Nella Anfuso est la dernière héritière de la grande École
Italienne de Chant qui est fleurie en Italie à l’époque de la Renaissance
et qui, malgré le Romantisme et le vérisme, est arrivée intacte dans l'École
de Cotogni et de Guglielmina Rosati Ricci, Maître de Nella Anfuso à Florence
dans les ans 1967-1972.
Nella Anfuso, chercheuse éminente et musicologue, a,
en même temps, retrouvé les documents historiques du Chant Italien qui
éclairent la tradition vocale dont elle est unanimement aujourd'hui considérée
"UNIQUE REPRÉSENTANTE"
La
presse internationale a défini Nella Anfuso "la grande Prêtresse
du Chant Italien" et en effets le Chant est conçu et pratiqué par
Nella Anfuso comme Art et pas comme métier pour gains plus ou moins copieux
et plus ou moins petite gloire momentanée.
Nella Anfuso fait écouter les chefs-d'oeuvre musicaux
de la grande civilisation italienne avec l'instrument vocal parfait créé
dans l'époque la plus grande d’Italie.
Tous ses enregistrements sont des vrais documents artistiques
et historiques et ils resteront comme pierres milliaires pour la postérité.
Nella Anfuso domine du haut de sa virtuosité inégalable,
de son tempérament inégalable d'interprète, de sa connaissance historique
inégalable, technique et esthétique, de sa beauté vocale inégalable le
monde contemporain de "dive" et "divetti" du star-system
et du show-business discographique.
EXCLUSIF
La renaissance de la musique ancienne qui, ces
dernières années, s'est poursuivie à un rythme accéléré, n'a pas
manqué de susciter bien des polémiques. Mais avant même d'aborder
les problèmes stylistiques, il convient de se pencher sur une
question qui reste d'actualité, celle de l'art du chant et de la
technique vocale. Universitaire et cantatrice, Nella Anfuso nous
rappelle le cri d'alarme que lançait déjà, il y a deux cents ans,
Giambattista Mancini.
Le XVIIIe siècle touchait presque à sa fin
lorsque Giambattista Mancini, grand spécialiste de la vocalité,
lança son cri d'alarme quant à la situation de l'art du chant qui
sous peu allait perdre la raison même de son existence. Mancini
avait vu juste lorsque dans son traité Riflessioni pratiche sul
canto figurato (Milan, 1777) il avait parfaitement mis en relief
les causes principales d'une décadence technique expressive que le
goût de la nouvelle société était en train de préparer. Les
nouvelles tendances vocales amenaient les chanteurs à ne plus
perfectionner leur technique et les compositeurs, de leur côté,
toujours moins connaisseurs de la voix humaine, perdaient toute
capacité d'écrire pour le chant. De là un grand nombre de maîtres
improvisés (surtout clavecinistes et violonistes ratés) qui ne
manquaient pas de donner de mauvais conseils aux malheureux
chanteurs qui s'adressaient à eux pour apprendre un art que ces
personnes n'avaient jamais connu.
« Ils font crier leurs élèves à pleins poumons
et gâtent de très belles voix en ignorant les principes de
l'émission et de la pose de voix ; on perçoit le manque
d'homogénéité du registre, le manque de justesse, la voix dans la
gorge ou dans le nez, sans résonance, parce que ces professeurs
prétendent que leurs élèves doivent reproduire avec leur voix tout
ce qu'eux-mêmes font avec leurs instruments... » (Mancini, op.
cit., p. 44-45).
Dans cet immense marasme où verse l'art vocal,
Mancini sauve toutefois deux écoles : les Conservatoires de Naples
et de Venise, bien peu de choses si l'on songe au nombre d'écoles
qui avaient exalté la célébrité des chanteurs et des chanteuses
italiens du passé. Mancini, mort à Vienne en 1800, n'aurait jamais
imaginé être le prophète si sûr d'événements divers qui auraient
conduit si vite, en une cinquantaine d'années à peine, au
bouleversement des prérogatives de l'art vocal, pour en arriver à
confondre la qualité naturelle d'une jolie voix avec l'art du chant
qui est, naturellement, tout autre chose. On peut en effet être doué
d'une voix jolie, agréable et juste, mais il n'est pas donné à tout
le monde de savoir s'en servir pour en faire un instrument
d'expression artistique. Un exemple peut illustrer cette affirmation
: le fait d'avoir même un magnifique Stradivarius n'assure pas à son
possesseur la possibilité et la capacité de posséder l'art du
violon.
Le fait de méconnaître l'art du chant ne touche
pas seulement « les spécialistes », mais rejoint les
mélomanes et le grand public qui, par une publicité très souvent
intéressée, voit se confondre ses idées même les plus assurées. Tous
les documents sur la vocalité qui nous sont parvenus, en effet, ne
mentionnent presque jamais la qualité naturelle de la voix si ce
n'est (voir Maffei en 1562) pour conseiller de commencer les études
en ayant comme support ce don naturel, mais tous les documents
mentionnent toujours la nécessité, pour être chanteur, de posséder
une grande technique d'émission et d'exécution pour pouvoir
atteindre le grand art du chant ; et quand ils s'occupent des
artistes de l'art vocal, ils les citent uniquement pour leurs
résultats dans l'interprétation et l'exécution par rapport à l'art
du chant et à ses caractéristiques techniques et de virtuosité. Il
faut dire aussi que ceux qui nous ont documenté au sujet de l'art du
temps passé étaient tous de profonds connaisseurs et savaient bien
ce qu'ils disaient: cela nous donne une assurance absolue quant à la
réalité de leurs témoignages.
Nous ne pouvons et nous ne devons pas oublier
que, de tous temps, la musique en général et le chant en particulier
ont toujours été des arts créatifs; c'est-à-dire le fruit de
situations particulières, sociales, historiques et esthétiques.
C'est notre époque qui, vivant sa crise d'identité musicale et ayant
perdu la continuité de conception de l'art vocal, en est réduite à
parler de qualité de voix en ignorant tout de l'art de bien chanter.
Tout cela nous porte alors à vaincre d'importantes difficultés de
connaissance quand nous voulons retrouver la musique d'un passé même
récent que le manque d'un art vocal vraiment assuré ne nous permet
que difficilement de rejoindre.
Acquérir de l'expérience
En suivant le plan de travail journalier des
écoles romaines de chant au XVIIe siècle, par exemple à la Cappella
Giulia dirigé par Virgilio Mazzocchi, nous nous rendons compte du
genre de travail qui était en amont du grand art de la vocalité.
« Les écoles de Rome obligeaient leurs élèves
à passer chaque jour une heure à chanter des choses difficiles pour
acquérir de l'expérience ; une autre à s'exercer au trille ; une
autre à la virtuosité ; une autre aux études littéraires; une encore
à travailler sous la direction du maître devant une glace pour
s'habituer à ne pas faire de mouvements incorrects du front, des
yeux, de la bouche. Tout cela constituait le travail de la matinée.
L'après-midi, ils suivaient des cours théoriques pendant une
demi-heure ; une autre demi-heure était consacrée au contrepoint sur
le plain-chant ; une au contrepoint sur une basse donnée, une à
l'étude des lettres et le reste de la journée ils travaillaient le
clavecin ou s'adonnaient à la composition de quelques psaumes,
motets ou chansons... Parfois, ils sortaient pour chanter et
entendre l'écho de leur voix à la Porte Angelica, près du Monte
Mario, pour juger eux-mêmes de leur propre façon de chanter, ou ils
participaient à la musique que l'on faisait dans toutes les églises
de Rome et écoutaient les chanteurs célèbres qui florissaient sous
le pontificat d'Urbain VIII, dont ils parlaient ensuite avec leurs
maîtres » (Giovanni Andrea Angelini Bontempi, Historia Musica,
Perugia, 1965, p. 170).
Le résultat de pareil travail ne pouvait
qu'amener des témoignages éloquents dont nous donnons ici quelques
aperçus.
Sur la base des critères de l'époque, les trois
octaves de la voix (dont on exalte la rondeur, l'homogénéité et la
douceur : « une voix ronde et sonore dans le grave et l'aigu
aussi bien que dans le médium », écrit le grand chanteur Giulio
Cesare Brancaccio au Duc de Ferrare Alfonso d'Este en décembre 1581)
et la véritable virtuosité (« les autres ne font pas
distinctement les notes, pas suffisamment pour être appelés
virtuoses » Lodovico Zacconi, Prattica di Musica, Venezia
1592), le duc de Ferrare cherche une basse (voir sa lettre du 18
juin 1589) et il veut savoir si le chanteur « a une bonne voix, à
l'émission douce, s'il chante avec goût, s'il a des dispositions à
la virtuosité, quelles qualités possèdent son aigu et son grave
».
Francesco Patrizi (Amorosa Filosofia,
1577) parlant de la grande intellectuelle et cantatrice Tarquinia
Molza (Tasso lui dédie son dialogue sur l'amour, La Molza o
dell'Amore) nous rappelle son soprano « clair, facile,
ouvert, très délicat », ainsi que la «chiara spiccatura
», la pureté de son chant virtuose «détaché». En 1628, Vincenzo
Giustiniani (Discorso sopra la musica) nous décrit les
caractéristiques de trois autres célèbres cantatrices de la cour de
Ferrare à l'époque d'Alfonso d'Este : Laura Peperara, Anna Guarini
et Livia Dell’Arco: « Elles rivalisaient non seulement quant au
métal et aux possibilités de leurs voix, mais aussi dans l'exécution
des longs passages d'ornements, faits au moment opportun et sans
excès... De plus elles pouvaient contrôler leur voix et la maîtriser
pour chanter forte ou piano, diminuant ou augmentant le volume selon
le moment, portant la voix et parfois l'interrompant d'une brève
pause, exécutant de longs traits de virtuosité avec la plus grande
précision, gruppi, intervalles étendus, trilles longs ou brefs,
traits de virtuosité très doux et chantés piano, lesquels, de façon
imprévue, faisaient entendre des échos ».
Au milieu du XVIIe siècle, Pietro Della Valle
nous découvre le chant d'une nouvelle génération d'artistes (Lettera
a Lelio Guidiccioni sopra la musica dell'età nostra, Roma 1640),
qui « exprimaient les passions de l'âme et interprétaient avec
intelligence le sens des paroles, en rendant leur voix gaie ou
triste, suave ou énergique, suivant les besoins »... Mais c'est
encore Giambattista Mancini qui nous aide dans cette recherche d'un
art du chant perdu ; il dédie un chapitre entier de son traité au
souvenir « des diverses écoles et des hommes et femmes de valeur
dont, au siècle précédent, l'art du chant était riche et dont on
trouve encore des exemples à l'heure actuelle ». Citons en
quelques-uns, dont il décrit les particularités artistiques.
« Les plus célèbres écoles qui existaient en
Italie à la fin du siècle dernier qui se sont maintenues furent
celles des Fedi à Rome, de Francesco Pistocchi à Bologne, de
Giuseppe Ferdinando Brivio à Milan, de Francesco Peli à Modène, de
Francesco Redi à Florence, de Giuseppe Amadori à Rome, ainsi que
celles de Niccolo Porpora, Leonardo Leo, Francesco Feo et Domenico
Egizio à Naples. » (Mancini, op. cit. pp. 15-16). Parmi les
chanteurs, Baldassare Ferri « possédait un chant d'une grande
variété. Il montait et descendait deux octaves sur un seul souffle,
et faisait un trille sur chaque note y compris les demi-tons, avec
la plus grande justesse » (Mancini, op. cit. p. 17). Cavalier
Matteucci, « à plus de quatre-vingts ans, avait toujours conservé
la fraîcheur de sa voix » (p. 18). Antonio Pasi, de Bologne, de
l'école de Pistocchi, « avait un bon portamento, et un excellent
chant spianato qu'il parsemait de gruppetti, volatine,
trilles, mordants, rubati ... exécutés au moment opportun et
qui lui donnaient un grand style ». (pp. 22-23). Giambattista
Minelli, lui aussi de Bologne, et de la même école, «était un
contralto qui utilisait un chant spianato et un
portamento plein de noblesse, auxquels il ajoutait un trille et
un mordant parfaits » (op. cit., p. 23).
A seize ans déjà
Chez les cantatrices, Faustina Bordoni « était
déjà, à l'âge de seize ans, en possession d'une voix d'une étonnante
souplesse et d'une agilité d'un genre particulier, très difficile...
qui lui permettait d'exécuter des traits sur six notes ou sur trois
et de donner aux notes la juste proportion et une consistance égale
tant en montant qu'en descendant, de leur donner aussi les couleurs
appropriées nécessaires à l'empâtement de chaque trait. Outre cela,
elle était habile dans tous les genres d'agilité, trilles,
mordants... avait une intonation parfaite et possédait l'art de
conserver et de reprendre son souffle. » (op. cit. pp. 31-32).
Francesca Cuzzoni, de Parme, était la grande
rivale de Faustina Bordoni. Mancini nous décrit son chant à la fois
spianato et legato, la perfection de ses ports de
voix, l'égalité de son registre... « Elle possédait l'art de
conduire la voix, de la soutenir, de l'augmenter et de la diminuer
avec une totale perfection qui lui avait valu le nom de mae-tra. Si
elle exécutait un cantabile, elle le rendait plus vivant en ajoutant
aux bons endroits et sans nuire à l'expression différents
gruppetti, des traits plus ou moins longs exécutés de façon
différente, en donnant du relief à certaines notes grâce à des
trilles et des mordants, des staccati plus ou moins accentués
avec des doubles volatine, des sauts du grave à l'aigu... Ses
aigus étaient d'une justesse sans égale... et elle possédait surtout
une grande imagination pour orner le chant avec discernement et
inventer des choses nouvelles, c'est pourquoi son chant était
sublime et rare » (op. cit. pp. 33-34).
Il y avait aussi Caterina Visconti dite la
Viscontina, dont la voix, « déjà belle au départ, avait été
rendue par l'étude encore plus pure, égale, douce, et très étendue
» (op. cit. p. 38), « Giovanna Astrua, dotée d'une voix très
agile et qui réussit, par son assiduité au travail, à vaincre les
difficultés les plus insurmontables, (op. cit. p. 38) ou
Regina Valentini, dite la Mingotti, qui, outre l'agilité qui
caractérisait les autres interprètes, possédait «l'intelligence
de l'interprétation, une grâce singulière pour phraser, déclamer,
donner à chaque passion sa couleur, et accompagner tout cela des
gestes les plus nobles et les plus naturels » (op. cit. p.
39-40).
Ce sont des chanteurs dont Mancini regrettera la
grande virtuosité lorsqu'il parlera d'un genre d'agilité abandonné à
son époque à cause de sa difficulté et du manque de travail constant
et assidu sur la voix : l'agilitàmartellata « qui
consiste en un saut descendant ou ascendant suivi de plusieurs
répétitions de la deuxième note exécutées de façon percutante »
; pour cela il faut « une voix très agile, des aptitudes
particulières à cet exercice, et un travail incessant pour surmonter
les difficultés. » (op. cit. p. 201). Les derniers furent
Faustina Bordoni, Agostino Fontana, élève d'Antonio Pasi, et la
Viscontina. •