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Nr.0681

An Marg. Guillot

Paris, 5 Août 1857.

On me pousse à aller prendre les eaux de ce je ne sais où: à Saint-Pierre d'Allevard près de Grenoble; on voudrait me faire partir à la fin de la semaine, car la saison s'avance.

Quelle peine pour moi de passer à Lyon sans vous voir, si la chose se fait! En tout cas, si je puis m'y arrêter quelques heures et prendre une voiture pour aller incognito vous dire un bonjour, samedi matin prochain, j'arriverai à Lyon à 8 h. 45 ou à 10 h. 15 à Vaise, je le ferai; mais c'est douteux. Je ferai tout mon possible pour vous voir en revenant.

Ce qui détermine les eaux, c'est que mon rhumatisme est monté à l'estomac et il me fait tousser. Enfin la grâce de Dieu. Si je ne pars pas cette semaine, je vous l'écrirai. Pauvre Marguerite! La voilà donc encore sur la croix, hélas! hélas! Je vais vite dire vos messes.

Croyez-moi toujours en Notre-Seigneur, chère fille,

Tout à vous en Notre-Seigneur.

EYMARD.


Nr.0682

An Frau v. Grandville

Tout pour l'amour de Jésus-Hostie.

Paris, 5 Août 1857.

MADAME ET BIEN CHERE FILLE EN N.-S.,

Je ne savais vraiment que penser de votre si long silence, je vous croyais malade; enfin tout va bien, Dieu en soit béni! Je comprends que dans un déménagement on a bien de l'ouvrage.

Je vois avec plaisir que vous avez été fidèle à la sainte Communion, voilà pour vous votre planche de salut. Tant que vous vous nourrirez de Jésus-Christ, le démon ne vous fera aucun mal, vous serez forte et bien gardée. Oh! de grâce, ne vous en éloignez pas, même par un sentiment d'humilité, encore moins par une crainte d'avoir péché. Vous savez ce que je vous ai dit là-dessus: péché douteux, péché nul.

Eussiez-vous fait quelque faute vénielle, il vaut mieux encore aller la purifier dans le feu de la divine Eucharistie.

Ne gardez pas Lord Byron et Locke: ce sont des ouvrages qui ne peuvent faire aucun bien à l'âme, au contraire; on reproche à Locke de n'être pas assez chrétien dans ses démonstrations et même d'avoir des erreurs.

Je pars demain pour les eaux minérales de Saint-Pierre d'Allevard (Isère); si vous avez besoin de moi, vous pourrez m'y écrire. De là j'espère aller à la Salette. je prierai pour vous spécialement et votre excellente soeur.

Tout à vous en N.-S.

EYMARD, Sup.

P.-S. Les procès-verbaux ne sont pas encore arrivés; à plus tard.


Nr.0683

An Fräul. Danion

Tout pour l'amour de Jésus-Hostie.

Paris, 114, rue d'Enfer, le 9 Août 1857.

BIEN CHERE SOEUR EN N.-S.,

Quelle heureuse surprise à la lecture de votre lettre! comme j'ai remercié le bon Sauveur de vous l'avoir inspirée!... J'avais demandé de vos nouvelles à la soeur... qui est sortie, j'oublie son nom, celle qui accompagnait la mère... et elle m'avait dit que Dieu vous bénissait; nous avons parlé de vous avec Mme d'Hareny, qui était ici il y a peu de temps. Elle a été heureuse de vos nouvelles. Eh bien! bonne soeur! que de choses depuis Lyon! moi ici travaillant à l'oeuvre eucharistique, et vous dans votre pays et Dieu vous bénissant.

Nous sommes quatre prêtres et deux frères; nous avons l'exposition du Très Saint Sacrement quatre fois par semaine et trois nuits.

Le dimanche, le mardi, le jeudi et le vendredi, quels jours délicieux! quelles heureuses nuits! Dieu seul le sait!

Nous avons la permission pour l'exposition perpétuelle, mais nous attendons pour cela que Jésus nous envoie quelques bonnes vocations eucharistiques.

On fait les trois voeux religieux.

J'ai aussi la pensée d'établir une branche d'adoratrices... Déjà il y a quatre excellentes personnes qui demeurent près de nous et partagent nos exercices; mais, pour les organiser et les dessiner, j'attends le moment et la lumière de Dieu; ce seront des matériaux entre ses mains.

Nous ne nous voyons plus avec la Mère Marie-Thérèse; elle a conçu quelques sentiments de crainte, je n'ose pas dire d'opposition. Je prie pour elle et pour sa belle oeuvre, et voilà tout; car, pourvu que Jésus soit glorifié, aimé et servi dans son adorable Sacrement, que m'importent les sentiments humains? Mais j'en remercie Dieu, nous en sommes plus libres. Dieu la bénit aussi, je vous le dirai plus tard.

J'attends à Saint-Pierre d'Allevard (Isère), où je vais prendre les eaux, votre réponse; là, j'aurai bien le temps de vous lire et de vous écrire.

Je pars demain, et de là j'irai, après trois semaines, à la Salette, puis je reviendrai ici. Excusez-moi d'être si pressé. Priez bien pour celui qui vous est bien uni en N.-S.

EYMARD, Sup.

P.-S. Vous me direz bien ce que vous m'avez fait espérer, et je vous dirai ce que vous désirez savoir.


Nr.0684

An Marg. Guillot

Tout pour l'amour de Jésus-Hostie.

Allevard (Isère), Hôtel des Bains, le 14 Août 1857.

Chère fille,

Je suis passé à Lyon mardi matin à 6 heures. J'ai dit la sainte Messe à Aynay pour vous; je n'ai pu que vous bénir de loin avec le regret de ne pouvoir monter jusque chez vous. Le temps me manquait, car je n'avais devant moi que deux heures. J'ai bien hésité si je ne laisserais pas la sainte Messe pour aller vous voir; mais il m'aurait fallu rester huit heures à Lyon et je ne voulais être vu de personne. Cela a été pour moi un grand sacrifice. Me voici à Allevard pour un commencement de catarrhe; on a voulu que j'y vienne: je m'y suis rendu afin de pouvoir travailler et souffrir plus longtemps au service eucharistique de Jésus.

Je ne sais encore ce que me feront les eaux, mais jusqu'à présent, cela ne va pas mal; vous comprenez combien mon âme souffre loin de ce tabernacle d'amour et de sentir mes confrères seuls! à la grâce de Dieu.

Nous avons ici..... et je le trouve bien. S'il était chrétien, il serait très bon en peu de temps: il a une âme droite. Donnez-moi de vos nouvelles, chère fille, et de toutes vos soeurs.

Je n'ai encore rien dit à ma soeur. Elle ne me sait pas si près d'elle; j'irai la voir deux jours; et, de là, à la Salette, un jour; puis je reviendrai à mon poste d'honneur.

Tout à vous en Notre-Seigneur.

EYMARD.


Nr.0685

An Frau Gourd

Tout pour l'amour de Jésus-Hostie.

A l'Hôtel des bains, Allevard (Isère), 14 Août 1857.

Me voici, chère fille, à Allevard; je croyais bien vous y trouver et m'en faisais une joie en Notre-Seigneur; ce bon Maître ne l'a pas voulu, qu'Il en soit béni! Nous nous voyons tous les jours avec Mr Gourd, il va bien et je crois que les eaux lui feront du bien; je l'aime beaucoup, votre bon mari, et je voudrais bien que le Bon Dieu me fît la grâce de lui faire du bien à son âme. C'est une nature droite et honnête. Ayons confiance, Dieu nous exaucera; mais je voudrais vous voir jouir un peu de cette grâce.

J'ai vu en intimité Mr le Dr Brémont; il m'a dit que la maladie de ramollissement du cerveau et ses suites n'existait pas chez vous, mais que vous aviez besoin de tonique; que ce que vous aviez éprouvé était une suite de faiblesse, de privation de sommeil, de trop grands soucis. Voilà qui va à merveille; aussi faut-il, chère fille, que vous observiez la prescription du sommeil, de nourriture, de repos comme un remède nécessaire; observez avec cela les trois grandes vertus que le Bon Dieu demande de vous à tout instant, et vous serez dans l'accomplissement habituel de la sainte Volonté de Dieu. Je ne vous dis rien de moi, car il n'y a que trois jours que je suis ici. Donnez-moi de vos nouvelles.

Tout à vous en N.-S.

EYMARD.

Madame Gourd.


Nr.0686

An Marianne Eymard

Tout pour l'amour de Jésus-Hostie.

Allevard, hôtel des Bains (Isère), le 14 Août 1857.

BIEN CHERES SOEURS,

Me voici près de vous, depuis trois jours. Je suis venu prendre les eaux d'Allevard pour une affection catarrhale. J'avais été bien soulagé aux eaux du Mont-Dore, il y a deux ans; j'ai pensé changer cette année pour être plus près de vous et aller vous voir, car sans ce traitement des eaux, je n'aurais pu aller vous voir, étant très occupé à Paris, et puis aussi à cause de l'exemple pour les autres religieux.

Ainsi le Bon Dieu a ménagé les deux choses. Je ne pourrai aller vous voir qu'au commencement de septembre, le traitement des eaux est d'ordinaire de trois à quatre semaines.

Je vais bien, d'ailleurs. Ayez la bonté de présenter mes amitiés au bon Mr le Curé que je serai heureux d'embrasser, et à Mr Faure si vous le voyez avant moi; j'aurai bien voulu savoir son adresse.

A bientôt, chères soeurs.

Tout à vous en N.-S.

Votre frère.

EYMARD, S. S. S.


Nr.0687

An Marg. Guillot

Tout pour l'amour de Jésus-Hostie.

Allevard (Isère), 22 Août 1857.

Bien chère fille en Notre-Seigneur,

Votre lettre m'a jeté dans une grande perplexité.

Est-ce le bon Dieu qui veut encore de vous ce sacrifice et surtout après tant d'agonies? Si vous pouvez vous en délivrer, faites-le. Quand on a la grâce de Dieu, on a pour soi le succès.

Le retrait de Mlle de R. est une bonne leçon; elle montrera que l'on s'appuie sur un roseau brisé, lorsqu'on veut s'appuyer sur les grandeurs humaines.

Si vous ne pouvez vous libérer de cette lourde charge, acceptez-la pour un temps déterminé, un an par exemple; ce que je dis là n'est pas pour vous obliger, non; car à votre place, j'opposerais à la première proposition officielle une réponse négative, puis je verrais. Qui sait si le choix de Mlle Utinet, de Mlle Camus, ne ferait pas bien? On ne ferait du moins l'essai.

D'un autre côté, je serais aise de vous voir encore un peu de temps Rectrice pour mettre les Règles du nouveau Manuel en activité; je m'imagine qu'il y aura besoin de bien des explications, d'une grande expérience, mais aussi une fois le Manuel reçu, il faut y tenir sévèrement. Votre acceptation temporaire, pauvre fille, et déterminée, ne vous nuira pas pour la grande pensée eucharistique. Je vous en dédommagerai en attendant.

Il me tarde d'être à Paris pour vous caser les vieillards.

Ecrivez-moi ici jusqu'à lundi de l'autre semaine; vos lettres me sont de bonnes et consolantes visites.

Tout à vous en Notre-Seigneur.

EYD.

P. S. - Les eaux m'éprouvent un peu, mais passent bien.


Nr.0688

An Frau Spazzier

Allevard, 24 août 1857

Tout pour l'honneur et la gloire de Jésus-Hostie

Chère fille en N.S.

Votre lettre est venue me faire une petite visite; j'en suis content - d'abord je vois que N.S. vous fait bien des grâces - jamais je ne vous ai trouvée mieux, qu'il en soit béni!

Aussi voilà donc une chose bien arrêtée: 1 vous irez toujours au bon Dieu avec votre âme d'artiste, c'est bien le mot, et c'est une charmante idée très juste, on va au bon Dieu comme il nous a fait et selon son état - Oui - soyez l'artiste du bon Dieu, ramassez tout et le lui offrez.

J'aime et j'approuve bien votre manière de faire oraison, d'ailleurs ce serait en vain que vous voudriez faire autrement, vous ne le pourriez pas - il faut aller à Dieu par le chemin qu'il nous ouvre dans le mode. Celui de votre misère et de votre reconnaissance est très beau, et très sûr, continuez-le jusqu'à ce qu'il plaise à Dieu de vous le changer.

Le voisinage eucharistique vous fait du bien - jouissez-en bien - mais cette perspective de vie de règle qui en ce moment est impossible, peut se changer en réalité bien facile, l'essentiel c'est que ce que je vous disais soit réglé et que la communauté existe, priez donc bien pour en hâter la grâce.

Les eaux sont bonnes, elles m'éprouvent en bien - j'y resterai encore une 15e.

Que Jésus soit votre tout.

Tout à vous en N.S.

Eymard SSS


Nr.0689

An Frau Jordan

Tout pour l'amour et la gloire de Jésus-Hostie.

Allevard (Isère), 24 Août 1857.

CHERE MADAME,

Nous sommes bien aux deux extrémités de la France, vous à Thouville et moi près de la Savoie. Je suis ici depuis une dizaine de jours pour un catarrhe, dit-on; je ne sens pas encore bien l'effet des eaux: on dit que ce n'est qu'après qu'on en sent le bienfait. Quelle vie que celle des baigneurs! On est encore bien heureux quand on peut y rencontrer quelques belles âmes avec qui l'on puisse parler de Dieu; c'est ce qui m'est arrivé. Que n'êtes-vous ici! je vous préférerais bien, car nos âmes se sont rencontrées en Dieu.

Je vais rester ici encore une douzaine de jours, puis j'irai dire un bonjour à ma soeur et je retournerai vers mon divin et tout aimable Tabernacle.

J'espère rencontrer à Grenoble Mr Giraud et lui dire un bonjour. Je vous saluerai de loin, bonne dame, car je compte rentrer à Paris vers le 10 septembre.

Mes affectueux hommages à votre chère fille.

Tout à vous en N.-S.

EYMARD, S. S. S.


Nr.0690

An Fräul. Danion

Tout pour l'amour et la gloire de Jésus-Hostie.

Allevard (Isère), 24 Août 1857.

BIEN CHERE SOEUR EN N.-S.,

J'ai pris trois jours avant de vous répondre à votre derniers lettre, et vous le comprenez; avant d'écrire une décision si importante il faut consulter Dieu et se dépouiller de soi.

Voici donc ma réponse: Je suis tout disposé à travailler, en union avec vous, à l'amour et à la gloire de Notre-Seigneur Jésus-Christ en son divin Sacrement. Vos pensées sont mes pensées, vos désirs sont mes désirs; c'est pour le service et le règne de la divine Eucharistie que j'ai fait tant de sacrifices et qu'avec sa sainte grâce je suis disposé à en faire encore de plus grands.

Pour en venir à notre projet d'un Tiers-Ordre, c'était aussi ma pensée, et sur les mêmes bases. J'ai été tout surpris, en lisant le règlement (que j'ai lu avant votre lettre), d'y trouver presque le mot-à-mot de mon essai. J'en ai donc bien béni Dieu. Notre connaissance et reconnaissance aboutirait donc à associer nos travaux et nos sacrifices au service eucharistique de Jésus: qu'il en soit béni!

Voici quel était mon plan: Outre la branche des hommes, de former aussi celle des femmes adoratrices; de former une congrégation de femmes réunies et vivant en communauté, sans bruit, partageant, en attendant leur organisation, nos services publics, vivant selon la même règle; ce que, dans votre pensée, on pourrait appeler un Tiers-Ordre régulier du Très Saint Sacrement.

Puis je voudrais avoir un Tiers-Ordre séculier, nuancé selon les diverses vocations: ainsi le Tiers-Ordre pour les prêtres séculiers, - pour les hommes, - pour les jeunes gens. - Déjà plusieurs prêtres me l'ont demandé; et par le moyen du Tiers-Ordre, on formerait des âmes d'élite pour former des adorateurs dans le monde.

J'aime bien votre projet du Tiers-Ordre. Permettez-moi quelques réflexions.

A l'art. 1er du titre 1er, n· 1, - je préférerais la rédaction du titre II; art. 1er: "La fin du Tiers-Ordre est: 1· de procurer la sanctification de ses membres par la dévotion au Très Saint Sacrement; 2· de se dévouer tout entier à la gloire de Jésus-Christ dans l'adorable Eucharistie."

Puis faire suivre le 1· et le 2· de l'explication que vous me donnez.

La fin que nous nous proposons dans notre petite société, c'est d'honorer Notre-Seigneur Jésus-Christ au Très Saint Sacrement par les quatre fins du Sacrifice: l'adoration, l'action de grâces, la réparation et la supplication - ou mission perpétuelle de la prière. Nous prenons tout le Saint Sacrement. C'est ce qui a fait que je n'ai pu accepter l'idée seule de la réparation de la rue des Ursulines, et la vie exclusivement contemplative. Nous, nous voulons non seulement adorer, servir, aimer Jésus-Eucharistie, mais surtout le faire connaître, adorer, servir et aimer de tous les coeurs. Les oeuvres du 4· sont les mêmes que les nôtres, seulement nous y ajoutons les retraites eucharistiques.

A l'art. III du 1er titre, - il est évident qu'il faudrait retrancher le 1er pour les personnes mariées.

Art. IV du IIe titre: Réciter tous les jours le Miserere. - Ne vaudrait-il pas mieux donner une pratique positive, comme le Tantum ergo et une amende honorable au Très Saint Sacrement, faite selon l'esprit de l'Institut?

Art. VIII. - "Si l'adoration diurne et nocturne n'est pas établie dans la paroisse, elles feront partie de la fraternité du Tiers-Ordre la plus rapprochée."

Il me semble que dans la rédaction il faudrait quelques articles pour l'organisation d'une fraternité, - c'est-à-dire, pour une classe de Tierçaires; - mais la chose est facile dès qu'on a les matériaux.

Pour l'invocation Laus et gratiarum actio, nous avons choisi celle-ci: Laudemus et adoremus in aeternum - Sanctissimum Sacramentum; d'abord parce qu'elle est reçue à Paris; et puis elle est plus harmonieuse que l'autre. Il est vrai, elle n'a pas d'indulgence; mais on peut la changer.

Je garde votre projet, je vous envoie la bonne et pieuse lettre de votre vénérable Evêque.

Je suis encore ici pour une douzaine de jours; je serais aise d'y recevoir encore un mot de vous. D'ici j'irai à la Salette, puis à Paris. Priez bien que la sainte Volonté de Dieu se fasse en nous.

Tout à vous en N.-S.

EYMARD, S.


Nr.0691

An P. de Cuers

Tout pour l'amour de Jésus Hostie.

Allevard, 29 Août 1857

Bien cher Père,

Merci de votre bonne lettre, je commençais à languir; combien je remercie le Bon Dieu de vous savoir tous fidèles au poste d'honneur et près de notre Bon Maître! Quelle vie que celle que l'on mène aux eaux! il faut bien que la pensée d'être plus utile me soutienne ici!

Je suis heureux de savoir le bon Père Marie-Augustin avec vous, mais je suis surpris que vous me parliez déjà de son départ; il me semble qu'il serait si bien au pied du trône eucharistique. Quant aux aumônes et autre argent pour lui, je n'ai reçu que les 400 fr. de Mr de la Bouillerie et puisque la divine Providence nous a envoyé par sa charité 500 fr. et que le bon Père nous a dit de nous en servir, je n'ai à lui rendre que [de] bien affectueuses actions de grâces.

Parlez avec le bon Père de la maison et du clos. Je crois vraiment que Dieu dispose tout pour nous fixer là où il nous a bénis.

Le bon Père doit tenir à cette chapelle qui a [de] si touchants souvenirs et qui sait si elle ne sera pas la source de bien plus précieuses grâces.

Les eaux m'éprouvent un peu, on dit que c'est là leur effet naturel; je suis las, je dors peu, d'un autre côté la poitrine va mieux, on m'a ausculté et on n'a trouvé que de la fatigue.

Soyez sûr que je prends les eaux en conscience, je fais bien comme vous le dites, je ne fais rien autre chose que de prendre les eaux, manger et dormir.

Mes amitiés aux bons Pères et frères, mes respects aux soeurs.

Tout à vous en N. S.

EYMARD.

P. S. S. S.

P. S - J'ai ici un Ordo romain, merci.


Nr.0692

An P. de Cuers

Grenoble, 2 Septembre 1857

Bien cher confrère,

Je voulais vous écrire d'Allevard, j'avais même commencé ma lettre, je ne sais comment je ne vous ai pas écrit plus tôt: cette vie des eaux est si stupéfiante, puis sans être malade j'étais éprouvé par les eaux, ne dormant pas, faisant peu d'exercice à cause de la lassitude des jambes; bref, tout le monde me dit que c'est bon signe; il me semble bien en effet que ma poitrine respire mieux. Me voici arrivé à Grenoble et je vais partir dans quelques heures pour la Mure d'Isère, j'ai besoin de me reposer un peu, dormir et me calmer; ce sera l'affaire de six à sept jours, et, à la fin de la semaine prochaine, j'espère vous embrasser et vous raconter les belles épisodes de mon voyage.

Pour la maison de la rue Cérisay, vraiment si l'archevêché nous laissait là, je la regretterais, une pensée m'y pousse, c'est notre pensée première de ne point faire de dettes, là nous n'en aurions pas pour ainsi dire: 70.000 fr. dont nous n'aurions à payer dans cinq mois que 35.000 et ayant toute latitude pour le reste; nous garderions en attendant la maison où nous sommes, et qui sait si plus tard nous n'aurions pas besoin des deux.

Je vous prie de voir Mr Meignin notaire, rue S. Honoré 316, je crois, et de lui demander où en sont les choses; et s'il n'y a plus espérance, achetons cette petite maison.

Voyez, si vous le jugez sage, Mr Lergarde pour savoir de lui si les conditions que je lui avais posées seront acceptées. En tout événement, je vous envoie ci-inclus une lettre pour Mr Barrau, lisez-la, et si vous croyez que la chose soit faisable et providentielle, envoyez-la ou plutôt portez-la à Mr Barrau, peut-être le Bon Dieu veut-il que nous commencions petitement.

Je vous assure que quand je pense à ces 300.000 fr. de dettes, j'en suis épouvanté, car je ne trouve aucune issue naturelle. Quelle agonie! Dieu est notre Père, Jésus notre Roi, il n'abandonnera pas ses serviteurs.

Ecrivez-moi à la Mure d'Isère et excusez-moi de vous avoir laissé sans lettres.

Je vous embrasse tous in osculo sancto.

Tout à vous en J. C.

EYMARD S. S. S.


Nr.0693

An Herrn Barrau

Tout pour l'amour de Jésus Hostie.

Grenoble, 2 Septembre 1857.

Cher Monsieur Barrau,

Je suis vivement touché de votre bon vouloir pour nous et pour notre petite Société.

Je crois que c'est la divine Providence qui ménage ce secours et que vous en serez la main bienfaisante.

Je vous prie donc, cher Monsieur, de prier Mr Chauveau, avoué, de prendre pour nous la propriété de la rue Cérisay moyennant 70.000 fr., à condition que 35.000 fr. nous seraient laissés.

J'ai pensé m'adresser directement à vous, dans l'espérance que la chose serait plus tôt arrangée. Dans la crainte de manquer le courrier, je me hâte de vous présenter mes vifs sentiments de gratitude et j'ai l'honneur d'être,

Cher Monsieur,

Votre tout dévoué et bien reconnaissant serv.

L'abbé,

EYMARD,

Supérieur des relig. du T. S. S.

Monsieur Barrau,

cloître des Bernardines, N. 14.


Nr.0694

An Marg.Guillot

La Mure, 15 Septembre 1857.

Chère fille,

Je pars demain d'ici. Je serai à Lyon jeudi soir à 6 h; Mlle du Rousset doit venir me prendre à la gare de Perrache avec une voiture; je lui dis que je veux vous voir pour des affaires.... et cela chez Mr Gaudioz où j'irai vous voir en arrivant; et là, s'il y a possibilité de vous revoir le lendemain, nous le combinerions. Je vais bien. Mes soeurs vous remercient bien.

Je n'ai pu vous répondre; j'ai été absorbé par mille choses et visites; excusez-moi.

J'ai bien prié pour vous toutes à la Salette et au Laus.

Tout à vous en Notre-Seigneur.

EYD.

Mademoiselle Guillot M.,

17, Rue du Juge de Paix,

Fourvière, Lyon. Rhône.


Nr.0695

An P. Carrié,

Tout pour l'amour de Jésus-Hostie

Paris, rue d'Enfer 114, le 23 septembre 1857

Cher Monsieur,

J'ai lu avec beaucoup d'intérêt votre lettre du 17 courant, par laquelle vous m'exprimez le désir de venir partager notre vie d'adoration en devenant membre de notre petite Société.

C'est avec plaisir, cher Monsieur, que je consens à vous recevoir au nombre de nos enfants. L'avis et le conseil du bon Monsieur Brunello me suffisent pour croire à votre vocation eucharistique. Seulement, cher Monsieur, vous savez que nous commençons, et en venant, il faut vous attendre à partager les épreuves nécessaires d'une première fondation. Mais aussi aurez-vous la première grâce; nous tacherons de vous faire commencer et hâter vos études latines.

Vous pouvez venir de suite, vous serez reçu comme un frère. Le P. de Cuers vous donne déjà ce nom (vieux entre nous deux), apportez une bonne volonté: voilà le vrai adorateur que Jésus cherche et appelle.

Mes bien affectueux et dévoués souvenirs au bon M. Brunello, que nos affectionnons de tout notre coeur et que nous regardons comme nôtre.

Je vous suis, en N.S., cher Monsieur, votre tout affectionné serviteur

Eymard Sup.


Nr.0696

An Fräul. Danion

Tout pour l'amour et la gloire de Jésus-Hostie.

Paris, le 27 Septembre 1857.

BIEN CHERE SOEUR,

Je viens de la Salette, voilà la raison de mon retard.

Je viens de lire vos lettres, et voici ma réponse.

1· J'aime beaucoup l'Ordre des Carmes, et tout ce qui touche à la Très Sainte Vierge; mais j'ai une grande répugnance pour toute fusion, du moins tant que le Bon Dieu ne nous a pas montré en cela sa sainte Volonté. - On m'a proposé plusieurs fusions, et je n'ai pas voulu, avec cette seule pensée: la divine Eucharistie est assez grande, assez puissante pour se suffire; tout doit sortir d'Elle et revenir à Elle; son esprit doit être UN, et sortir de ce coeur divin. - Sa règle, ses oeuvres, ses moyens, tout est dans l'adorable Hostie.

Plût à Dieu que nous fussions assez saints et embrasés d'amour pour la voir et la lire dans Jésus-Christ Eucharistie!

2· Je vais m'occuper, dans tous mes moments libres, à rédiger mes notes sur le Tiers-Ordre. Plusieurs prêtres l'attendent, et je comprends mieux que jamais que ranimer, alimenter et perfectionner l'esprit et la dévotion eucharistique dans les prêtres, c'est là l'oeuvre par excellence et la plus excellente de toutes. Jésus peut tout; s'il lui plaît de choisir de si pauvres instruments, c'est qu'il veut en avoir toute la gloire.

J'ai trouvé en arrivant ici le démon furieux contre notre petite oeuvre. - Que Dieu se lève et combatte pour sa gloire! Oui, ma chère soeur, c'est par la croix qu'il faut fonder, et par le sacrifice qu'il faut servir Jésus-Hostie.

Avant mon départ, tout allait à merveille, on allait acheter une maison, l'argent se présentait, etc., des sujets s'animaient à l'oeuvre si belle, mes confrères se portaient bien. Tout est changé, tout est souffrant; que Dieu en soit béni!

Si nous avions besoin de nous entendre de plus près, ne pourriez-vous pas venir passer quelques jours à Paris?

Que Dieu est bon de nous avoir fait travailler ensemble à Lyon, pour nous unir peut-être pour sa gloire et son règne eucharistique!

Tout à vous en N.-S.

EYMARD, S.

Mademoiselle Virginie Danion,

à Mauron (Morbihan).


Nr.0697

An Hochwürden Bouix

Paris, 114 rue d'Enfer, le 29 septembre 1857

Monsieur,

Permettez-moi de venir fondre /joindre/ mes hommages bien sincères, à tous ceux que vous avez reçus pour vos 2 volumes sur le droit des Réguliers. Jamais je n'aurais cru cette science si profonde et si belle. Merci, Monsieur, vous avez rendu un grand service à la vie religieuse, ce que vous avez fait vaut toute une vie.

J'ai cherché une question qui vous paraîtra peut-être absurde, cependant elle m'a été faite et j'ose vous la soumettre.

1· Une Congrégation de religieux peut-elle faire ses offices dans la même église avec des religieuses de la même vocation?

Si la Congrégation de la Réparation de la rue des Ursulines avait aussi une branche de religieux réparateurs, les religieuses pourraient-elles réciter l'office divin avec les religieux dans leur église publique ouverte à tous? partager leurs adorations?

2· Pourraient-elles habiter près de la même église, toutes les séparations et précautions morales prises?

3· Les religieuses pourraient-elles avoir un choeur séparé dans la même église et y faire l'adoration nocturne?

Je vous serais très reconnaissant si vous vouliez avoir la bonté de m'éclairer sur ces diverses questions et me dire s'il y a quelques décisions. Vous savez que les Picpus sont à côté de leurs Soeurs.

Daignez accepter d'avance ma bien vive reconnaissance et me croire en N. S. J. C., Monsieur,

votre tout dévoué serv.

L'abbé Eymard.

Nota: L'abbé Bouix envoya cette lettre à Mère MARIE-THERESE, Fondatrice de la Réparation.


Nr.0698

An Marg.Guillot

Paris, 1er Octobre 1857.

Soyez bien tranquille sur tout. Je vous écrirai une autre fois sur moi; je vais bien.

Mais faites-moi une neuvaine au Sacré-Coeur de Jésus et par ses saints abandonnements; j'ai trouvé des croix qui, j'espère, tourneront à la gloire de Dieu, ou seront la preuve que Dieu ne veut pas notre Oeuvre.


Nr.0699

An Marg. Guillot

Tout pour l'amour de Jésus-Hostie.

Paris, 3 Octobre 1857.

Chère fille,

Quelle lettre de vous ce matin! mon coeur en bat encore d'étonnement.

Tous ces jours-ci je disais au bon Dieu: Mon Dieu, donnez-moi pour aide un Père Champion, et voilà votre lettre!... Oh oui, je le recevrai comme un frère et un tendre ami; je n'ai pas oublié l'année d'épreuve qu'il a prise. Je vois sans doute bien des tribulations, mais si Dieu le veut tout passe: la grâce est si grande! Je pense que vous avez reçu ma lettre sur.... ils sont bien et ne souffrent pas, ils ont de bons amis.

Si Dieu nous donne le P. C., je suis content de toutes nos épreuves: il en est le fruit béni.

Je n'ai que le temps de me dire

Tout à vous en Jésus-Christ.

EYD.


Nr.0700

An P. Carrié

Tout pour la gloire et l'amour de Jésus-Hostie

Paris 5 octobre 1857

Cher Monsieur,

Je viens non vous consoler au milieu de vos peines, mais vous dire: ayez confiance, votre vocation devient bonne, puisque Dieu l'éprouve. Rappelez-vous que pour suivre J-Ch., il faut voir toute la nature se révolter et se désespérer. - Si vous alliez à la fortune, à la gloire de ce monde, si vous deviez contracter la plus noble et la plus riche alliance, personne ne vous trouverait déraisonnable de quitter votre pays, votre famille, pour un si bel avenir: voilà la loi du monde.

Or, cher Monsieur, considérez la bonté et la grandeur du roi que vous voulez servir, la faveur qu'il vous accorde, la belle part qu'il vous réserve, et vous direz: c'est trop d'honneur et de bonheur pour moi.

Vos parents ne vous perdront pas, vous pourrez les voir, nous ne sommes pas cloîtrés. Puis vous aurez un temps de probation durant lequel vous ferez l'essai de notre vie eucharistique.

Soyez persuadé, cher Monsieur, que vos parents n'y perdront rien; Jésus leur rendra le centuple.

En venant, apportez tous vos objets personnels, linge, habits, quelques serviettes et quelques draps de lit, s'il est possible; nous vous donnerons le reste. - Apportez aussi vos livres, mais surtout, venez avec joie et confiance en la st. maison du Seigneur et vous verrez combien il est doux de le servir. - Venez le plut tôt que vous pourrez, vous serez reçu comme un frère bien aimé. Ecrivez-moi le jour de votre arrivée.

Mille amitiés au bon M. Brunello. Tout à vous en N.S.

Eymard Sup.


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