Architekten Perret

Paris 12 septembre 1860

Bien cher Monsieur Perret,

Nous avons tous été bien affligés et consolés en même temps de la douloureuse et édifiante nouvelle que vous nous donnez de l'état mourant de votre bon et saint frère - Oh oui! c'est un saint et d'une sainteté si aimable et si sévère pour lui, quelle délicatesse de conscience! quel dévouement à sa belle oeuvre de la Propagation de la Foi; combien d'actions de grâces ne lui doivent pas les PP. Maristes ! car c'est à son zèle, et à son affection qu'ils doivent de grands secours - ce bon Abbé!

C'était toujours pour moi une joie de le rencontrer et de lui dire un petit mot.

S'il en est encore temps, recommandez-moi à ses prières, ainsi que notre petite Société. Et ici nous prions tous pour lui.

Et vous, pauvre et cher ami, il faut que vous soyez la consolation de tous les vôtres, et que vous soyez à leur chevet de douleur et de mort. C'est la mission de votre piété - et nous tacherons de remplacer votre famille, et de vous donner ce que vous donnez si largement aux autres.

L'oeuvre de la 1ère Communion prie pour vous, je vous remercie bien de ce que vous lui avez envoyé. C'est bien la Providence!

Croyez-nous et moi surtout, Bon et cher Monsieur Perret,

Votre ami en N.S.

Eymard Sup.


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