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Paris, 6 Juillet 1859.
Me voici, bien chère fille, à Paris, passant près de Saint-Romans sans pouvoir vous y dire un petit bonjour. J'étais obligé de vite arriver à Paris pour le dimanche de la Fête-Dieu, un de nos religieux étant fatigué et réclamant ma présence.
Le Bon Dieu ne voulait pas que j'eusse cette consolation; qu'il en soit tout de même béni! J'aurais revu avec plaisir ce beau rocher que César a remarqué et que j'ai aimé. L'âme aime les collines et les montagnes, il lui semble toucher de là aux Cieux et être plus près de Dieu. Vous êtes heureuse de voir ces belles et silencieuses montagnes, l'âme va plus haut par elles. Vous êtes heureuse dans votre campagne, avec Dieu seul, avec la pureté de la nature et la beauté de la divine Providence; mais je m'y ennuierais bien, parce que votre Tabernacle est trop loin; allez-y cependant aussi souvent que vous le pourrez. C'est la visite de l'Ami, du Père, de Jésus, du Paradis.
Plus il en coûte d'aller, d'arriver, mieux on est reçu.
Soyez bonne, aimable, gracieuse, condescendante et par-dessus tout patiente en la divine charité, et tout fleurira autour de vous.
Me voici de nouveau à Paris aux prises avec le Bon Dieu et le monde qui nous assiège. Je me laisse prendre, mais j'aurais bien ma revanche au Paradis, où personne ne me dérangera plus de ma place (excepté vous, bonne fille, vous en avez le droit).
Mes pieux souvenirs à toute votre famille, vous savez que je vous suis bien uni en N.-S.
EYMARD, S. S. S.
Madame Jordan, à Calet, à Saint-Romans,
Paris, 8 Juillet 1859.
Bien cher Père,
La réponse du P. Champion a d- vous accuser réception du billet de 500 fr., merci encore.
Votre lettre nous a donné un joli dessert; tout le monde d'écouter, de rire en attendant le second plat: que vous avez donc bien répondu! Avec le T. S. Sacrement nous sommes plus grands, plus riches, que tous les privilèges religieux, que tous les grands édifices et les grands noms.
Si ces vénérables religieux veulent devenir religieux du T. S. Sacrement, à la bonne heure! nous irions avec honneur faire l'Exposition dans la belle et magnifique Eglise de S. Pierre-aux-liens sur le Mont Esquilin. Je verrai Mr Cartier et lui ferai la commission de retourner à Marseille.
Que Dieu bénisse ce beau soleil qui vous donne un peu de vie, et de meilleure vie! mais je voudrais savoir que vous dormez un peu. Quelle jolie visite vous avez reçue! elle m'a fait plaisir, cela prouve de l'intérêt.
Je verrai Mr Marziou et lui ferai votre demande, je sais qu'il est un peu fatigué et qu'il a loué une campagne à Bourg-la-Reine; il a bien ses misères, ce pauvre Mr Marziou!
Voici le détail des petits objets achetés à Paris:
2 canons d'autel à 2,50 soit Fr. 5,00
3 St Esprit à 6 " 18,00
2 garnitures de nappes " 28,20
Images de la Sainte Vierge " 3,00
1 grosse de petites pierres " 15,00
4 plus grandes à 2 chacune " 8,00
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Fr. 77,20
D- pour le voyage du Fr. Antoine 3 25,00
Facture de la cire " 114,00
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Total Fr. 216,20
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RECU
1· 3 fr. reste du fr. Antoine Fr. 3,00
2· excédent du calice " 2,00
3· excédent de l'ostensoir " 32,00
4· excédent des 100 fr. de mon voyage " 23,00
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Total Fr. 60,00
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Reste dû Fr. 156,20
- Addition faite par le P. de Cuers:
Payé le 11 Juillet " 27,40
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Fr. 128,80
le 22 Juillet " 53,00
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Fr. 75,80 + 100fr
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avances à Koll (mes rentes) Fr. 50,00
" " 66,00
Avancées du paiement:
Reste dû Fr. 59,80
Envoyé le 15 Octobre " 10,40
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Fr. 49,40
Cire " 60,00
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Reste dû " 109,40
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Voilà, bien cher Père, votre compte; mais je pense que vos finances doivent être courtes, et les nôtres ne sont guère longues. Le Bon Maître ajoutera le reste.
Tous ici vous aiment, vous embrassent et vous disent tout ce que l'affection fraternelle sait et peut dire.
Moi je suis toujours tout vôtre en N. S.
EYMARD.
P. S. Un saint prêtre de Turin fait demander des renseignements. Quelques jeunes gens réfléchissent, entr'autres Mr de Leudeville, Mr Chanuet de Lyon: on ouvre les yeux pour nous voir. Peut-être le filet miraculeux se fait, et Notre Seigneur: jactate rete, il bénira comme il sait bénir.
Mr Carrié vous prépare une épître, il va bien.
Paris, 11 Juillet 1859.
BIEN CHERES SOEURS,
Il m'a été impossible d'aller vous dire un petit bonjour à La Mure. J'ai d- saluer vos montagnes de loin et vous bénir. Un de nos religieux était fatigué à Paris et j'avais hâte de vite arriver, de crainte qu'on ne pût faire l'adoration; heureusement que la maladie n'avait rien de sérieux.
Je suis resté à Marseille trois semaines; j'ai été très édifié et très consolé de la piété et du dévouement des Marseillais. La retraite que j'ai prêchée dans notre église a été bien suivie, et le beau jour de la Fête-Dieu nous avons pu faire la première exposition dans notre nouvelle Chapelle. Nous étions cinq: trois prêtres et deux frères. Je suis reparti de Marseille le lendemain 24 juin, et je ne me suis pas arrêté, malgré les engagements que j'avais pris; mais le devoir doit passer avant tout.
Si nous étions plus nombreux, on nous offre plusieurs autres établissements, un à Rome surtout; mais il faut se borner et attendre les moments de Dieu. C'est une si belle vocation que cette vocation eucharistique! d'être sans cesse occupé autour du divin Maître, d'être comme sa garde royale et sa famille; nous ne donnerions pas notre belle part pour toutes les positions et tous les biens du monde. Je sens que toutes les positions par où la bonté de Dieu m'a fait passer n'étaient qu'une préparation pour cette vocation si belle et si sainte, aussi je ne cesse de remercier Dieu d'avoir été chez les bons Pères maristes et d'avoir été curé et vicaire.
Maintenant une chose m'afflige, c'est de voir qu'il me manque tant de choses, tant de vertus pour être au niveau de mes devoirs.
Ma santé se soutient bien, seulement le temps me manque pour arriver à finir tout ce qui se présente chaque jour; cette vie de Paris est si absorbante! puis notre adoration nous prend aussi une bonne partie de mon temps, mais heureux temps dont la vie des Anges dans le ciel est l'emploi.
Je pense aller à Marseille vers le mois d'octobre pour y conduire quelques sujets; je tâcherai de me réserver un jour pour vous, chère soeur. En attendant, priez pour moi et pour la belle oeuvre que Notre-Seigneur a confiée à mon indignité, et croyez-moi toujours en N.-S.
Tout vôtre.
EYMARD.
P.-S. Avez-vous des nouvelles de Mr l'abbé Fau, ancien curé de Saint-Laurent? Il est bien paresseux.
Paris, 13 Juillet 1859.
Bien cher Père,
J'ai reçu ce matin votre lettre avec les deux billets qu'elle renfermait, 100 fr. pour honoraires de messes et 100 fr. ainsi répartis: 72,60 comme complément du trimestre, et 27,40 à déduire sur les 156,20, soit 128, 80 restant.
J'arrive de chez Mr Picard, où j'ai trouvé Mlle de Mauroy, qui attend toujours votre lettre de réception de sa lampe (Cherche-Midi 16); veuillez lui écrire cette lettre de remerciement, elle y tient beaucoup.
Mr Picard m'a dit qu'il vous enverrait, au milieu de la semaine prochaine, tous vos objets, c'est le moule nouveau des candélabres qui l'a retardé.
Ecrivez tout simplement au R. P. Archier, Supérieur des Missionnaires de N. D. de la Salette, ou à son remplaçant, rue Neuve, Grenoble (Isère). Il vous expédierait de suite l'eau que vous désirez. Demandez-en une cantine; dites-leur que c'est de ma part.
Le P. Champion corrige les épreuves du Missel et du Bréviaire de Mr Adrien Le Clère: je suis tellement habitué aux déceptions que je n'ose plus rien espérer d'avance.
Paris jouit d'une chaleur qui vous ferait envie, si vous n'étiez à Marseille; on n'ose presque pas sortir; aussi les rues ne sont elles pas encore encombrées.
Hier, illumination pour la paix: les honnêtes gens s'en réjouissent, les révolutionnaires en sont mécontents. On attend avec plaisir l'Empereur; seulement comme la flotte est toujours chargée de bombes et de marins, on dit: mais pour que cela ne soit pas perdu, l'Empereur devrait saluer avec cela l'Angleterre et lui dire son arrivée victorieuse.
Adieu, bon Père.
Tout vôtre, et toute la maison vous embrasse; les haricots verts sont si nombreux, qu'ils sèchent presque sur la table.
EYMARD.
P. S. La caisse est en cuivre.
Paris, 15 Juillet 1859.
J'ai reçu hier, chère soeur, votre bonne lettre; je n'osais pas vous écrire à Amplepuis, ignorant votre séjour.
Dieu n'a pas voulu que j'eusse la consolation de vous voir à mon passage: qu'il en soit béni! S'il veut me procurer cette joie en automne, je l'en remercierai, et alors je me mettrai à votre disposition pour l'oeuvre de l'Adoration. - Dieu m'a donné de grandes consolations à Marseille; j'y ai trouvé de grandes âmes, des âmes de feu; j'espère que notre bon Maître y trouvera des Aigles autour de son Corps divin.
Nous y avons fait la première exposition, le jeudi, jour de la Fête-Dieu; puis nous l'avons suspendue pour achever les réparations. L'église sera très convenable. Nous étions cinq: trois prêtres et deux frères.
Nous n'organiserons définitivement cette maison qu'au mois d'octobre ou de novembre; en attendant, nous demandons à notre bon Maître de nous envoyer les sujets de son coeur, car les chercher, les désirer par nous-mêmes serait nous tromper et prendre des étrangers et des ennemis. Oh! que j'ai souffert de ces vocations conditionnelles, de ces hommes qui ne se donnent qu'à demi! Six prêtres depuis le commencement sont partis, et quand j'examine le pourquoi, j'en remercie le Bon Dieu, tout en m'humiliant beaucoup de n'avoir pas pu ni su comment les rendre eucharistiques. Aussi, quand une vocation se présente, je regarde d'abord celui qui l'envoie et ce pourquoi il vient, car je ne veux plus des hommes qui viennent pour eux. Oh! priez donc pour de bonnes vocations autour du Grand Maître: c'est un don que l'on n'apprécie pas, une grâce que l'on ne connaît pas.
J'ai vu, la semaine dernière, votre frère artiste, ainsi que Madame; il m'a bien reçu. Un ami commun m'a présent, très naturellement, puis mes relations avec toute la famille m'ont ouvert les coeurs; on m'a promis de venir me voir. Vous comprenez bien que je veux les donner à Dieu, ces bons parents! et qu'ils me sont chers à cause de vous.
Mr votre frère m'a dit que votre bon Père viendrait le voir; il fera très bien, et engagez-le à cela. Je le verrai avec plaisir et peut-être que sa présence terminera tout pour le plus grand bien.
Quand une âme libre a une grande pensée de se donner à Dieu en la vie religieuse, après avoir bien mûri cette pensée il faut la laisser en faire l'essai afin de la remettre en paix; souvent Dieu ne veut qu'une vocation intérieure et non extérieure: la première devient un aiguillon puissant et rend fervent partout.
Soignez un peu mieux cette pauvre santé, afin de souffrir un peu plus longtemps pour la gloire de notre divin Maître en qui je suis, chère fille,
Tout à vous.
EYMARD.
P.-S. J'ai reçu des nouvelles de votre chère soeur d'Alger; elle va bien.
Sainte-Anne, 1859.
1· Bien chère fille, restez à votre Confesseur et goûtez bien ce qu'il vous dit, car c'est trop bon et personnel. Ne vous inquiétez pas de ce que l'on pensera ou dira. Mais pour la maman elle fait bien d'y aller.
2· Le Bon Dieu aura aimé votre pensée d'aller vous faire souffrir, mais restez-en là.
3· Je suis content de voir votre bonne volonté pour cet ordre. Ne regardez pas l'ensemble, ma fille, mais le travail d'une heure ou de deux heures; vous êtes à la journée et non à vos pièces.
4· Cette pauvre fille est bien à plaindre, car elle a une maladie bien difficile à guérir; faites-en un peu votre mérite, bonne fille.
Soyez toujours joyeuse au service de Dieu. Donnez toujours tout au Bon Dieu. Reposez-vous tranquille en sa bonté. Vivez et agissez toujours en sa charité et vous serez bien sage.
EYMARD.
Paris, 26 Juillet 1859.
Bien chère fille,
J'étais un peu inquiet sur vous tous; votre lettre me rassure et m'apprend deux bonnes nouvelles dont je remercie bien Notre-Seigneur.
Oui, ayez confiance, la divine miséricorde triomphera un jour; pour l'heure et la forme nous ne le savons, parce que Dieu veut qu'on le prie encore et qu'on ait une plus grande confiance en lui.
L'histoire de votre servante m'a fait voir une pauvre tête et un bien mauvais esprit. Vous avez bien agi d'agir avec autorité et fermeté, et surtout de mettre Mlle Stéphanie au même degré d'autorité que vous.
Donnez-lui son congé, et si elle vous demande pardon, dites-lui que vous entendez que votre maison marche sur un autre pied, que vous voulez y faire des réformes et qu'avec son genre et ses habitudes vous ne pouvez les faire, que son pli est pris. Puis, cependant, si elle vous demandait de faire encore un essai sérieux, peut-être pourriez-vous l'essayer; sauf à la renvoyer plus tard à la première chute comme celle-ci.
Mais si elle reste seulement dans un silence qui paraît être fâchée du passé, c'est-à-dire de ce qu'elle a fait et dans une conduite plus régulière, plus soumise, plus dévouée même, mon avis est que vous ne vous contentiez pas de cela; l'autorité a été offensée, il faut de la justice pour l'exemple; puis, un coeur ulcéré se rend difficilement.
Ne vous hâtez pas d'augmenter les gages des deux autres. Si vous pouviez trouver une personne de confiance, et Dieu peut vous la donner, cela serait d'un plus grand secours.
Je vais bien prier Notre-Seigneur de vous faire trouver quelqu'un qui soit utile et dévoué.
Ces bonnes soeurs sont en retraite cette semaine; priez pour elles.
Tenez-vous toujours bien unie de coeur et de vie à notre bon Maître en qui je suis
Tout à vous.
EYMARD.
P.-S. - Je n'ai pu envoyer hier ma lettre. Plus je pense à l'état de cette fille, à ce qu'elle a
dit et fait, plus j'incline vers le renvoi. Vous en avez maintenant toutes les raisons et
la facilité, il faut en profiter; ses services sont achetés trop cher. J'aurais bien désiré
rencontrer Mr G. ici pour lui dire un petit bonjour.
Que Notre-Seigneur vous bénisse et vous comble de ses grâces et de son amour.
Paris, 1 Août 1859.
Bien cher Père,
Enfin! je viens vous annoncer que votre envoi de Picard part demain; je les ai vus en détail, il restait encore à finir les deux girandoles, elles doivent être finies ce soir. Ce pauvre envoi nous a fait faire bien des visites; mais une autre fois on s'y prendra d'une autre manière. Vous trouverez les factures séparées, ainsi que vous le désiriez; j'ai aussi à la maison la couronne de l'ostensoir, ainsi que le voile de l'ornement rouge. Lundi passé, j'ai vu Mr Koll et lui ai remis la somme de 162 fr. que portait votre lettre; je ne puis vous dire le plaisir, la joie que votre lettre lui a faite, et surtout votre envoi; car il paraît qu'il en avait un grand besoin; il nous a promis de se mettre de suite à votre travail, et de vous l'expédier dans huit jours.
J'ai fait une retraite à ces Dames comme la nôtre, une retraite fondamentale, elle a fini hier par les voeux des anciennes, à ma grande édification et à leur grande joie.
Ces bonnes personnes attirent et attireront sur nous des grâces précieuses; elles valent plus que nous, elles sont d'une piété, d'un dévouement admirables.
Dieu se prépare là une sainte famille, et je ne serais pas étonné qu'elles devinssent aussi grandes un jour que ces grands Corps, qui ont donné au Ciel tant de saintes âmes!
Un diacre de Nantes demande des renseignements dans une première lettre; dans une seconde, il demande l'entrée: restera-t-il aussi en route? à la volonté de Dieu!
Les autres postulants ne donnent plus signe de vie. Deux ou trois jeunes gens, Mr de Leudeville, Mr Chanuet et autres sont travaillés par la grâce. Le P. Champion travaille toujours à la liturgie et à l'impression de Mr Le Clère.
A la fête de l'Assomption, nous aurons douze Premiers Communiants. Mr Carrié en est le catéchiste; il les prépare d'une manière admirable, il en fait tout ce qu'il veut, aussi est-il bien content, il va bien et avance; il est paresseux pour vous écrire: il me l'a promis.
L'adoration va toujours bien. Notre-Seigneur n'en souffre pas du petit nombre de la garde.
Mr Laurent m'a écrit, et envoyé la lettre de son directeur; avec une telle lettre on ne peut aller de l'avant, sans parler d'autres choses.
Votre petit Ratons a donc eu aussi sa tentation; mais elle a été de courte durée: d'ailleurs c'est un enfant, qui appréciera un jour la grâce et la faveur que Dieu lui a faites.
Nous aimons, bon Père, à vous voir rôder dans votre chapelle, à jouir d'avance de sa beauté ou au moins de sa convenance; que Dieu vous donne la joie entière d'y voir bientôt une bonne famille de frères et véritables adorateurs.
Mes amitiés au bon petit frère, à Mr Brunello et à la bonne et excellente famille Guérin, sans oublier le fidèle M. Gordes.
Tout vôtre en N. S.
EYMARD, S. S. S.
Paris, 5 Août 1859.
Bien cher Père,
Mr Isnard est au milieu de nous, nous en aurons bien soin quant à l'âme et quant au corps; il me paraît bien disposé; mais nous désirons bien que le Bon Maître envoie quelques Gardes du Corps, car nous en aurions besoin.
Je regrette bien que ce bon Mr Clavel soit si lent à terminer ses affaires; il faut qu'il ne comprenne pas encore bien la grâce et la vertu de sa vocation; mais je pense qu'il sera bientôt libre. Il aurait bien d- m'écrire.
Mr Isnard m'a remis 30 fr. pour 30 messes, votre voile rouge. Je pense que vous recevrez dans une dizaine de jours toutes vos affaires; le voile est en ceinture dans la petite boîte qui renferme la couronne.
Soeur Benoîte est très triste et ne cesse de dire depuis six à sept jours de prier pour votre petit frère, que sa vocation est exposée, qu'il est en tentation de la perdre, qu'il vaudrait mieux le faire venir à Paris pour le former un peu, et renvoyer Charles à sa place... Cette bonne fille s'inquiète; mais sans rien mépriser, j'ai renvoyé cela et j'en aurais ri, car elle n'a aucune raison de le croire, à moins que Notre-Seigneur le lui ai dit...
Il m'est venu de Lyon, il y a quelque temps, que le petit Ratons parlait avec certaines femmes, ou bien que celles-ci le cherchaient et le décourageaient. Voyez si c'est vrai, car ces pauvres dévotes ont si mauvaise tête quelquefois, et si peu de jugement!
Tout va à l'ordinaire ici, c'est-à-dire qu'étant si peu, le service eucharistique nous absorbe, et tant mieux! mais le règlement ne peut alors s'exécuter aussi bien.
Priez bien la Bonne Mère de nous envoyer quelques saint Jean.
Tous vous aiment et vous embrassent affectueusement en N. S.
EYMARD S. S. S.
Au Révérend Père de Cuers,
7 Août 1859.
Bien cher Père,
Je reçois à l'instant cette lettre, je vous la renvoie afin que vous voyiez les dispositions de ce pauvre enfant. Sr Benoîte avait vu l'état de son âme; nous n'y avons pas cru, cela l'a rendue malade.
Je vois que ce pauvre enfant n'a pas de générosité; que ses parents l'ont élevé avec faiblesse; ces dernières lignes m'annoncent une tête montée. Après lui avoir montré le défaut de cette résolution, s'il tient à s'en aller, qu'il s'en aille. Je suis bien peiné que ses parents l'aient pris au mot et lui aient envoyé de suite de l'argent.
Cette nouvelle me fait bien de la peine: vous voilà de nouveau tout seul, et le Bon Dieu ne nous donne personne pour vous donner. C'est le cas de dire: Deus in adiutorium meum...
Le P. Hermann n'a pas répondu à ma lettre; peut-être ne l'a-t-il pas reçue, je l'avais adressée à Carcassonne; ou bien veut-il cesser tout rapport: que Dieu en soit béni!
J'ai vu hier Koll; vos ornements de la boiserie seront terminés mercredi prochain; je lui ai dit d'attendre pour les envoyer que je lui donne une commission; ainsi j'attendrai vos ordres pour les cierges, etc.
Ce pauvre Mr Koll s'est trouvé dans une position critique, il avait besoin le jour même de 100 fr. Je les lui ai avancés. Je vous en envoie le reçu.
Je comprends que la note des dépenses effraie un peu; mais le Bon Maître, pour qui tout est fait, nous donnera bien les moyens d'acquitter sa dette eucharistique.
J'ai bien goûté votre note sur Mr Carrié; j'en écrirai par vous à Mgr. pour le lui exposer; il est si bien ce bon Mr Carrié! Mr Isnard commence mardi sa retraite. Le nombre des professes du n· 66 est de cinq; on en a reçu deux nouvelles, dont une très bonne et très religieuse, musicienne, qui rehausse et réjouit par ses airs pieux le culte simple de la chapelle.
Michel va bien et nous rend vraiment de très grands services; il les fait acheter un peu de temps en temps; mais on voit qu'il est tout dévoué à la maison, et que ce n'est que dans une pensée de son bien manqué ou mal fait, qu'il se fâche un peu.
Charles, c'est toujours le bonhomme du Bon Dieu et qui oublie ou casse sans malice.
Nous avons ri de votre ex-docteur, nous attendons.
Tous vous embrassent; vos lettres sont un jour de fête: tous s'y intéressent, comme sur le champ de Solférino.
Tout vôtre.
EYMARD.
/15 août 1859/
Chères Soeurs et filles en Notre-Seigneur,
C'est aux pieds de Notre-Seigneur en son divin Sacrement que j'ai fait vos règles; je les ai mises sous son trône eucharistique aujourd'hui, afin qu'il les bénisse et les approuve d'abord dans son amour. Je vous les donne, ces règles, chères Soeurs, comme le don de Marie, votre bonne Mère, en ce beau jour où elle monte au ciel et quitte le divin tabernacle, mais elle veut vous donner sa place d'amour au Cénacle, afin que vous la remplaciez près de son Jésus, du Dieu de l'Eucharistie, pour elle, elle va vous préparer une place près d'elle, au ciel, autour du trône de gloire. Ces règles ne sont pas encore approuvées par le Vicaire de Jésus-Christ sur la terre. Il a cependant béni votre but eucharistique, votre oeuvre si belle, savoir: l'adoration, votre fin, la vie intérieure et cachée de Jésus, votre voie et votre vie, votre oeuvre de zèle, l'oeuvre de la première Communion des adultes. Dieu a voulu par cette bénédiction si précieuse et si honorable du Souverain Pontife vous lier par la reconnaissance et l'amour à une si belle vocation.
Recevez ces règles, mes filles, avec la charité de votre coeur, ce n'est encore qu'une lettre morte, donnez-lui la vie par vos vertus, et la fécondité par votre amour de Jésus, votre divin Epoux. Gardez-la bien, cette règle, et elle vous gardera, et vous conduira à la perfection de votre vocation, restez longtemps petites dans le Cénacle, ignorées et inconnues du monde.
Honorez le Dieu d'amour caché en son divin Sacrement par votre amour de la vie simple et cachée, avec Marie, votre mère.
Mettez en votre bon Maître toute votre confiance, abandonnez-vous entièrement à sa paternelle Providence, et passez-vous des protections humaines.
Saint François eut soin de Sainte Claire et des ses pauvres filles, nous aurons soin de vous, mes filles, en la divine charité de Notre Seigneur et Maître, mais entre vous et nous il y aura toujours l'adorable Eucharistie, en qui je suis,
chères filles
votre tout indigne
et pauvre serviteur
Eymard
Sup. S.S.
Assomption 1859
Paris, 17 Août 1859.
Bien cher Père,
J'ai un moment de libre, je viens vous le donner avec plaisir; et d'abord commençons par les commissions:
1· Hier seulement on nous a apporté vos 14 kilos de cire, laquelle sera bien déclarée aux messageries; la première l'avait été aussi bien: le facteur en disant le contraire, le fit pour se montrer digne de récompense plus belle.
2· Vos bréviaires sont dans la caisse de Mr Koll; car il y a deux caisses, celle de la cire et celle du bois. Le tout va partir aujourd'hui par la petite vitesse.
Je pense que vous recevrez bientôt votre caisse de Picard retardée par la fête du 14. Je désire que tout soit bien.
3· Le billet du P. Champion écrit le même jour, a été non oublié, mais cru dans la lettre; je ne l'ai pas envoyé de suite, espérant vous écrire bientôt.
4· Vos deux caisses seront expédiées demain par la petite vitesse.
Pour les nouvelles de la maison:
1· Mr Isnard a fini sa retraite; il part demain pour Angers et de là, par Bordeaux, à Marseille. Il nous a édifiés, il me paraît décidé quant au fond de la question de la vocation; quant à l'exécution, il m'a dit qu'il aviserait dans l'année; à la grâce de Dieu!
2· Mr Chanuet de Lyon est venu passer les deux jours de fête avec nous; le beau jour de l'Assomption, il m'a donné sa parole sérieuse de venir vers nous définitivement dans le mois d'octobre. Il vient de passer son dernier examen de doctorat, et il a été reçu.
3· Les autres vocations sont en attente. Un étudiant de la Seyne, âgé de seize ans: on m'écrit son désir de venir chez nous, je fais prendre des renseignements. Son père y consent; son nom est Victor Verlaque.
4· La Première Communion de nos douze petits disciples a été bien édifiante et touchante.
Mr Carrié était le brave Josué et le bon Père de famille. Il était heureux et Dieu l'a bien béni, car ces enfants sont tout changés; le lendemain il ont été confirmés par Son Eminence.
Le bon Mr Perret était aux anges! il est si dévoué, ce saint homme!
Voilà donc le jeune Ratons de nouveau raisonnable et décidé à devenir un bon religieux; j'en béni Dieu et lui demande bien pour lui cette bonne volonté qui fait les saints. Charles et tous ont été si heureux de cette bonne nouvelle! comme aussi on craint toujours pour lui, pour sa faiblesse.
Vous savez sans doute que le P. Hermann est prieur de leur couvent de Lyon. Puisqu'il en veut tant à la maison de Paris, qu'il adopte celle de Marseille dans son affection: elle est bien pure de tout alliage. Plus de nouvelles du diacre de Nantes! il paraît qu'il a été épouvanté de notre genre de vie: il voulait courir et prêcher.
Mr l'abbé Laurent a vu le grand vicaire de Fréjus à Saint-Maxime, lui a parlé de son désir. Celui-ci l'a encouragé à en parler à Monseigneur en septembre.
Ce bon abbé n'avait pas reçu ma lettre, dans laquelle je lui disais que la lettre de son directeur étant contre sa vocation, et ne pouvant sans l'Evêché le faire avancer aux ordres, nous ne pouvions aller de l'avant. Sa lettre à moi est bien.
Voici, je crois, le meilleur de tous les signes de vocation: quand un sujet honnête et ayant les conditions ordinaires accepte l'adoration, le saint Office, en un mot la règle entière sans conditions, c'est beaucoup, héroïque pour plusieurs; il faut alors en faire l'essai, c'est à Dieu a faire le reste; car l'adoration est une bonne épreuve et sans elle on n'a pas encore la grâce. Il n'y a pas de dangers pour un sujet qui veut être et travaille à devenir un bon adorateur.
S'il m'écrit encore, je goûte bien votre pensée de refaire son pèlerinage manqué.
Vous savez sans doute que ce bon curé d'Ars est mort: il faut bien prier pour lui.
Nous vous embrassons tous in osculo sancto, mais surtout celui qui est tout vôtre en N. S.
EYMARD.
Je vous envoie dans la caisse une provision de papier timbré.
Paris, rue faubourg St Jacques 68, le 18 août 1859
Bien chère fille en Notre-Seigneur,
Je me reproche bien vivement de vous avoir laissée si longtemps sans réponse, votre bonne charité veut bien me le pardonner.
Cette vie de Paris est si accablante, mes occupations si multiples que je ne sais par où commencer, alors les pauvres absents se trouvent servis les derniers.
Ce n'est pas que je vous ai oubliée, pauvre fille, non, non, mais pour pouvoir vous donner un bon moment, j'ai été retardataire.
Vous êtes donc toujours sur la croix, toujours souffrante, pauvre fille! allons, il paraît que le Bon Dieu veut vous donner une plus riche couronne, et plus vite que les autres, puisqu'il vous fait faire votre Purgatoire en ce monde, faites-le bien avec résignation et confiance, embrassez souvent N.S.crucifié, votre bon maître qui vous veut en sa sainte compagnie, près de lui. Oh! soyez sûre qu'il vaut mieux pour vous souffrir que travailler, que faire des bonnes oeuvres, vous faites ce qu'il y a de plus parfait. Cela n'empêche pas de désirer le ciel.
Oh! oui, vous pouvez désirer la fin de vos peines, de votre vie, mais que ce ne soit pas seulement pour ne plus souffrir, mais pour aller au ciel, voir le Bon Dieu; irai-je au ciel? oui, vous y irez, vous êtes sur le chemin, en bon chemin, c'est sûr, la croix n'égare pas. Mais mes peines passées? - soyez tranquille - tout est entre les mains de la bonté de Dieu - Dieu vous aime. Ce que vous n'avez pas pu faire à Lyon, Dieu y pourvoira d'une autre manière. N'ayez pas d'autre croix que la croix présente, laissez celles qui sont passées dormir en paix.
Je vous envoie une petite feuille qui vous apprendra ce que nous faisons, et votre charité vous fera prier pour que nous servions bien notre Maître.
Je n'ai pas besoin de vous dire que je prie tous les jours pour vous et que votre âme m'est toujours aussi chère en N.S. en qui je suis, chère fille, votre tout dévoué.
Eymard.
Nota: Les mots mis entre crochets ne se trouvent pas dans la copie dactylographiée qui a servi pour cette transcription.
Paris 19 août 1859
Madame et chère soeur en N.S.
Je ferai ce que je pourrai pour vous voir en passant, si je vais à Marseille, dans le courant d'octobre; mais comme il peut y avoir du retard dans mon voyage, il est plus prudent de m'écrire sur les renseignements que vous désirez avoir, pour votre cher Charles. Je serai heureux de vous rendre ce bien petit service; comme aussi à votre chère âme qui, je le sens (?), a bien besoin de Dieu et ne peut vivre sans lui. Vous avez bien raison, car Dieu suffit à qui l'aime; et sans lui, rien ne peut consoler et remplir le coeur.
Nous avons une Agrégation du T.S.Sacrement, mais non un Tiers-Ordre. Je ne sais encore si Notre-Seigneur le voudra et quand.
Je reste en N.S., Madame et chère soeur,
Votre très humble et dévoué serviteur.
Eymard P.S.
Paris, 19 Août 1859.
MADAME ET BIEN CHERE SOEUR EN N.-S.,
Diriez-vous que je vous grondais un peu et allais vous l'écrire quand, ce matin, votre lettre du 5, toute cachetée et toute cachée, m'est apparue sous un monceau de papier! Les âmes se devinent, on sent qu'une chose ordinaire manque à son heure.
Enfin me voilà lisant votre lettre et ne me plaignant pas du tout de sa prolixité; au contraire, lui désirant encore autant de choses. Mais vous renvoyez après les vacances de me dire le résultat de vos bonnes pensées, de vos bons désirs, de vos bonnes résolutions. Je pense que d'ici à novembre vous m'enverrez quelques belles fleurs de cet arbre!
J'aime votre état présent, votre marche tracée, l'apostolat d'exemple, une vertu plus intérieure, une vie en Dieu plus suivie, plus habituelle; vous ferez bien! Commencez par vivre avec Dieu, et avec Dieu en vous, car Jésus a dit:
"Si quelqu'un m'aime, il gardera ma parole, nous viendrons en lui et nous ferons en lui notre demeure."
Et ailleurs: "Si quelqu'un m'aime, mon Père l'aimera, je l'aimerai aussi et je me manifesterai à lui;"
Un jour il dit à ses Apôtres fatigués de l'apostolat: " Venez vous reposer un peu dans un lieu désert et élevé." Et saint Luc dit que souvent Notre-Seigneur se retirait seul sur la montagne pour y prier toute la nuit.
Le Saint-Esprit dans les psaumes dit, par David: "J'écouterai en moi-même ce que dit le Seigneur Dieu."
Je vous rappelle tout cela, bonne fille, pour vous dire: Demeurez intérieure, vivez en votre intérieur, possédez-vous, ramassez-vous du dehors au dedans, laissez ce monde; pour vous, retirez-vous avec Jésus en votre coeur où il inspire votre âme, lui parle ce langage intérieur que l'amour seul entend et comprend. C'est en nous-mêmes que le Saint-Esprit prie, gémit par des gémissements d'amour inénarrables. Le règne de Dieu dont il est tant parlé dans les Saintes Ecritures, c'est le règne intérieur de Dieu en l'homme, alors qu'il règne sur son intelligence par la foi, sur son coeur par l'amour, sur son corps par la mortification des passions.
Conduisez-vous envers Jésus intérieur, comme vous le faites envers un hôte ami, aimé, souverain; ne le laissez pas trop longtemps seul; trouvez un moyen de lui dire un petit mot au milieu de vos occupations; de lui apporter un petit bouquet d'amour, et alors ce bon Maître restera avec plaisir [avec] vous, il vous attendra avec joie. Donnez-vous bien à tout ce cher monde qui va vous voir pendant ces vacances, soyez gracieuse et aimable dans le don; pure dans les sacrifices, c'est-à-dire sans retour vers vous, encore plus pure dans l'amitié donnée que vous recevrez, pour la porter, pour la diriger vers le bon Maître.
Il est bien à désirer que vous preniez un grand empire, par le coeur, sur toutes ces bonnes âmes, afin que vous ayez le droit de les pousser plus haut.
Nous sommes toujours dans notre même vie, dans notre même bonheur; puisque vous l'avez goûté, n'est-ce pas qu'il n'y a rien à désirer de plus sur la terre, sinon des coeurs très purs, très généreux et très morts à tout ce qui n'est pas Dieu! Un bon souvenir à votre chère fille.
Mes amitiés aux vôtres.
Vous savez que je suis
Tout à vous en N.-S.
EYMARD, S. S. S.
A Mgr DE MAZENOD, Evêque de Marseille.
Paris 20 août 1859
Monseigneur,
J'ai une grâce à demander à Votre Grandeur, c'est de donner la Tonsure, et s'il est possible quelques Ordres Mineurs à un de vos dignes enfants, qui est avec nous depuis 2 ans, M. Carrié de Marseille, sa vocation nous paraît certaine, sa conduite est très édifiante, il a remplit parfaitement son office de Sacristain - il finit ses études classiques, il a 22 ans, et ce serait une grande consolation pour nous de le voir enrôlé dans la milice sainte par vos mains vénérables et bénies. Si Votre Grandeur juge ma prière admissible, nous enverrions M. Carrié à Marseille à l'époque marquée par Elle.
J'apprends avec plaisir que les travaux d'installation et d'ornementation se poursuivent avec activité pour le jour de l'Exposition fixée: ce sera un grand bonheur pour moi et pour tous les Pères d'aller à Marseille donner notre faible concours à votre zèle, Monseigneur, pour la divine Eucharistie.
Dans cette attente, Monseigneur, Daignez agréer les hommages pleins de vénération et de dévouement filial avec lesquels j'ose me dire
De Votre Grandeur, Monseigneur,
le très humble et très obéissant serviteur.
Eymard Sup. Soc.SS.
Paris, 20 Août 1859.
Bien cher Père,
Je vous envoie la lettre à Monseigneur, je ne sais pas s'il voudra nous accorder cette grâce; car les Evêques de France ne l'accordent que lorsqu'on est au moins à la fin de la philosophie, et ordinairement en premiers année de théologie; je pense que les jeunes gens dont vous parlez, et qui sont plus jeunes que Mr Carrié, avaient déjà fait une grande partie de leurs études; quoiqu'il en soit, je désire bien cette grâce pour Mr Carrié, il le mérite bien. Quand nous seront plus grands, nous pourrons alors invoquer le droit commun; mais nous ne sommes encore rien, sinon de pauvres adorateurs qui aspirent à devenir de bons religieux.
Mr Perret est parti pour la Pierre-qui-Vire, chez ses Bénédictins, avec Mr de Talasne; je pense qu'il restera absent quelques mois.
Si Monseigneur accorde l'ordination, il ne faudrait pas que ce fût de suite, mais dans le mois de septembre, quand Mr Clavel sera de retour; car autrement, nous ne pourrions pas suffire à l'adoration. Mr Clavel m'écrit que le 4 septembre il terminera sa grande affaire: est-ce une vente? il ne me le dit pas. Je ne vois rien qui me donne l'espérance d'avoir quelqu'un plus tôt. Vos caisses sont parties le 20.
Je crois que cette galerie relèvera bien la boiserie du choeur.
Vous avez 14 kilos de cire bien déclarés.
Rien de nouveau.
Que Dieu nous garde et vous bénisse!
Tout à vous.
EYMARD.
Paris, 22 Août 1859.
Chères demoiselles Bourges,
Je vous remercie bien de votre bon souvenir et des nouvelles que vous me donnez; vous savez que tout ce qui vous regarde m'intéresse beaucoup. Je suis content de penser que vous allez vous reposer un peu; vous en avez besoin pour cette belle mission que Dieu vous a donnée, et que vous êtes heureuses de remplir. Reposez-vous donc bien; vous feriez bien d'aller prendre les eaux que l'on vous conseille, ce serait une distraction et un bon régime. Je vote pour cela. J'aimerais aussi bien le pèlerinage de Notre-Dame de la Salette. Le chemin le plus court serait par Gap jusqu'à Corps. Là vous iriez chez Mme Dumas de ma part (Hôtel du Palais); elle vous guiderait bien.
Si vous alliez à Gap, il faut aller à Notre-Dame du Laus, le plus vieux pèlerinage de la Très Sainte Vierge qui existe en France; il y a une voiture, et ce n'est qu'à deux heures. Oh! quel touchant et aimable pèlerinage pour moi que celui du Laus! C'est celui de ma jeunesse, de ma vocation, de mes amours. Allez-y; vous serez enchantées.
Je bénis Dieu de la bonne nouvelle d'Henry. Le voilà cas, et pouvant se suffire: tant mieux! Aimez toujours bien le Bon Dieu, bonnes demoiselles, c'est le bonheur de la vie. Faites tout pour son amour, souffrez tout pour lui, et ce Bon Père sera content de vous.
Je prie et prierai toujours pour vous, car je veux remplacer un peu votre bien-aimé frère .
Tout à vous en N.-S.
EYMARD, S.S.
Paris, 22 Août 1859.
MADAME,
Vous désirez savoir si j'accepterai l'invitation de Monsieur le Curé de Sainte-Madeleine de Tarare dans le cas où il me demanderait de m'arrêter quelques jours en allant à Marseille pour donner quelques instructions à l'oeuvre de l'Adoration.
Si vous pensez, Madame, que je puisse y faire un peu de bien en passant, je pourrai m'y arrêter; ce sera aussi une occasion pour aller vous dire un petit bonjour à Amplepuis, ainsi qu'à toute votre chère famille et à la bonne famille de Layoutte.
Mais je pense que ce ne sera que vers le mois d'octobre ou de novembre: dans ce cas, j'écrirai huit jours à l'avance.
Mais vous connaissez Tarare et vous savez que je ne suis pas prédicateur, et surtout depuis que je suis à Paris où je ne fais que de simples exhortations.
Ne nous oubliez pas devant Dieu; notre petite Société est bénie dans sa miséricorde. Nous sommes heureux au service d'un si bon Maître.
Croyez-moi toujours en Notre-Seigneur, Madame, votre très humble et tout dévoué serviteur.
EYMARD, Sup. Soc. S. S.
Paris, 26 Août 1859.
MADAME ET CHERE FILLE EN N.-S.,
Votre bonne lettre m'a tiré d'anxiété sur vous; il y avait si longtemps que je n'avais reçu aucune de vos nouvelles que je craignais quelque nouvelle croix! Votre pauvre belle-soeur est bien l'âme forte de Notre-Seigneur, car son calvaire est grand et long, mais Dieu la soutient et elle se fortifie dans l'épreuve: c'est bien.
Et vous, bonne fille, vous me faites un triste tableau de votre âme: trop triste, car ce n'est qu'un état de tentation, et les tentations sont toujours bien humiliantes. Vous auriez bien pu me dire un mot de cette difficulté, qui peut-être n'est rien au fond; mais au moins vous ne laissez pas la sainte Communion, voilà ce qui me console et me fait espérer que le soleil dissipera les ténèbres et réchauffera ce pauvre coeur. Vous avez été bonne sur le bord de la mer, soyez encore bonne dans votre maison, malgré vents et marées.
Je pensais que le Bon Dieu achèverait lui-même votre retraite, et votre lettre semble me dire le contraire; vous aurait-elle fait le même effet qu'un remède pris à demi, qui ne fait que remuer les humeurs et ne les calme pas?
Je ne pense pas quitter Paris avant novembre, par conséquent j'y suis tout à vous. Je regrette que vous n'ayez pas accompagné ici votre belle-soeur; j'aurais été heureux de vous voir et de faire sa connaissance par vous.
Croyez-moi toujours en N.-S.,
Bien chère fille,
Tout à vous.
EYMARD, S. S. S.