ESSAI    D'ARITHMÉTIQUE    POLITIQUE 

SUR LES

PREMIERS BESOINS DE L'INTÉRIEUR DE LA RÉPUBLIQUE  (*)

(Collection de divers ouvrages d'Arithmétique politique, par Lavoisier, de Lagrange et autres, publiée par Rœderer, A Paris, C.C. Corancez et  Rœderer, an IV; I vol. in-8)

Je suppose, d'après les calculs les plus exacts, que la France contient  25_000_000 d'individus, répandus sur une surface de 105_000_000 d'arpents de 100 perches carrées; la perche a 22 pieds ou 3 toises.

 

Cet arpent, qu'on appelle le grand arpent, est un carré dont la côte est de 36,666 toises, et son contenu en toises carrées est de 1_343,95 (**)

 

La lieue de 25 au degré est de 2_281,08 toises, en prenant 57,027 toises pour la longueur du degré moyen. Ainsi la lieue contient 62,222 fois le côté de l'arpent, et la lieue carré contient 3_871,65 arpents.

 

Par conséquent l'étendue du la France en lieues carrées est de 27_126,47: divisant ce nombre par celui des habitants, on a 921,60 pour le nombre moyen des habitants d'une lieue carrée.

 

Je rapporte ce résultat, parce qu'il peut servir à faciliter la comparaison de la population de la France avec celle des autres pays, qui est ordinairement rapportée ou qui peut se rapporter aisément à des lieues carrées, la lieue étant une parti donnée du degré, qui est la même pour toute la terre, abstraction faite de la petite inégalité provenant de la non-sphéricité.

 

On suppose ordinairement le nombre des femmes égal à celui des hommes; ma le tableau de la population donné par Lavoisier donne 217_746 hommes de plus que de femmes sur les 25_000_000 d'habitants de la France.

 

Ce tableau me fait voir de plus que 1/3 des habitants au-dessous de 15 ans, et que le second tiers est au-dessous de 36 ans. Suivant des Tables de mortalité dressées en Allemagne, le premier tiers va jusqu'à 17 ans, et le second jusqu'à 37.

 

Considérons maintenant les besoins de cette société de 25_000_000 de citoyens, et arrêtons-nous d'abord à ceux de première nécessité.

 

Ces besoins sont: 1° la nourriture; 2° le vêtement; 3° l'abritement, ce qui comprend aussi le chauffage et la lumière.

 

Nous allons commencer par la nourriture. Elle est de deux sortes, végétale et animale.

 

Comme notre dessein n'est que de donner un aperçu et des valeurs moyennes, nous ne feront pas l'énumération des différents objets qui servent à la nourriture des hommes; mais nous réduirons d'abord toute la nourriture végétale aux grains qui se cultivent en grand, et même à une seule espèce moyenne que nous nommerons simplement blé, et qui comprendra le blé-froment, la seigle et l'orge, qu'on mange en pain.

 

Par la même raison, nous réduirons toute la nourriture animale à la viande de boucherie, qui comprend celle de bœuf, de vache, de veau, de mouton et de porc, qui forme une partie considérable de cette nourriture.

 

Nous réduirons de même toute la boisson au seul vin, dont la consommation surpasse infiniment celle des autres boissons, telles que la bière, le cidre, etc. Cette réduction est fondée sur la nature de la chose; car on peut regarder les autres objets de nourriture, soit végétale, soit animale, comme tenant lieu d'une quantité de blé ou de la viande qui contiendrait à peut près autant de matière nutritive. Il est clair qu'ils ne doivent entrer  dans le calcul de la nourriture qu'à raison de le valeur nutritive; et, si l'on connaissait cette valeur pour chaque objet, on pourrait le convertir tout de suite en blé ou en viande. Relativement aux objets de nourriture générale et ordinaire, je crois qu'on ne se trompera pas beaucoup en supposant leur valeur nutritive proportionnelle à leur prix. Ainsi l'on pourra prendre à peu près une demi-livre de fromage sec  comme l'équivalent d'une livre de viande. Nous ferons surtout usage de ce principe dans l'évaluations de la consommation de Paris (***).

Cela posé, la question est réduite à déterminer à peu près la quantité moyenne de blé et de la viande nécessaire pour la subsistance de la République.

Je ne vois que trois manières de parvenir à cette détermination:

 

1° Par la ration qu'on distribue aux troupes;

 

2° Par la consommation des villes fermées où il y avait des registres d'entrée;

 

3° Par l'évaluation des produits annuels de toutes les terres cultivées en grains ou en pâturages; la somme de ces produits étant supposée égale à la consommation annuelle, c'est-à-dire, en faisant abstraction de toute importation ou exportation.

 

Voici les résultats qu ces trois moyens peuvent fournir:

 

La ration est, pour caque combattant, de 28 onces de pain et d'une demi-livre de viande. Je ferai ici abstraction de l'eau-de-vie et du vinaigre, qui sont aussi partie de la ration, parce que ces deux objets ne sont absolument nécessaires qu'aux troupes qui sont en campagne; on pourrait d'ailleurs les comprendre dans le boisson.

 

On estime qu'une livre de pain répond à une livre de blé, poids pour poids. Le blé perd, par la mouture et par le son qu'on tire, le quart de son poids; mais la farine regagne par l'eau qu'on y ajoute pour la réduire en pâte, et dont une partie reste dans le pain, le tiers de son poids, ce qui restitue exactement le poids primitif du blé. Il pourrait y avoir quelques variations à cet égard; mais, comme elles ne peuvent être que fort petites, nous nous tiendrons à celle donnée en nombres ronds.

 

Ainsi il faut une livre trois quarts de blé par jour à caque combattant.

 

Mais j'observe que les combattants sont des homme d'élite, tous dans la force de l'âge et des passions, et dont la consommation peut être regardée comme le maximum de consommation de tous les individus.

 

On remarque que les hommes consomment en général plus que les femmes, et les femmes plus que les enfants, et que, dans une famille composée d'un mari, d'une femme et de trois enfants au-dessous de dix ans, le père consomme presque autant à lui seul que le reste de la famille.

 

Or je vois, par la même tableau de population dont j'ai parlé ci-dessus, qu'il y a au moins un cinquième au-dessous de dix ans. Ainsi l'on peut supposer que ce cinquième compense par sa consommation ce que les femmes consomment de moins que les hommes; de sorte qu'en ayant encore égard à la moindre consommation des vieillards, on en peut conclure, sans craindre de se tromper beaucoup, que la consommation totale de tous les habitants de la France, pour être de pair avec celle des troupes, ne doit être que les quatre cinquièmes de la consommation d'un égal nombre de combattants, c'est-à-dire, de 20000000.

 

Ainsi la consommation totale en blé sera, à raison de 1 ¾ livre, de 35_000_000 de livres, et celle de la viande, à raison d'une demi-livre, de 10_000_000 de livres par jour.

 

Donc, multipliant par 365 ¼, on aura, pour la consommation totale annuelle en blé, 12_784_000_000 de livres, et en viande 3_652_500_000 livres.

 

La consommation moyenne de chaque individu serait par jour d'une livre et deux cinquièmes de blé, et de deux cinquièmes de livre de viande; et par an, de 511,36 livres de blé, et de 146 livres de viande.

 

La second manière de déterminer la consommation moyenne du blé et de la viande est fondée sur les registres d'entrée des villes qui étaient sujettes à des droits. Je me contenterai dans ce moment de considérer la consommation de Paris avant la Révolution, d'après les résultats de Lavoisier:

 

La consommation annuelle en pain y estimée de 206000000 de livres pesant, ce qui autant en blé

206_000_000 liv. pes.

J'ajoute la consommation du riz, qui est de ......

    3_500_000

 

———————

 

209_500_000

 

A l'égard des légumes et fruits, le tableau n'en donne pas la quantité, mais seulement le prix, qui monte à 12_500_000 livres, tandis que le prix total du pain est de 20_600_000 livres, n'étant estimé qu'à 2 sous la livre.

 

Si l'on pouvait supposer la valeur nutritive des légumes, relativement à celle du blé, proportionnelle à leur prix respectifs, la quantité totale de légumes consommée à Paris pourrait équivaloir à 125/206 de tout le pain, ce qui en fait plus de la moitié; mais, comme il s'y consomme beaucoup de légumes et de fruits de luxe, et qu'en général je crois la valeur nutritive des légumes et fruits moindre que celle du pain, à prix égal, je ne prendrai, pour leur valeur représentative, que le quart du pain, c'est-à-dire 51_500_000 livres.

 

Ajoutons donc ce nombre à celui que nous avons trouvé: on aura 261_000_000 de livres en blé pour la consommation annuelle de Paris.

 

La population de Paris était estimée alors à 600_000 habitants. Divisant  donc le nombre précédent par celui-ci, on trouve 435 livres pour la consommation annuelle en blé de chaque habitant de Paris.

 

Les mêmes résultats donnent 90_000_000 de livres de viande de boucherie et 10_000_000 de livres de poisson. Comme le poisson est à peu près aussi nourrissant que la viande, nous ajouterons ces deux articles ensemble: 100_000_000 de livres.

 

J'y trouve ensuite 78_000_000 d'œufs. Comme, à prix égal et à nourriture égale, je crois qu'on préférerait la viande aux œufs, on ne risquerait pas d'estimer trop haut le rapport des œufs à la viande relativement à la nourriture en le supposant égal à celui des prix de ces deux objets. Or je vois, par le tableau de prix, que la valeur des œufs consommés dans Paris était de 3_500_000 livres, tandis que celui de la viande était de 40_500_000 livres. Le rapport de ces deux nombres étant de 1 à 11,57 ..., nous supposerons, en nombre ronds, que les œufs tiennent lieu de 1/12  de toute la viande, c'est-à-dire, de 7_500_000 livres.

 

Il reste encore à estimer le laitage. Les résultats qui me servent de guide ne donnent que la consommation du beurre et du fromage, qui est de 5_850_000 livres de beurre, et de 2_600_000 livres de fromage secs, outre 424_507 livres de fromages mous. Le tableau des prix donne, pour ces deux articles réunis, 7_700_000 livres; ce nombre est à celui du prix de toute la viande comme 1 à 5,26 ... En supposant les valeurs nutritives proportionnelles aux prix, le beur et le fromage consommés à Paris équivaudraient à 17_111_000 livres de viande. J'observe que ce poids est un peu moindre que le double du poids réuni du beurre et du fromage, lequel est de 8_874_507 livres. En le supposant égal, on aurait, en nombres ronds, une demi-livre de beurre ou de fromage pour l'équivalent d'une livre de viande, ce que je crois à peu près juste, d'après différents renseignements que j'ai pris là-dessus.

 

Ajoutant donc ensemble ces trois sommes, nous avons 124_611_000 livres de viande pour 600_000 individus, ce qui donne 207,68 livres par tête.

 

Je viens maintenant à la troisième manière de déterminer la consommation moyenne. Elle consiste à estimer la consommation de toute la France par sa production annuelle, et à la diviser par le nombre total des habitants.

 

Les résultats ci-dessus donnent pour le total, en livres pesant de blé, seigle, orge, qui se récoltent et se consomment, non compris l'orge consommée par les animaux, 14_000_000_000; d'où, retranchant le sixième pour les semences, reste pour la consommation annuelle de toute la France, 11_667_000_000 de livres, ce qui, étant divisé par 25_000_000, donne par tête 466,68 livres.

 

Comme cette consommation ne comprend que les grains qui se mangent en pain, il faudrait pouvoir y ajouter celle des fruits et légumes, qui est très considérable dans les campagnes, surtout dans les parties méridionales de la France. Nous l'avons estimée pour Paris à un quart de celle du pain: on peut présumer que pour la France entière elle doit être plutôt dans une plus grande proportion que dans une moindre. En la supposant d'un quart, il faudrait ajouter 116,67 livres à la consommation individuelle trouvée ci-dessus, ce qui la porterait à 583,35 livres.

 

Suivant les mêmes résultats, la consommation totale de bœufs, vaches, veaux, moutons, porcs, est, en livre de viande, de 1_211_400_000; ce qui ne donne que 48_456 livres par tête.

 

Cette évaluation est peut-être trop faible; car, dans le nombre des bestiaux consommés, il n'y a que 397_000 bœufs et 460_000 vaches ; or je trouve, dans une Mémoire sur le commerce de la France, imprimé en 1789, qu’il se marque annuellement 1_280_000 cuirs de bœufs ou de vaches, sans compter ceux qu’on ne fait pas marquer pour en frauder le droit, et qu’on estime pouvoir être évalués au quart au moins. De cette manière, la consommation des bœufs et vaches, qui, dans l’évaluation ci-dessus, entre pour 392_600_000 livres, devrait être presque doublée ; mais, ne sachant pas quelle confiance peut mériter l’Auteur de ce Mémoire, je n’ose faire une telle correction aux résultats de Lavoisier.

Il faut ajouter à la consommation de la viande celle du fromage : or je trouve, dans ces résultats, que le nombre total des vaches est 4_000_000.

D’un autre côté, je trouve, dans l’Art de la Fromagerie, que le produit moyen est d’un quintal et demi de fromage par vache : en ne le supposant que d’un quintal, on aurait, en fromage, 400_000_000 de livres ; ce qui donnerait par tête 16 livres, qu’on peut regarder comme équivalentes à peu près à 32 livres de viande.

On aurait donc, en nombres ronds, 80 livres de viande pour la consommation annuelle de chaque individu en France, sans compter les œufs, les poissons, la volaille, etc., sur lesquels je n’ai trouvé aucun renseignement.

Voici le tableau des résultats qu’on vient de trouver :

 

CONSOMMATION ANNUELLE MOYEN

de chaque individu,

évaluée en livre pesant de

 

blé

viande

D’après la ration des soldat 

511,36

146

»      la consommation de Paris

435

207,68

»      la consommation totale de la France

583,35

  80

De cette Table j’ai déduit la suivante :

 

A

B

C

D’après la ration des soldat 

657,36

0,7779

0,2221

 »  la consommation de Paris

642,68

0,6768

0,3232

 »  la consommation totale de la France

663,35

0,8794

0,1206

La colonne A donne les sommes en livres pesant de blé e de viande.

La colonne B donne les rapports du poids du blé à la somme des poids du blé et de la viande.

La colonne C donne les rapports du poids de la viande à la même somme.

La colonne A fait voir que le poids total du blé et de la viande est à peu près le même, d’après les trois évaluations. La valeur moyenne est de 654,46 livres, qui ne diffère guère de celle qui résulte de la ration des soldats ; elle est plus grande que celle de Paris, et moindre que celle de toute la France d’environ 10 livres, ce qui ne fait qu’un soixantième du total.

Ce résultat me paraît digne de remarque. Il prouve que les hommes ont besoin, en général, d’un même poids donné d’aliments, comme une espèce de lest qui dépend de la constitution humaine. La différence de nourriture ne consiste donc que dans la différente proportion du blé ou de la viande, ou des autres aliments qui les représentent. Suivant la ration des soldats, cette proportion est de 7 à 2 ; mais dans Paris elle est de 21 à 10, à très-peu près, et dans toute la France elle est de 15 à 2 environ. Cette proportion est la vraie mesure de la pauvreté ou de la richesse d’un État, puisque c’est de la nourriture que dépend essentiellement le bien-être des habitants. Pour augmenter celui des Français, il faudrait donc pouvoir augmenter la consommation de la viande, même aux dépens de celle du blé ; la culture des prairies artificielles est peut-être le seul moyen de parvenir à un but si désirable ; elle est d’autant plus précieuse qu’elle peut accroître à la fois le produit des bestiaux et celui du blé ; mais cet objet est trop connu pour que nous nous y arrêtions ici.

La conclusion qu’on peut tirer des résultats que nous avons trouvés est que la France, dans l’état où est son agriculture, fournit assez de grains pour la consommation de ses habitants, mais qu’en bestiaux elle n’en fournit qu’un peu plus de la moitié de ce qui serait nécessaire pour que chaque habitant eût une ration de viande proportionnelle à celle des soldats.   


(*) Cet Essai est du célèbre de Lagrange; sa modestie voulait en cacher l’Auteur. Je n’ai obtenu la permission de le nommer qu’en lui montrant la profonde conviction que j’ai de l’utilité de son nom pour le succès de l’Ouvrage et de l’utilité de l’Ouvrage pour la chose publique.

(**)  La virgule sépare les parties décimales des entiers, suivant l’usage reçu.

(***) L’Auteur de ce Mémoire m’a dit, en preuve de cette proposition, qu’il avait vérifié que le poids de douze œufs est égal au poids d’une livre de viande, et se vend généralement au même prix.

 

SAGGIO D'ARITMETICA POLITICA

SUI

PRIMI BISOGNI DELL'INTERNO DELLA REPUBBLICA  (*)

(Collezione di diverse opere d’Aritmetica politica, di Lavoisier, Lagrange e altri, pubblicata da Rœderer, A Parigi, C.C. Corancez et  Rœderer, anno IV; I vol. in-8)

Suppongo, in base ai calcoli più esatti, che la Francia contenga 25_000_000 individui, sparsi su una superficie di 105_000_000 misure di 100 pertiche quadrate; la pertica è di 22 piedi o 3 braccia..

Questa misura, che si chiama la grande misura, è un quadrato il cui lato è di 36,666 braccia, e il suo contenuto in braccia quadrate è di 1_343,95 (**).

La lega di 25 al grado è di 2_281,08 braccia, prendendo 57,027 braccia, per la lunghezza di un grado medio. Così la lega  contiene 62,222 volte  il lato della misura, e la lega  quadrata contiene 3_871,65 misure.

Di conseguenza l’estensione della Francia in leghe quadrate è di 27_126,47: dividendo questo numero per quello degli abitanti, si ha 921,60 per il numero medio degli abitanti di una lega quadrata..

Riporto questo risultato, perché questo può servire a facilitare il paragone della popolazione della Francia con quella degli altri paesi, che è generalmente rapportato o che si può rapportare facilmente con delle leghe quadrate, essendo la lega  una parte data del grado, che è lo stesso per tutta la terra, astrazione fatta per la piccola ineguaglianza dovuta alla non-sfericità.

Si suppone generalmente che il numero delle donne sia uguale a quello degli uomini, ma la tavola della popolazione di Lavoisier dà 217_746 uomini in più rispetto alle donne sui 25_000_000 abitanti della Francia.

Questa tavola mi fa vedere che più di ⅓ degli abitanti è sotto i 15 anni, e che il secondo terzo è sotto i 36 anni. Secondo le tavole di mortalità redatte in Germania, il primo terzo va fino ai 17 anni e il secondo fino ai 37.

Consideriamo ora i bisogni di questa società di 25_000_000 cittadini, e fermiamoci  per cominciare a quelli di prima necessità.

Questi bisogni sono: 1°  il cibo; 2° i vestiti; 3°  l’alloggio, che comprende anche il riscaldamento e l’illuminazione.

Cominciamo dal cibo. Questo è di due tipi, vegetale e animale.

Siccome la nostra intenzione è solo di dare un’idea e dei valori medi, non faremo l’elenco delle differenti cose che servono a nutrire gli uomini; invece ridurremo per cominciare tutto il cibo vegetale ai cereali che si coltivano in grande e anche ad una solo specie media che chiameremo semplicemente grano, e che comprenderà il frumento, la segale e l’orzo, che si mangiano sotto forma di pane.

Per la stessa ragione, ridurremo tutto il cibo di origine animale alla carne di macelleria, che comprende la carne di manzo, di mucca, di vitello, di montone e di maiale, che costituisce una parte notevole di questo cibo.

Ridurremo anche tutte le bevande al solo vino, il cui consumo sorpassa infinitamente quella delle altre bevande, quali la birra, il sidro ecc. Questa riduzione è fondata sulla natura delle cose, perché si possono considerare gli altri componenti del cibo, sia di origine vegetale che di origine animale, come sostituti di una quantità di grano o di carne che contengano pressappoco di materia nutritiva. E’ chiaro che non si deve entrare nel calcolo del cibo che in ragione del suo valore nutritivo; e, se si conoscesse questo valore per ogni componente, si potrebbe convertire immediatamente questo componente  in grano o in carne. Relativamente ai componenti del cibo generale e ordinario, credo che non si sbagli troppo supponendo il loro valore nutritivo proporzionale al loro prezzo. Così si potrà prendere all’incirca mezza libbra di formaggio duro come equivalente a una libbra di carne. Faremo soprattutto uso di questo principio nel consumo di Parigi (***).

Posto questo, la questione si riduce a determinare approssimativamente la quantità media di grano e di carne necessaria per il sostentamento della Repubblica.

Non vediamo che tre modi per arrivare a questa determinazione.:

1° Dalla razione che si distribuisce alle truppe;

2° Dal consumo delle città “fermées”(?) dove si hanno dei registri delle entrate;

3° Dalla valutazione dei prodotti annuali di tutte le terre coltivate a cereali o da pascolo; considerando la somma di tutti questi prodotti uguale al consumo annuale, cioè, facendo estrazione da tutte le importazioni ed esportazioni.

Ecco i risultati che questi tre metodi possono fornire.

 La razione è, per ciascun combattente, di 28 once di pane e di mezza libbra di carne. Farò anche astrazione dall’acquavite e dall’aceto, che fanno anch’essi parte della razione, perché queste due cose non sono assolutamente necessarie che alle truppe che sono in campagna (militare?); si potrà del resto comprenderli nelle bevande.

Si stima che una libbra di pane corrisponda a una libbra di grano, peso per peso. Il grano perde, a causa della macinazione e dal volume che se ne ricava, il quarto del suo peso, ma la farina guadagna dall’acqua che si aggiunge per ridurla in pasta, e di cui una parte resta nel pane, un terzo del suo peso, e questo restituisce esattamente il peso primitivo del grano. Ci potranno essere alcune variazioni a questo riguardo; ma poiché esse non potranno essere che molto piccole, noi propenderemo a quella data in numeri interi.

Così sono necessari una libbra e tre quarti di grano per ciascun combattente.

Ma osservo che i combattenti sono uomini d'élite, tutti nella pienezza dell'età e della passione, e quindi il consumo può essere considerato come il massimo dei consumo di tutte le persone.

Si osservi che gli uomini consumano in generale più delle donne, e le donne più dei bambini, e che, in una famiglia composta da un marito, una moglie e tre bambini al di sotto dei dieci anni, il padre consuma quasi altrettanto da solo che il resto della famiglia.

Ora vedo, dalla stessa tavola della popolazione di cui ho parlato prima, che c'è almeno un quinto di popolazione al di sotto dei dieci anni. Così si può supporre che questo quinto compensi attraverso il suo consumo quello che le donne consumano meno degli uomini; di modo che, tenendo anche in conto il minor consumo dei vecchi, si può concludere, senza paura di sbagliare troppo, che il consumo totale di tutti gli abitanti della Francia, per essere pari a quello delle truppe, non deve essere che i quattro quinti del consumo di un ugual numero di combattenti, cioè, di 20_000_000.

Così il consumo totale di grano sarà, a causa di 1 ¾ di libbra, di 35_000_000 libbre, e quello della carne, a causa di una mezza libbra, di 10_000_000 di libbre al giorno.

Quindi, moltiplicando per 365 ¼, si avrà, per il consumo totale annuale di grano, 12_784_000_000 libbre, e di carne 3_652_500_000.

Il consumo medio per ogni individuo sarà al giorno di una libbra e due quinti di grano e di due quinti di libbra di carne, e, per anno, di 511,36 libbre di grano e di 146 libbre di carne.

Il secondo modo per determinare il consumo medio di grano e di carne è basato sui registri delle entrate delle città che sono soggette a dei dazi(?). Mi limiterò in questo momento a considerare il consumo di Parigi prima della Rivoluzione, secondo i risultati di Lavoisier:

Il consumo annuale di pane è stimato in 206000000 libbre, altrettanto il grano 206_000_000 libbre
Aggiungo il consumo di riso, che è     3_500_000
  ———————
  209_500_000

Riguardo ai legumi e alla frutta, la tavola non ne dà la quantità, ma unicamente il prezzo, che ammonta a 12_500_000 lire, come il prezzo totale del pane ammonta a 20_600_000 lire [...].

Se si può supporre il valore nutritivo dei legumi, relativamente a quello del grano, proporzionale ai loro prezzi rispettivi, la quantità totale dei legumi consumata a Parigi può essere equivalente a  125/206 di tutto il pane, ciò che ne fa più della metà; ma, poiché si consumano molti legumi e molta frutta di lusso e poiché credo che in generale il valore nutritivo dei legumi e della frutta sia minore di quello del pane, a parità di prezzo, prenderò come loro valore rappresentativo, quello del quarto del pane, cioè 51_500_000 libbre.

Aggiungiamo dunque questo numero a quello che abbiamo trovato: si avranno 261_000_000 libbre di pane per il consumo annuale di Parigi.

La popolazione di Parigi è stimata attorno ai 600_000 abitanti. Dividendo dunque il numero precedente per questo, si trovano 435 libbre di consumo annuale di grano per ciascun abitante di Parigi.

 Gli stessi risultati danno 90_000_000 libbre di carne di macelleria e 10_000_000 libbre di pesce. Siccome il pesce è all'incirca nutriente come la carne, sommeremo i due articoli insieme: 100_000_000 libbre.

Trovo poi 78_000_000 uova. Siccome, a parità di prezzo e di capacità nutritiva, credo che si preferisca la carne alle uova, non rischierò di stimare troppo alto il rapporto delle uova alla carne relativamente all'alimentazione supponendolo uguale a quello dei prezzi dei due oggetti. Ora si vede, dalla  tabella dei prezzi, che il valore delle uova consumate a Parigi è di 3_500_000 lire, come quello della carne è di 40_500_000 lire. Il rapporto di questi due numeri è di 1 a 11,57 ..., supporremo, in muneri interi, che le uova siano 1/12  di tutta la carne, cioè di 7_500_000 libbre.

Restano ancora da stimare i latticini. I risultati che mi servono da guida mi danno solo il consumo di burro e di formaggio, che è di  5_850_000 libbre di burro e di 2_600_000 libbre di formaggio duro, oltre a 424_507 libbre di formaggio molle. La tavola dei prezzi dà, per questi due articoli insieme, 7_700_000 lire; questo numero sta a quello del prezzo di tutta la carne come 1 sta a 5,26... Supponendo i valori nutritivi proporzionali ai prezzi, il burro e il formaggio consumati a Parigi equivalgono a 17_111_000 libbre di carne. Osservo che questo peso è poco meno che il doppio della somma dei pesi del burro e del formaggio, che è di 8_874_507 libbre. Supponendoli uguali, si avrà, in numeri interi, mezza libbra di burro o di formaggio per l'equivalente di una libbra di carne, cosa che credo più o meno esatta, dalle differenti informazioni che ho preso a riguardo.

Mettendo insieme queste tre somme, abbiamo 124_611_000 libbre di carne per 600_000 individui, e questo dà 207,68 libbre a testa

Veniamo ora al terzo modo di determinare il consumo medio. Esso consiste nello stimare il consumo di tutta la Francia mediante la sua produzione annuale e nel dividerlo per il numero totale dei suoi abitanti.

I risultati danno come totale, in libbre di grano, segale, orzo, che si raccolgono e si consumano, escluso l'orzo consumato dagli animali, 14_000_000_000; di cui, sottraendo un sesto per le sementi, restano per il consumo annuale di tutta la Francia 11_667_000_000 libbre, che, diviso per 25_000_000, dà 466,68 libbre a testa.

Poiché questo consumo comprende solo il grano che si mangia sotto forma di pane, si dovrebbe aggiungere quello della frutta e dei legumi, che è molto considerevole in campagna, soprattutto nel meridione della Francia. Abbiamo stimato che a Parigi sia un quarto di quello del pane: si può presumere che per l'intera Francia debba essere piuttosto in una proporzione più grande che in una minore. Supponendo che il rapporto sia un quarto, si dovrà aggiungere 116,67 libbre al consumo annuale trovato sopra, che sarà quindi portato a 583,35 libbre.

Seguendo i medesimi risultati, il consumo annuale di buoi, mucche, vitelli, montoni, maiali, è, in peso di carne, 1_211_400_000, ciò che dà 48_456 libbre a testa.

Questa stima è forse troppo debole perché, nel numero delle bestie consumate, non ci sono che  397_000 buoi et 460_000 mucche, mentre trovo in una Memoria sul commercio della Francia, pubblicata nel 1789, che si marchiano annualmente 1_280_000 pelli di buoi o di mucche, senza contare quelli che non si fanno marchiare per frodare le tasse e che si stima possano essere almeno un quarto. In questo modo, il consumo di buoi e mucche, che, nella valutazione qui sopra, è di 392_600_000  libbre, deve essere all'incirca raddoppiata; ma, non sapendo quale fiducia possa meritare l'Autore di questa Memoria, non oso fare una tale correzione ai risultati di Lavoisier.

Bisogna aggiungere al consumo della carne quello del formaggio: ora trovo che il numero totale delle mucche è  4_000_000.

D'altra parte trovo, nell'Arte casearia, che il prodotto medio è di un quintale e mezzo di formaggio per mucca: supponendolo solo di un quintale si avranno 400_000_000 libbre di formaggio; ciò darebbe 16 libbre a testa, che si può guardare come l'equivalente di 32 libbre di carne.

Si avranno quindi, in numeri interi, 80 libbre di carne per il consumo annuale di ciascun individuo in Francia, senza contare le uova, i pesci, i volatili, ecc, sui quali non ho trovato nessuna informazione.

Ecco la tabella dei risultati che ho trovato:

 

CONSUMO ANNUALE MEDIO

di ciascun individuo

valutato in libbre di

 

grano

carne

Dalla razione dei soldati 511,36 146
Dal consumo di Parigi 435 207,68
Dal consumo totale della Francia 583,35 80

Da questa Tavola ho dedotto la seguente:

  A B C
Dalla razione dei soldati 657,36 0,7779 0,2221
Dal consumo di Parigi 642,68 0,6768 0,3232
Dal consumo totale della Francia 663,35 0,8794 0,1206

La colonna A dà la somma in libbre del grano e della carne.

La colonna B dà i rapporti dei pesi del grano con la somma dei pesi del grano e della carne.

La colonna C dà i rapporti dei pesi della carne con la medesima somma.

La colonna A mostra che il peso totale del grano e della carne è all'incirca lo stesso, secondo le tre stime. Il valore medio è 654,46 libbre, che non differisce molto da quello che risulta dalla razione dei soldati; è più grande di quello di Parigi e minore di quello di tutta la Francia di circa 10 libbre, che sono un sessantesimo del totale.

Questo risultato mi sembra degno di nota. Prova che gli uomini hanno bisogno, in generale, di uno stesso dato peso di alimenti, come una specie di zavorra che dipende dalla costituzione umana. La differenza di alimentazione non consiste dunque che nella differente proporzione di grano o di carne, o degli altri alimenti che le sostituiscono. Secondo la razione dei soldati questa proporzione è di 7 a 2, ma a Parigi è di 21 a 10, all'incirca, e in tutta la Francia è di 15 a 2, circa. Questa proporzione è la vera misura della povertà o della ricchezza di uno Stato, perché è dalla alimentazione che dipende essenzialmente il benessere degli abitanti. Per aumentare quello dei Francesi, si dovrebbe dunque aumentare il consumo di carne, il quale dipende da quello del grano; la coltivazione di praterie artificiali (?) è forse il solo modo di arrivare a un obiettivo così desiderabile; essa è ancora più preziosa che può accrescere contemporaneamente il prodotto del bestiame e quello del grano; ma questo obiettivo è troppo noto per cui ci fermiamo qui.

La conclusione che può essere tratta dai risultati che noi abbiamo trovato è che la Francia, nello stato in cui si trova la sua agricoltura, fornisce abbastanza grano per il consumo dei suoi abitanti, ma che in bestiame essa no fornisce che poco più della metà di ciò che sarebbe necessario affinché ciascun abitante avesse una razione di carne proporzionale a quella dei soldati.   

 


(*) Questo saggio è del celebre Lagrange; la sua modestia voleva nasconderne l’autore. Ho ottenuto il permesso di citarlo solo mostrandogli la profonda convinzione che ho dell’utilità del suo nome per il successo dell’Opera e l’utilità dell’Opera per la cosa pubblica.

(**)  La virgola separa la parte decimale da quella intera, secondo l’uso convenzionale.

(***) L’Autore di questa Memoria mi ha detto, come prova di questa affermazione, che ha verificato che il peso di dodici uova è uguale al peso di una libbra di carne, e che si vendono generalmente allo stesso prezzo.

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