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MAFIA ou MAFIE

 

La Mafia italienne est un phénomène complexe et en évolution continuelle. Un phénomène dont le développement est toujours en relation avec la modification de la société et du comportement répressif de l’État ; certainement liée à un territoire bien délimité et à un certain nombre de conditions sociales et historiques spécifiques, dans les derniers décennies la Mafia a trouvé la manière de répandre ses branches bien au de là du berceau où elle est née, de telle façon qui n’est pas inutile se demander si on peut tout simplement parler de Mafia tout court, ou bien s’il faut, au contraire, distinguer plusieurs manifestations du problème, plusieurs « Mafie ».

A la conclusion de cet étude sur la répression, donc, je vais ajouter une analyse un peu plus spécifique des différents types d’association mafieuse qui on peut repérer sur le territoire italien.

En fait on peut dire en ligne tout à fait générale qui existent en Italie au moins quatre types de mafia (mais en réalité cinq) qui se partagent l’influence sur la presque totalité du Midi Italien et qui ont déjà implanté de ramifications dans plusieurs Régions du Nord et à l’Étranger : toutes ces « mafie » ont, certes, des caractères en partie communs, mais ça n’empêche pas de envisager des caractéristiques spécifiques de chaque groupe qui le rendent différent par rapport aux autres. C’est pour cela que je vais aborder une descriptions très rapide des différents groupes mafieux, qui nous éclaircira sur la localisation, l’histoire, sur l’organisation interne et sur les activités de chaque mafia.

 

COSA NOSTRA

 

« Cosa Nostra » est l’organisation mafieuse plus importante d’Europe et entre les plus importantes du Monde. Les associés sont calculés dans le nombre de 5000, mais ceux qui aident les associés sans devenir partie de l’organisation sont environ 20000. Palermo, Trapani, Marsala, Catania et Agrigento sont les principaux fiefs de l’organisation, qui tout de même est répandue aujourd’hui aussi aux États Unis, au Canada, en Allemagne, en France, en Suisse, en Russie et dans le Royaume Uni.

Cosa Nostra exerce en Sicile des fonctions de souveraineté imposant une propre fiscalité illégale généralisée dite « pizzo ». Les origines remontent au début du XIX siècle dans les campagnes de l’Ouest de la Sicile ou elle s’organise en plusieurs sectes (cosche), mais déjà en 1837 on a des témoignages de corruption de fonctionnaires publics.

Les principales activités illicites dont s’occupe Cosa Nostra sont le trafic international de drogue (domaine dans lequel l’organisation est considérée l’intermédiaire le plus fiable à niveau international), blanchiment, extorsion, spéculations financières et immobilières, trafic d’armes et enfin (très important) stockage de déchets solides urbains et industriels.

La structure de Cosa Nostra est hiérarchique et paramilitaire, avec de strictes règles de comportement. Au sommet il y a la Cupola, la commission suprême composé par les Chefs de Mandement ; descendent dans l’échelle on trouve l’organisation territoriale des Mandements qui sont contrôlés par des Familles.

La Famille, bien entendu, n’a rien à voir avec des liens de parenté mais est le group mafieux qui contrôle une ville ou un quartier d’une grande ville : le Chef de Famille doit nommer un Sous-Chef, les Conseillers et les Chefs de Dizaine qui sont chargés de coordonner les Hommes d’Honneur, c’est à dire les affiliés. Dans l’association on ne peut rentrer que pour cooptation et après un rite d’initiation qui consiste en prononcer un serment en se faisant brûler l’image d’un saint sur une main[1].

 Actuellement les chefs de la Cupola sont les Corleonesi, un des groupes les plus violents de Cosa Nostra (les mafieux de Palermo les appellent « i viddani », c’est à dire les « vilains », pour leurs méthodes sans scrupules) : Salvatore (Totò) Riina, Giovanni Brusca  Bernardo Provenzano et Leoluca Bagarella sont les plus importants chefs de l’organisation dans les années ’90, responsables de la mort des juges Falcone et Borsellino[2].

 

STIDDA

La Stidda est la plus méconnue des Mafie italiennes ; en fait la partition traditionnelle du phénomène de la Mafia en quatre grandes associations ne la considère pas, peut être parce que est la plus récente : on a eu connaissance de son existence seulement en 1989 pendent l’interrogatoire du procureur Falcone au repenti Francesco Marino Mannoia.

Née en province de Agrigento et ramifiée désormais aussi à Caltanissetta on croit qu’elle a décidé et réalisé l’assassinat du juge Rosario Livatino.

Son organisation n’est pas centralisé, n’existent pas des Commissions et on ne sait même pas qui sont les chefs de l’association : on sait au contraire que les rapports avec Cosa Nostra sont assez incertains car parfois les affiliés de la Stidda ont conclus des accords avec des Familles, parfois les ont contrastées avec les armes ; plusieurs hommes d’honneur de Cosa Nostra qui n’ont pas accepté le diktat de Totò Riina sur la guerre à l’État sont devenus des affiliés de la Stidda.

 

‘NDRANGHETA

« Elle est invisible comme l’autre coté de la Lune » : c’est la définition donné pour la ‘Ndrangheta par le Procureur de l’Etat de Tampa (Florida), Julie Tingwall.

Née en Calabria, aujourd’hui dispose d’un réseau d’affiliés installé en Liguria, Emilia Romagna, Piemonte, Lombardia, Veneto, Valle d’Aosta et au delà des frontières italiennes en France, Allemagne, Russie, ex-Jugoslavie, Suisse, Bulgarie, Bolivie, Etats Unis, Canada et Australie. Il y a quelques années on doutait de son existence en tant que association, mais après une enquête de la D.I.A.[3] on a découvert une organisation composé de 155 « cosche » et 6000 affiliés. Rapports étroits avec plusieurs hommes politiques et avec les services secrets l’ont tenue longtemps à l’abri de l’action répressive étatique, ce qui lui a permis de consolider sa présence sur le territoire[4].

Son origine remonte à la seconde moitié du XIX siècle, quand plusieurs « picciotterie » s’organisent en une secte « qui n’a peur de rien », d’après une dénonce faite au préfet de Reggio Calabria en 1888.

Son organisation est horizontale : chaque famille (famille de sang)[5]  dispose d’un territoire exclusif ou peut exercer n’importe quelle activité, licite ou illicite. Pour cette structure familiale au sens propre la ‘Ndrangheta est aussi beaucoup moins perméable à la prolifération des repentis qui au contraire ont miné grandement Cosa Nostra. Il existe un Code qui règle les rapports entre les associés et qui est soumis a la juridiction d’un tribunal interne, saisi lorsque un affilié ne respecte pas les règles de l’organisation.

Les activités principales de la ‘Ndrangheta sont le trafic international d’armes (fusées et autres armes de guerre), le trafic de drogue et l’extorsion. Elle a presque abandonné l’enlèvement, devenu, désormais très peu rentable.

Après la guerre entre les « cosche » en 1985,  les familles de la province de Reggio Calabria  ont crée un organisme supérieur dont font partie les chef des familles les plus puissantes.

 

CAMORRA

La Camorra est le seul phénomène mafieux issu d’un milieu urbain : son lieu de naissance est  Naples, la date environ au début de XIX siècle. Elle contrôle étroitement le territoire et est très intégrée dans le tissu social surtout dans les couches les plus pauvres. De même la Camorra a entretenu des rapports assez solides avec la politique ce qui lui permet de garder encore aujourd’hui 111 familles opérationnelles et environ 6700 affiliés. C’est la formation mafieuse la plus protéiforme et la plus ductiles : plusieurs fois l’Etat a cru de l’avoir extirpée, lorsqu’elle s’était au contraire seulement déguisée sous l’apparence de la criminalité commune napolitaine . La Camorra, la « Protection » commence ses activités avec l’extorsion généralisée dans la ville de Naples : elle change souvent nom et devient « Bella Società Riformata » ou « Onorata Società » ou « Nuova Camorra Organizzata ». Elle comprend une Société Majeure dont font partie les vrais camorristes et une Societé Mineure dont font partie les « apprentis » : dans chaque quartier de Naples il y a une société dite « paranza » avec un chef et un trésorier, chargé de tenir la comptabilité des extorsions et de la répartitions des profits entre les associés. Les chefs des sociétés, indépendants, sont seulement tenus au respect du chef de la Camorra, dit le « capintesta », qui siège et gouverne le quartier de la Vicaria. Au delà de cette soumission, et sauf le période ou Raffaele Cutolo (l’ « Evangile ») avait crée Nuova Camorra Organizzata n’existent pas des structures hiérarchiques comparables à celles de Cosa Nostra ou de la ‘Ndrangheta, ni d’ailleurs des particuliers rites initiatiques. Il existe au contraire un Code de comportement (d’abord transmis oralement et ensuite rédigé par écrit) qui s’appelle « frieno » et qui prévoit les hiérarchies internes minimales et les peines encourues pour ceux qui ne respectent pas les règles : elles sont appliqués après un procès devant le tribunal ; pour les affaires moins importantes on aura le jugement du tribunal de quartier, dénommé la « Mamma » (« Maman ») ; si l’affaire est plus importante et intéresse toute l’organisation elle est portée devant la « Grande Mamma » (« Grande Maman ») qui a juridiction sur toute la ville et qui est présidé par le « capintesta », le chef de l’organisation, qui prend le nom de « Mammasantissima » (« Maman-très-sainte »).

Les activités de la Camorra sont innombrables : de l’usure à l’extorsion, du contrebande de cigarettes au trafic de drogue, à l’importation clandestine de viande, à la fraude à la Communauté Européenne. Sans oublier les deux secteurs « traditionnels » du monopole du jeu clandestin et de la production de béton en Campania.

 

 

SACRA CORONA UNITA

  Considérée   la quatrième mafia, d’après un rapport de l’Observatoire Eurispes[6] elle compte 47 clan et 1561 affiliés : une organisation donc mineure pour sa présence limité sur le territoire et pour sa puissance économique plus faible par rapport aux autres types de mafia, d’autant plus que ses chef ont été presque tous emprisonnés.

Née au début des années 80 de la scission de la Nuova Camorra Pugliese[7], la nouvelle mafia pouillaise prend le nom de « Rosa » dans la ville de Bari, et de Sacra Corona Unita plus au Nord de la Région. Cette mafia possède toute une série de rites de type mystique-religieux qui évoquent le chapelet du rosaire  : « L’organisation est Sacrée parce que  la Sacra Corona Unita, si on lit ses Statuts, lorsque se réunit ou affilie quelqu'un, consacre et baptise (comme le prêtre pendant les fonctions religieuses) ; Corona, parce que elle est comme la Couronne, c’est à dire le Rosaire qui est utilisé à l’Église pour faire la Via Crucis, un [grain] à côté de l’autre ; Unita, car on devait être unis comme les anneaux d’une chaîne. »[8]

Pour ce qui concerne la structure de l’organisation, elle est de type horizontal, avec toute une série de clan qui se partagent les zones d’influence mais qui sont tout de même tenus à respecter les intérêts communs. Le chef Giuseppe Rogoli pendant longtemps a cherché à donner à l’organisation une structure hiérarchique telle que celle de la ‘Ndrangheta, en l’adaptant à la réalité locale des Pouilles. Autres caractéristiques importantes sont le rôle décisif qui jouent les femmes[9] à l’intérieur de l’association et l’âge, souvent très jeune, des affiliés.

Les activités principales de la Sacra Corona Unita sont le trafic (mais surtout la vente finale) de stupéfiants, le jeu  illégal, l’extorsion et le contrebande en association avec la mafia du Monténégro. Un marché qui s’est développé notamment dans les années ’90, suite à la chute du régime de Tirana et à la guerre du Kosovo, est l’immigration clandestine qui est gérée en accord avec la mafia albanaise.


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[1] Tommaso Buscetta (décédé il y a quelque mois) un des plus importants mafieux repentis a décrit le rituel d’initiation : le néophyte est conduit dans un lieu isolé, en présence de trois hommes d’honneur ; le plus âgé parmi les hommes d’honneur lui dit que « Cette Chose » sert pour protéger les faibles et éliminer les prévarications et se blesse un doigt et fait couler son sang sur l’image d’un saint, qui est posé dans les mains du néophyte et incendié. Celui ci doit supporter la douleur et prêter serment d’obéissance aux principes de Cosa Nostra («Mes chairs doivent brûler comme cette image, si je ne suis pas fidèle à mon serment »). Seulement après le serment le nouveau homme d’honneur est présenté à la Famille et on lui explique le règlement et la hiérarchie de l’organisation.

[2] Riina et son successeur Brusca ont été arrêtés et condamnés. Provenzano se soustrait à les recherches de la police depuis 36 ans

[3] Direction Investigatrice Antimafia

[4] Le rapport population/affiliés en Calabria est extraordinairement élevé, 2,7%. En Sicile Cosa Nostra n’arrive que à  1%, en Campania la Camorra à 1,2% et enfin la Sacra Corona Unita en Puglia à 2%.

[5] Très intéressant de noter que la ‘Ndrangheta est fondé sur une famille de sang dont les liens sont souvent renforcés à travers des mariages croisés.

[6] Observatoire statistique sur les phénomènes criminels.

[7] Crée à son tour par Raffaele Cutolo, chef de la Nuova Camorra Organizzata pour étendre ses affaires au delà de Naples et de la Campania.

[8] Extrait de la déposition du repenti Cosimo Capodieci qui explique les « liturgies » de l’Organisation  dont il a fait partie.

[9] Le rôle criminel de la femme à l’intérieur des organisation mafieuses a subi des changements importants dans ces dernières années : souvent (e notamment pour la Sacra Corona Unita et la ‘Ndrangheta) lorsque les chefs sont emprisonnés, les femmes (leur mère ou leur femme) les remplacent dans la gestion des affaires de l’association.

 

 

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Aggiornato a giovedì 23 maggio 2002