La Turquie n’a pas de titre pour entrer dans l’Union Européenne

La Turquie, bénéficiant d’une interférence américaine illégitime, demande une date certaine pour négocier son entrée dans l’Union Européenne. Les peuples européens sont amis du peuple américain dans un cadre de solidarité et de culture occidentales. Mais les hommes d’Etat européens, compte tenu de toute la prudence nécessaire due à l’infériorité économique et militaire de l’Union, doivent sauvegarder les intérêts européens des prétentions de l’oligarchie politico-économique qui dirige l’hégémonie américaine dans le monde, pour ne pas être de fait esclave d’un quasi diktat de Clinton d’abord et de Bush ensuite: ils risquent, s’ils se conforment à l’imposition américaine, d’être jugé comme Gauleiter du président américain, avec toutes les conséquences qui en dérivent dans la vie politique européenne.

Il faut dire tout d’abord que la Turquie de l’Anatolie ne fait pas partie du continent européen : Constantinople, appelée par les Turcs Istanbul, est le fruit d’une sanglante et cruelle conquête militaire.

Ceci dit, il faut prendre acte que la Turquie n’a pas de titre pour entrer dans l’Union Européenne.

Premièrement l’appartenance à une civilisation juridique différente l’interdit. L’islam est la fusion de la religion et de la politique, c’est pourquoi l’islam est Etat et vice versa l’Etat ne peut être qu’islamique. C’est pour cette raison que les Etats islamiques, y compris la Turquie, n’admettent pas la liberté de religion. Pareillement la liberté d’opinion ne peut être qu’interne à la société islamique, interdisant la circulation de la pensée non islamique et davantage encore de celle anti-islamique. Le concept de personne est étranger à la culture islamique, et par conséquent, il en dérive que la pleine capacité juridique n’est réservée qu’au musulman mâle, ce qui comporte une domination du mâle au sein de la famille et de la société, et l’inégalité entre l’homme et la femme. En outre l’existence d’une loi de nature, sur laquelle la raison humaine peut fonder un droit naturel, ne fait pas partie de la compréhension islamique. Cet élément conditionne la pleine ouverture juridique de l’islam vers les droits universels de l’homme, dont la matrice historique et culturelle est expressément occidentale. De plus, la laïcité de l’Etat turc est mal interprétée en Europe, en considérant qu’elle ait le même contenu juridique et politique appliqué en Occident. Non, elle est tout autre et elle indique une répartition des pouvoirs à l’intérieur du régime turc intervenu à l’époque de Kemal : le pouvoir suprême est réservé aux militaires défenseurs de la turquicité de l’Etat avec la mise en marge de toutes les ethnies diverses alors que le pouvoir administratif est délégué à la classe civile, y compris aux ulema, ces derniers sont encadrés comme fonctionnaires de l’Etat ayant comme devoir de garder un islam à la turc, dépuré des formes culturelles et des coutumes arabes mal vues par le kémalisme après l’insurrection arabe contre l’empire ottoman.

Deuxièmement la nature totalitaire de l’islam l’interdit. Son fondement idéologique est la division du monde en " dar al-islam  - la demeure de l’islam " et en " dar al-harb – la demeure de la guerre ", cette dernière est constituée par tous les pays qui n’ont pas encore été conquis par l’islam, définis en bloc dans la prédication au sein des mosquées comme " dar al-kufr - terre de l’impiété ". Pour tous les islamistes, y compris les Turcs, l’Europe est une terre de conquête. L’absolutisme politico-religieux de l’islam est fuyant, parce que dans les Etats islamiques il prend des formes politiques différenciées : dictature militaire, dictature personnelle, dictature du parti unique, théocratie, régime de police à caractère absolutiste. Le totalitarisme islamique est protéiforme et il ne se base pas sur des partialités sociales comme la race (le national-socialisme) ou la classe (le communisme). Il a sublimé un choix religieux proclamé comme le dernier tombé du ciel, au point qu’il le considère comme la religion définitive à laquelle tous doivent se conformer en ayant même recours à l’imposition coercitive moyennant la " jihad – la guerre sainte ". Ce qui fonde le totalitarisme islamique est donc la religion islamique qui est le seul et unique mode de pensée transposé en une conception juridique sacrale, qui a une valeur aussi bien privée que public, spirituelle que temporelle. Le Coran est un texte omnicomprenant de devoirs qui règlent chaque aspect de la vie du musulman, en déclenchant un droit qui discipline le pratique islamique. Le totalitarisme islamique, en tant que pensée unique juridiquement contraignante et inviolable, se résout précisément avec une monocratie : la dictature de la loi coranique, sur base de laquelle tout le pouvoir va à l’islam. Cette conception du pouvoir constitue la ligne de partage des eaux entre civilisation politique démocratique et civilisation politique non démocratique. Il ne semble pas que les Turcs se soient détachés du fixisme normatif coranique : au contraire le nouveau représentant de l’islamisme turc, Recep Tayyp Erdogan, renforce cette observation. En fait, en Turquie d’après l’opinion courante dans ses rapports avec les hommes politiques européens, il s’en tiendra à la norme coranique de la " takiyya ", qui légitime la dissimulation, et donc le mensonge politique, quand elle est utilisée pour servir la cause de l’islam. Après avoir su réagir aux totalitarismes national-socialiste et communiste, les peuples d’Europe ne peuvent pas ouvrir leurs portes au totalitarisme islamique, dont le national-islamisme turc est une sorte.

Troisièmement la situation de déstabilisation potentielle dans laquelle se trouve l’Europe à la suite de l’immigration islamique massive l’interdit. Elle n’est pas à l’origine d’un simple processus " d’étrangification " comme pour les immigrés non islamiques , qui tout en éprouvant de la nostalgie pour leurs traditions culturelles ne sont pas récalcitrants à l’intégration dans la société européenne. Les islamistes ont la prétention de modifier le " faciès " de la culture et de la civilisation européenne. Désormais, nombreuses sont les déclarations islamiques exprimant le dessein de prévaloir en Europe, avec la force évidemment, pour l’insérer dans la galaxie islamique. Le témoignage rendu le 13 octobre 1999 par l’archevêque de Izmir en Turquie, mons. Giuseppe Germanno Bernardini, est exemplaire : en citant une rencontre de dialogue interreligieux avec les islamistes, il a dit qu’un de leur représentant a mis un terme à tout développement ultérieur en déclarant : " Grâce à vos lois démocratiques nous vous envahiront, grâce à vos lois religieuses nous vous dominerons ". Intempérances verbales ? Non ! Ce sont les indicateurs d’un dessein politique islamique précis mis au point par l’O.C.I. - l’Organisation de la Conférence Islamique, c’est-à-dire le Califat collectif, dont la Turquie est partie active. Entre temps, on peut constater que seulement les immigrés islamiques sont hostiles à la présence publique de symboles religieux chrétiens en donnant naissance à une conflictualité idéologico-religieuse. Les islamistes immigrés sont les seuls à avoir parmi eux des groupes psychologiquement préparés et militairement entraînés aux actions terroristes de dérangement. Dans les mosquées seulement, où culte et action politique sont étroitement liés, on a jubilé pour l’attentat du 11 septembre 2001 en Amérique, et c’est dans les mosquées que l’on propagande la " jihad – la guerre sainte " chaque fois que cela est possible.

Il n’est alors pas possible à présent de savoir à quel point les flux migratoires islamiques en Europe seront déstabilisants, alors que le rôle du cheval de Troie confié par l’O.C.I. à la Turquie pour rendre écrasant le poids islamique en Europe est assez sûr.

La tentative en cours aux Etats-Unis d’imposer l’entrée de la Turquie est un grave acte d’hostilité envers l’Europe et indirectement vers la Russie, puisque elle est liée au dessein, en cours depuis plusieurs années déjà, de faire de la Turquie une puissance internationale euro-asiatique, en en étendant l’influence politique aux Balkans (dérangeante pour l’Europe) et au Centre de l’Asie (dérangeante pour la Russie). Mais l’objectif, véritablement impie pour ses graves conséquences, est de vouloir une Turquie en Europe pour le libaniser, de façon à la garder dans une situation permanente de lacérations internes, en la liquidant politiquement sur le scène mondiale.

La Turquie, maître dans le nettoyage ethnique, qui s’est débarrassée des Arméniens, des Grecs-orthodoxes (dernier acte dans l’aire chypriote occupée en 1974), qui a en cours un projet sans pitié de dispersion et d’assimilation des Kurdes, qui est aussi à l’origine des flux islamiques en Europe qu’elle met en scène de façon occulte, est l’Etat bourreau choisi pour décapiter politiquement l’Europe. Faut-il continuer de dire merci aux Etats-Unis, comme on est en train de le faire, ou ne faut-il pas informer les peuples d’Europe afin d’éviter un destin tragique ?

Ferrare, novembre 2002


copertina