LA THEORIE DE LA PANSEXUALITE
6ème
Congres de Sexologie - Limassol, Juin 2002 -
par
Peter Boom.
L'être
humain doit être, de par sa nature, "pansexuel" (du grec
Pan = tout), c'est à dire un individu sexuel complet. Nous possédons
tous différentes possibilités qui sont généralement
classées comme hétérosexuelles, homosexuelles, bisexuelles,
érotomanes, fetichistes, sadomasochistes, etc. Ces tendances -
faisant partie de notre nature - peuvent se manifester à tout moment
et selon l'évolution de chacun. Les enfants sont dès le
départ des êtres pervers polymorphes; le goût de la
découverte les amènent à jouer avec leur mère,
à toucher leurs sexe, à se masturber et à examiner
leurs excréments. Puis, au fur et à mesure de leur développement,
ils jouent au docteur tout en explorant le corps et les fonctions de leurs
amis. Tout cela est parfaitement naturel. Pendant la puberté leur
ambiguité est naturelle et indiscutable; c'est la période
où ils s'adaptent à leur vie d'adultes. Ce n'est que plus
tard que leur inclinaison sexuelle se cristallise et se définit
davantage, quoique le champ des options reste ouvert. Ces options sont
en partie réprimées ou deviennent des tabous, selon la société
où ils vivent. Il existe une tribu sur l'île de Borneo où
les femmes vivent avec leurs enfants dans une hutte énorme, tandis
que les hommes vivent loin du groupe familial. Au Kenya, une tribu de
nomades fiers et vivant longtemps a pour coutume de former des couples
de jeunes garçons de 12 ans à travers le rituel du mélange
du sang. Ces couples de mâles restent réciproquement fidèles
toute leur vie, ils voyagent ensemble loin de la tribu, qu'ils regagnent
une ou deux fois par an pour procréer avec des femmes. On compte
de nombreux exemples: les Siwans d'Afrique et les Sambia de Nouvelle-Guinée,
où presque tous les mâles pratiquent aussi bien l'hétérosexualité
que l'homosexualité. Mais laissons les anthropologues s'occuper
de ce sujet. Le terme "pansexualité" existe déjà,
mais dans une acception différente de celle que je lui attribue.
Il indique l'idée que l'instinct sexuel est à la base de
tout comportement humain (Freud). Il est important de ne pas réprimer
notre pansexualité et de la vivre librement et avec bon sens. La
répression et l'interdiction de l'instinct naturel créent
la frustration, qui se traduit souvent en comportement antisocial et violent.
Le bon sens est contenu dans l'expression: "Ne fais pas à
autrui ce que tu ne voudrais pas qu'on te fît!"
Définition de la pansexualité:
La Pansexualité comprend toutes les formes de sexualité
présentes dans l'espèce humaine: l'homosexualité
(gays et lesbiennes), la bisexualité, la transexualité,
le transgenre et l'hétérosexualité. Ces tendances
peuvent se manifester de façon permanente ou épisodique.
Dans
son Dictionnaire Critique, le Professeur Haeberle donne la définition
suivante du terme "pansexualisme":
"Pansexualisme, (parfois "pansexualité"), terme
tiré du grec ("pan": Tout) signifiant amour sexuel omnicompréhensif.
Cette approche - cette philosophie - est fondée sur la conviction
que le potentiel sexuel peut - et devrait - se tourner vers n'importe
quel objet ou individu. A une certaine époque, le terme "pansexualisme"
fut utilisé pour signifier l'idée que tout comportement
humain a en quelque sorte une origine sexuelle. Cette théorie n'est
plus considérée comme valable. De nos jours les termes "pansexualisme"
et "pansexualité" sont souvent employés par les
partisans de la libération sexuelle pour signifier que les distinctions
de rôle et de genre entre hommes et femmes sont trop contraignantes
et que, pour cette raison, une sexualité omnicompréhensive
devrait comprendre les orientations sexuelles dans leur ensemble et ignorer
délibérément toute distinction sociale conventionnelle
"
J'ai échangé quelques emails intéressants avec le
professeur Haeberle et je tiens à le remercier publiquement de
son soutien à mes recherches en sexologie.
Pour comprendre au mieux la théorie de la pansexualité il
faut en saisir l'approche relative en faisant abstraction des considérations
absolues. Le but est, en effet, d'observer les différences de rôles
entre genres et non pas d'examiner la sexualité biologique.
D'après nos observations sur le comportement sexuel humain, nous
avons appris que l'être femelle et mâle, la féminité
et la masculinité, l'homosexualité et l'hétérosexualité
sont une question de degré.
De nos jours, on parle trop facilement d'hétérosexualité,
d'homosexualité et de bisexualité, sans tenir en ligne de
compte les superpositions entre ces différentes catégories.
Une vision étroite de la nature humaine empêche une vision
naturelle de la vie, et quand je dis vision naturelle je ne pense pas
aux conceptions scientifiques du passé
ni aux religions d'hier
ou d'aujourd'hui.
De nos jours le terme "nature" est communément employé
pour réclamer des droits sexuels et comme le dit le professeur
Haeberle, je cite: "Une étude critique de cette tradition
des lois naturelles ne peut qu'enrichir un concept de morale sexuelle
réellement humaine ".
Dans la plupart des sociétés, les femmes n'ont pas la possibilité
de vivre leur "pansexualité". La relation hommes/femmes
repose sur l'idée que la femme se trouve au moins un échelon
en-dessous sur l'échelle des valeurs, et qu'elle ne sert qu'à
des fins de reproduction et d'éducation des enfants. Naturellement,
ce n'est pas la façon idéale pour faire épanouir
l'amour ou la sexualité chez les deux sexes.
Le "Fescinninni versus" est un ancien rite orgiaque dans lequel
les individus s'adonnent à des pratiques "pansexuelles"
mixtes. Chez les Etrusques les femmes avaient le droit de choisir librement
leurs partenaires et de les repousser quand elles le souhaitaient.
"Je t'aime car tu es" est un texte que j'ai écrit en
1977 pour un film intitulé Tomboy, dans lequel les acteurs étaient
des sexologues américains et européens renommés.
La chanson (que j'ai moi même interprétée) exprimait
la souffrance physique et psychologique d'un individu en train de subir
une opération de changement de sexe. Personnellement, je considère
ce genre d'opérations comme une violence terrible. L'individu qui
change de sexe agit ainsi parce qu'il / elle recherche l'acceptation de
la part de la société. De nombreux psychologues affirment
que ce qu'il/elle recherche, en définitive, c'est sa propre acceptation.
Dans les cultures anciennes l'hermaphrodite était honoré;
on le considérait comme une fleur rare, une orchidée. Dans
la plupart de nos sociétés ce genre d'individu est exclu
et souvent usé et abusé sexuellement par d'autres individus
qui, de jour, le méprisent.
Non, c'est la société qui doit changer. Jamais aucune fleur
rare ne devrait être à la merci de comportements sadiques
ou de démarches commerciales susceptibles de la transformer en
une fleur commune et artificielle.
L'autre thème dont on ne parle pas librement dans de nombreux pays,
c'est celui de la vie sexuelle des personnes handicapées. Pour
elles les rapports sexuels sont difficiles à mettre en oeuvre ou
encore interdits, ce qui les prive d'une joie qu'ils pourraient encore
trouver dans la vie. Des sentiments comme l'amour et l'affection devraient
leur être accessibles, et d'ailleurs comme je le répète
souvent: "Il y a toujours quelqu'un pour chacun d'entre nous".
Du moins je l'espère.
Personnellement j'ai été très surpris de découvrir
qu'un aussi grand nombre d'hommes jeunes aiment les hommes plus âgés
comme moi. Je me suis toujours dit qu'à mon âge la sexualité
était une chose révolue, mais lorsque j'ai découvert
le site italien "Silverfox" (Renard Argenté) sur l'Internet,
j'ai établi des liens merveilleux avec d'autres hommes et j'ai
trouvé mon partenaire idéal.
Je dois dire que les jeunes gérontophiles que j'ai rencontrés
jusqu'ici sont tous des gens très sensibles et, à mon sens,
il serait intéressant de mener une étude spécifique
sur leurs sentiments.
Ils ont davantage de difficultés à se faire accepter par
la société et par leurs familles. Et si, en plus, ils sont
homosexuels, ils sont doublement tenus à l'écart et sévèrement
critiqués lorsqu'ils présentent leur compagnon - souvent
plus âgé que leurs parents - en famille.
Il existe encore un autre tabou, qui consiste à ne pas mettre en
oeuvre une approche scientifique de la pédophilie, un phénomène
qui semble avoir soulevé une vague populaire - qui malheureusement
n'est pas scientifique - d'indignation partout dans le monde.
Des études anthropologiques nous apportent différentes réponses
et, une chose est sûre, un enfant ne peut jamais être considéré
comme un être asexué. Naturellement, il faut protéger
les enfants contre toute forme de violence, surtout de la part des éducateurs
hypocrites, des prêtres et des membres de la famille. Les hommes
politiques considèrent toujours hasardeux de financer des projets
visant à étudier de plus près le phénomène
de la pédophilie, pour nous faire comprendre ce que l'on peut ou
ne peut pas permettre.
Après toutes ces digressions je tiens à préciser
qu'à mon sens toutes les formes de liens affectifs sont induites
et construites psychologiquement; elles ne sont pas prédeterminées
biologiquement: "Cette personne me plaît, il / elle a quelque
chose qui m'attire ".
Les sociétés, dans la plupart des cas, ont essayé
de conditionner ces orientations, exceptée l'hétérosexualité
- que l'on qualifie de "normale". Il se peut que cette restriction
soit née de la nécessité de la reproduction, le but
étant de créer des nations puissantes et fortes à
une époque où les famines, les épidémies et
les guerres décimaient des populations entières, et où
la médecine n'avait pas encore atteint les niveaux presque miraculeux
qu'elle a atteints aujourd'hui.
C'est peut-être l'une des raisons pour lesquelles aujourd'hui, face
à la menace grandissante de la surpopulation, la pansexualité
se développe plus librement.
Toutes nos orientations sexuelles - notre pansexualité - comportent
des tendances négatives, qui causent un préjudice à
nous-mêmes ou à autrui, de la même manière qu'on
peut utiliser le téléphone ou l'Internet de la bonne ou
de la mauvaise façon.
Qu'entend-on par pratique négative de la sexualité et quelles
sont les manières positives de la mettre en oeuvre? C'est là
une distinction qui comporte quelque difficulté.
Par exemple, le sadomasochisme est acceptable jusqu'à un certain
degré; la nécrophilie est considérée comme
une grave déviation et la pédophilie, dans notre Société,
est inacceptable.
Il est évident que je dois faire preuve d'humilité face
aux spécialistes de très haut niveau qui participent à
ce Congrès et auxquels je ne peux certes pas être comparé.
J'espère apprendre beaucoup de choses en les écoutant.
Je suis conscient des nombreux problèmes que ma théorie
de la pansexualité pourrait éveiller sur le plan théorique
de la recherche psychologique et sociale, ainsi que dans les domaines
politique et religieux. C'est une vision du monde qui ne sera pas acceptée
facilement par tout le monde, mais qui pourra trouver un moyen de s'affirmer
et devenir une façon commune de considérer la sexualité.
Peter Boom
Bibliographie:
Bullough Vern L. - 1994 - Science in the bedroom - New York - Basic Books
Haeberle Erwin -1981 - The Sex Atlas - Berlin - E.J.Haeberle
Haeberle Erwin - 1983 - Anfänge der Sexual Wissenschaft - Berlin
- De Gruyter
Herdt Gilbert - 1987 - The Sambia - Ritual and Gender in New Guinea -
Orlando - Harcourt College Publishers
Mieli Mario - 1977 - Elementi di critica omosessuale - Milano - Giulio
Einaudi Editore
Rigliano Paolo - 2001 - Amori senza scandalo - Milano - Feltrinelli
|