Une Erreur

VII

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Elle ne le pouvait plus. Oscar ne pouvait plus l'ignorer. Sourire à la Reine alors que dans sa tête elle ne pouvait que se désespérer. Maintenant que tout était clair dans son esprit, maintenant qu'il n'existait plus de doutes sur ce qui s'était passé cette nuit. Maudite! Maudite nuit!

 

Cette nuit lui avait volé son ami d’enfance, son ami de toujours, l'enfant auquel elle avait confié tous ses secrets d'enfance, le sourire clair et limpide de cet enfant. Elle lui avait volé l'étreinte de sa main. Elle lui avait tout volé, tout ce qu' avait été André jusqu'à cette maudite nuit. Elle le lui avait volé, enlevé à jamais son André. Celui qu'elle avait toujours connu, celui qui lui faisait du bien, du bien à l'âme.

 

Cette maudite nuit avait prit son André et l'avait mise face à un homme qu'elle ne réussissait pas à reconnaître. Complètement inconnu à ses yeux. Un homme amoureux, dramatiquement amoureux d'elle. Amoureux d'elle depuis toujours. Seulement d'elle. Il avait souffert pour elle, il devait avoir tellement souffert à cause d'elle. Au point de tenter même de la repousser, cette nuit maudite près de la taverne. Et elle qui n’avait rien comprit, elle n'avait rien comprit du tout. Cette tristesse, cette rage que cette nuit, dans la taverne, elle avait lu dans ses yeux, dans ses gestes, dans l'alcool qu'il avait bu lourdement, uniquement pour elle, pour elle qui ne s'était aperçue de rien. Et la passion avec laquelle il lui avait fait l'amour, c'était pour elle, pour elle seulement. Et même la tentative de la défier. De se défier lui-même, de se défendre aussi de se rapprocher d'elle. Uniquement pour elle, pour elle seulement. Et elle n'avait rien vu. Elle n'avait rien vu jusqu'à cette nuit et avait alors voulu oublier.

 

Oublier, certes, j'aurais dû continuer à ne pas me rappeler ce qui s'est passé cette nuit, je n'aurais jamais dû me le rappeler. Parce que maintenant que je m'en souviens, maintenant, je n'ai plus de repères où me réfugier, j'ai mal, j'ai vraiment mal. Pour toi et pour moi. André... pourquoi ?

 

Tu pouvais... tu devais être mon ami...pour toujours... Pourquoi ? Et maintenant ? Maintenant rien ne peut être comme avant. Rien ne sera plus comme avant. J'ai froid, André, un froid immense. Et l'unique chose qui me retient de hurler est que tu n'es pas ici maintenant. Que je n'ai pas à regarder tes yeux. Que je n'ai pas à pas répondre à tes questions. Parce que si tu étais ici maintenant...

 

 

Elle demanda de pouvoir aller quelques temps loin de Versailles, feignant un malaise, elle qui n'avait jamais feint de toute sa vie. Pour pouvoir fuir loin. Pour partir loin de Versailles, et loin de sa maison. C'était le dernier endroit où elle voulait retourner maintenant.

 

Et elle erra longtemps, sans but, vers un endroit où il n'y avait personne qui pouvait l'entendre, qui pourrait l'entendre pleurer fort.

Et elle pleura fort ce jour là. Là où personne ne pouvait l'entendre presque crier dans une plainte.

Et elle hurla, ce jour là.

 

Oscar rentra à la maison très tard ce soir-là. Elle n'avait pas envie de manger. Elle n'avait envie de parler à personne. Pourtant elle devait manger. Autrement grand-mère aurait de nouveau suspecté quelque chose. Et elle devait continuer à se comporter comme d'habitude. Même si rien, maintenant, ne lui semblait plus comme avant. Elle s'était rappelé son enfance pendant tout ce temps, pour ne plus chercher à penser qu'enfant elle n'était plus. Parce que, dès maintenant et par là suite, il ne pourrait plus être auprès d'elle. Elle ne voulait pas le voir souffrir pour elle. Elle ne voulait pas souffrir, en le voyant souffrir.

 

J’ai bien fait, pensa t-elle, de le chasser de la maison, mais toutefois pour une mauvaise raison.

 

Loin d'elle il finirait par l'oublier, probablement. Et peut-être, la fin de ces petits mots était le signal de départ du changement d'André. Elle se dit que, peut-être, il l'avait déjà oublié. Pourtant, même ainsi, en pensant que tôt ou tard il l'aurait oublié, Oscar continuait à être triste, très triste. Elle, qui au fond, avait perdu son meilleur ami... son unique ami... André... maintenant elle devait se résigner à l'oublier... Qu'en aurait-elle fait de ses souvenirs de cette nuit ? Il lui suffisait de ne pas se les rappeler, pour que sa vie change radicalement et pour qu'André sorte de sa vie définitivement. Maintenant elle devait même dire adieu à ses souvenirs. Oublier, de nouveau. Pourtant malgré ses efforts pour chercher à oublier, à remplir sa vie et ses pensées avec autres choses, cela ne la faisait pas se sentir mieux. Seulement triste. Seulement beaucoup plus triste. Elle dit adieu même aux souvenirs de cette nuit. Avec douleur.

 

Mais il y avait tout même un autre problème resté non résolu. Tôt ou tard, inévitablement, grand-mère aurait demandé des nouvelles d'André. Et ceci la préoccupait. Aussi, décida t-elle à écrire à tous les parents d'André. Pour savoir où il était. Elle réfléchirait alors, lorsqu' elle saurait où était André, quoi faire.

 

Il s'en ait fallu au moins une semaine, avant qu'Oscar ne se sente un peu moins triste. Elle s'était aperçue, cependant, que certains instants de la journée étaient devenus plus difficiles à affronter. Au matin elle devait se forcer pour se lever et devait répéter mentalement plusieurs fois quels étaient ses devoirs. Et le soir, le soir surtout la mettait dans une tristesse profonde. Elle ne s'enfermait plus dans sa chambre. Jouer du piano ne la soulageait que légèrement. Elle passait ses soirées en cuisine avec grand-mère. À l'écouter. Elle lui demandait de lui raconter sa vie, restant auprès d'elle. Grand-mère la regardait. Bien qu'il était agréable pour elle d'avoir ainsi à ses côtés Oscar tant de temps et à l'avoir seulement pour elle, elle était triste, parce qu'elle aurait voulu la voir sourire, penser à quel vêtement mettre pour une fête, à comment se peigner les cheveux, à se préoccuper de plaire à un homme. Elle aurait voulu pouvoir parler à la jeune fille de l'amour, et ne pas sentir sa vieille voix raconter seulement ses souvenirs.

 

Un soir, à peine rentrée de Versailles, le général Jarjayes demanda à Oscar de se rendre à Paris, pour porter à un notaire un document important de famille. L'habitation du notaire était à sud de Paris. Oscar arriva dans la zone probable quelques heures après. Elle descendit du carrosse et décida de continuer le trajet à pieds. Les journées s'allongeaient, et il y avait encore de la lumière. Dans une main elle avait l'enveloppe et dans l'autre le petit mot avec l'indication de l'adresse du notaire. Elle s'était promenée pendant plusieurs minutes, mais ne réussit pas à trouver l'habitation. Il lui sembla être perdue.

Elle était arrivée à la place Louis le Grand. Oui, elle devait être perdue. Elle vit quelques personnes âgées assises au frais, près du ponton d'un vieil établissement. Discutant entre eux. L'un d'eux raccommodait une veste, et les autres tricotaient. Peut-être qu'avec eux elle aurait l'indication de ce qu'elle cherchait. Elle s'approcha.

"Excusez-moi, je dois me rendre chez le notaire Galperin, je cherche la Rue Montière, vous pourriez me dire où elle se trouve?"

La vieille dame souleva un peu la veste qui était passablement raccommoder et commença à expliquer : "Oui, vous en êtes assez loin, en effet. Maintenant vous devez tourner à droite à la fin de cette route et ensuite à gauche. Lorsque vous verrez la maison de la couturière, tournez ensuite à droite... "

 

Pendant que la femme continuait sa longue explication, le regard d'Oscar finit sur la veste que la vieille femme était en train de recoudre. C'était une vieille veste d'homme marron. elle avait un aspect étrangement familier. Elle était très  abîmée, noircie dans divers endroits comme si elle avait été... brûlée, et avait une quantité énorme de reprises... elle la reconnut. C' était la veste d'André.

La vieille femme avait terminé son explication et se tourna vers Oscar avec un regard interrogatif. "Monsieur, vous avez compris ce que je vous ai dit?"

"Euh, oui !  Excusez-moi, vraiment désolé, maintenant j'y vais, merci encore ".

Oscar courut, en prenant la mauvaise route. Lorsqu'elle fut suffisamment loin pour pouvoir n'être plus vu des femmes elle s'appuya à un muret.

Son coeur battait, inexplicablement plus fort. On aurait pu dire que c'était à cause de la course. Mais cela ne pouvait pas être la raison. Elle était habituée à courir.

André était là. C'était sa veste. elle chercha désespérément à comprendre qui pouvait habiter dans cet endroit. Chez qui s'était réfugié André. Il était là. À peine à quelques centaines de mètres d'elle. La veste était lourdement abîmée... il lui sembla, aussi, avoir vu du sang sur cette veste. Non, ça ne pouvait pas être possible. Elle fut prise d'une soudaine angoisse qu'elle n'avait jamais éprouvé dans sa vie. Les accrocs, le noircissement...

Qu'est-ce que c'était? Qu'était-il arrivé à André?

Elle chercha à respirer profondément, mais son coeur ne semblait pas lui donner de répit. Elle était seule, maintenant, et elle tremblait. Et dans l'enveloppe il y avait encore le document à porter chez le notaire. Son père l'attendait pour dîner. Elle appela un carrosse, pour se faire conduire à destination .Elle était très en retard pour le dîner. Au retour, cependant, elle contraignit le cocher à faire un détour très rapide à la place Louis le Grand. Pendant qu'elle passait en vitesse dans son carrosse, Oscar vit la vieille dame rentrer dans la maison. La veste et le matériel pour la couture étaient dans la  main d'un jeune homme, avec un pansement voyant à un bras et un aussi pansement voyant à une jambe.

Elle ne réussit pas, à cet instant, à ouvrir la fenêtre du carrosse.

"- ANDRE'!" hurla Oscar à travers la vitre. Le carrosse s'éloignait rapidement pour la ramener vers la maison.

André et Marianne disparurent derrière la porte numéro 6 de la place Louis le Grand.

 

Lorsque son père alla dormir, Oscar, armée de bougies, commença à fouiller entre les papiers de famille. Le nombre 6 place de Louis le Grand lui rappelait quelque chose de mal défini, mais quelque chose devait avoir à faire avec sa famille, même si elle se rappelait n'avoir jamais été là bas.

 

Elle fouilla partout, en cherchant à limiter au maximum les bruits. À la fin elle le trouva. Dans le vieux livre des comptes de la famille Jarjayes. 6, place Louis le Grand. L'adresse de leur vieux percepteur.

André était là, à la maison de leur vieil enseignant. Blessé.

Oscar éprouvait une sensation qu'elle n' hésita pas à définir d'absurde. Elle était inquiète pour lui. Elle avait vu ses pansements. Pourtant elle était... contente. Il était vivant. Et pas loin d'elle. Et pendant un instant il lui traversa à l'esprit l'idée absurde que les billets avaient disparus seulement parce qu'il était blessé et ne pouvait pas aller vers elle... C'est plausible. Elle remit à leur place rapidement les papiers. Ce soir Oscar avait une grande envie de jouer du piano.

Maintenant qu'elle savait où il était, les choses n'auraient pas été plus simples. Elle devait affronter un problème plus grand, l'amour d'André pour elle. Elle trouverait une solution d'une manière ou d'une autre. Maintenant, la chose plus importante était de savoir comment il allait et ce qui lui était arrivé. Le reste elle y penserait plus tard. Oui. Elle verrait le reste plus tard. La chambre d'Oscar se remplit des notes joyeuses émanant de son piano.

 

Elle avait trouvé une excuse plausible pour tous. Elle devait retourner chez ce notaire parce qu'elle y avait laissé là-bas ses gants. Oscar éperonna son cheval et galopa vers Paris. Elle avait enlevé la veste de l'uniforme, pour passer inaperçue sur les routes de Paris. Elle arriva à la place Louis le Grand qui était presque déserte. Elle chercha du regard la vieille femme près des pontons mais elle ne la vit pas. Elle descendit de cheval et regarda partout. Il y avait seulement la chaise où la vieille femme s'était assise la veille. Elle s'assit et s’appuya le dos au mur. Elle Ferma les yeux.

 

"Et maintenant? Que faire? Je ne veux pas parler avec lui... pas tout de suite... et si je frappe, il pourrait se montrer et me voir. Je ne veux pas qu'il me voie... maintenant. Je dois trouver une autre excuse pour revenir ici demain, et je dois arriver plus tôt... "

 

Une main toucha l'épaule d'Oscar.

 

"Oscar ? Est-ce toi ? C'est vraiment toi?"

 

Le vieil homme la regardait avec les larmes aux yeux, appuyé à son bâton.

 

"Professeur!  Oui, bien sûr, c'est moi... mais asseyez-vous, asseyez-vous, je vous en prie."

"Cela me fait plaisir de te revoir toi, ma fille!" lui dit le professeur en s'asseyant à la place d'Oscar. "André, il faut vite avertir André que tu es ici."

"Non !  S'il vous plait, non. Professeur, André ne doit pas savoir que je suis ici, il ne doit pas le savoir. Je… je suis ici seulement pour savoir comment il va."

"Il va mieux, Oscar, il a couru un grand et terrible danger mais il va mieux. Maintenant il enseigne, tu sais?"

"Comment ça? Je ne comprends pas."

"Oui, Oscar, André enseigne à deux garçons du quartier. Histoire, philosophie, littérature et latin. Les mêmes choses que je vous ai enseigné lorsque vous étiez des jeunes gens. Et il est bon, tu sais, il est vraiment bon. Tu devrais le voir , Oscar, tu devrais le voir."

Oscar sourit. "Je ne l'aurais jamais pensé, mais André est une personne patiente... peut-être, peut-être qu'il aurait dû faire cela depuis longtemps... et ne pas perdre son temps avec... "

"Je ne crois pas qu'il regrette quoi que ce soit par rapport à la vie qu'il a mené jusqu'à présent."

Oscar resta silencieuse, pendant un instant, ensuite reprit : "Qu'est-ce qui lui est arrivé? Pourquoi a t-il ces cicatrices?"

"Notre André est un héros, tu sais, et comme tous les héros c'est un inconscient. Il s'était levé tôt ce matin-là, il devait prendre le pain pour nous deux et pour Marianne, ma gouvernante, avant d'aller... heu, Oscar, il est inutile de se voiler la face, avant de venir à Versailles pour toi. Il le faisait tous les matins. Ensuite il revenait ici et donnait un coup de main à la maison. A la fin de la matinée il commençait à faire la leçon. Ce matin-là cependant, un groupe de bêtes, parce que je ne sais pas les définir autrement qu'ainsi, est allé dans la boulangerie pour s'emparer du four et emporter le pain et sans payer. André était là, et cet inconscient a tenté de les arrêter. Quelqu'un a mit le feu pendant qu'ils luttaient et tandis que le boulanger fuyait par l'arrière-boutique, André était resté dans le fournil, une jambe bloquée par une poutre tombée du plafond à cause le feu. Il a beaucoup souffert, tu sais Oscar, mais maintenant il va mieux. Remercions Dieu de l'avoir sauvé et qu'il aille mieux. Il pensait qu'il pourrait venir te voir déjà le jour d'après! Ça n’a pas été facile de le convaincre de rester au lit. Toujours est-il qu'il doit faire le minimum d'efforts possibles et puis, avec cette jambe, il ne peut pas encore monter. Mais il a recommencé à travailler, et cela il le fait pour le mieux. Pourquoi ne pas le saluer ? Il serait si content, si content de te voir... "

"Je ne peux pas, je ne peux vraiment pas... je... "

"Tu es devenue très belle, tu le sais, Oscar ? Et ton coeur ne semble pas avoir beaucoup changé. Je peux bien le comprendre, ce garçon."

"Professeur, s'il vous plaît... ne parlons pas de ceci... je ne veux plus qu'André souffre à cause de moi."

"Oscar, je voudrais te dire seulement une chose. Tu dois laisser à André décider de sa vie. Ne le fais pas pour lui. Il a le droit de choisir ce qu'il veut dans la vie. Il a le droit même de faire des mauvais choix. Ce n'est pas à toi de décider pour lui. Tu ne peux rien faire de plus. Et va donc le voir. Malgré tout ce que tu peux dire... ça se voit, tu sais, que tu en as envie... "

"Professeur, peut-être, demain, mais, je vous le demande, ne lui dites pas encore que je suis venue ici, s'il vous plait. Demain. Demain je reviendrai."

 

Oscar prit congé du professeur et monta à cheval. Elle disparut à l'horizon. Le vieux professeur regarda la fenêtre de sa chambre, où André terminait ses leçons.

 

Il sourit.

 

Elle est venue, André, Oscar est venue. Elle est venue pour toi.

 

L'après-midi du jour suivant Marie Antoinette avait prétexté une légère indisposition et avait congédié Oscar en avance. Ainsi Oscar était retournée à Paris. Elle ne savait pas ce qu'elle allait lui dire, ni même pas si elle aurait vraiment le courage de le voir. Ce qui était certain c'est qu'elle allait vers Paris à grande vitesse.

 

Elle arriva à la place Louis le Grand à cinq heures de l'après-midi. Elle attacha son cheval à un arrêt. À la fenêtre elle vit le professeur.

Oscar lui fit signe de la rejoindre. Le professeur sortit lentement de la chambre, appuyé sur son bâton et commença à descendre doucement les marches vers l'extérieur de la maison.

 

"Il fait la leçon Oscar, mais vas-y, vas le voir."

"Non, attendez! Dans quelle chambre est-il?"

"La deuxième à gauche, il faut monter l'escalier."

"Très bien, mais ne lui dites rien."

 

Oscar monta dans l'escalier avec le maximum de silence. Elle arriva face à  la chambre  et s'appuya au mur près de la porte.

Non. Elle ne réussissait vraiment pas à entrer. Elle ne pouvait pas.

 

"Bien, les garçons !  Nous passons maintenant à l'histoire. Qui me reprend ce que nous avons dit hier à propos de Louis XIV?"

 

C'était sa voix.

 

Oscar s'assit avec le dos appuyé au mur. Elle écouta les réponses des garçons, et les explications qu'il fournit.

Elle ne savait pas pourquoi elle était là, elle ne savait pas pourquoi elle ne voulait pas entrer, ne savait pas pour elle ne voulait pas s’en aller. Elle savait seulement que c’était agréable, d'être là, et d'écouter, en cachette, sa voix.

 

Après un long moment elle décida qu'il était temps de rentrer à la maison.

Elle alla, en recommandant au professeur, qui l'avait trouvé encore en haut de l'escalier, de ne pas parler à André. Oscar descendit l'escalier et se prépara à  monter à cheval. Le professeur entra dans la chambre d'André et lui fit signe de s'approcher en silence à la fenêtre.

"Ne te fais pas voir, André."

Alors il la vit, pendant qu'elle montait sur le cheval, s'enfiler sa veste et partir rapidement de là.

Lorsqu'elle disparut de sa vue il se tourna vers le professeur, avec le regard le plus heureux que le vieil homme n'ait vu depuis qu'il le connaissait, même plus heureux que lorsqu' il le voyait, enfant, jouer avec elle.

"C'est déjà le deuxième jour, qu'elle vient ici", dit le professeur discrètement à André à l'oreille.

 

Ce même soir, Oscar était rentrée au château étrangement contente, sans qu'il ne ce soit ensuite rien passé d' important dans sa vie. Ou tout au moins elle le pensait. La logique le lui confirmait. En rentrant elle alla voir grand-mère en lui annonçant avoir une faim de loup et en protestant vivement parce que la table n'était pas encore mise.

Grand-mère la regarda s'éloigner vers sa chambre. Il lui sembla remarquer qu'elle lui cachait quelque chose de pas clair... peut-être à cause du menuet...

 

Mon enfant, tu finiras pour m'enterrer avec tous ces changements d'humeur à l'improviste. J'ai passé l' âge! pensa la vieille gouvernante des Jarjayes.

 

L'après-midi suivant, à la fin de son roulement, Oscar repartit de nouveau à Paris. Il était déjà tard malheureusement. Et elle ne pouvait pas rester longtemps.

 

 C'est pas plus mal, pensa t-elle. Je ne devrais pas du tout le voir.

 

Elle arriva à la place  Louis le Grand que déjà elle commençait à trembler. Elle trouva le professeur assis sur le seuil de la maison. Oscar fit l'habituel signal de silence au professeur. Il sourit et lui indiqua la rampe d'escalier. Oscar arriva en haut.

André enseignait le latin, aujourd'hui.

 

Non, André... pas le latin... pensait Oscar... cela a toujours été la matière que tu haïssais le plus...

 

Pendant que les garçons répétaient la première déclinaison Oscar ne s'aperçut pas qu'André s'était approchées à la fenêtre et que, d'en bas, le professeur lui avait fait... un autre type de signal...

André termina sa leçon et salua les garçons. Oscar pensa qu'elle devait vite fuir. Les garçons coururent dehors dans l'escalier presque en la renversant. Ce fut à cet instant qu'Oscar entendit une voix qu'elle n'aurait pas dû entendre en cette journée... s'adresser à elle.

 

"Oscar! Que fais tu ici? Entre!  Entre, je t'en prie."

 

Oscar se tourna. Fin de la fuite. Mais qui sait...

 

"Euh, non, André!  Maintenant vraiment je ne peux pas, je suis en retard et je dois rentrer à la maison rapidement, c'est-à-dire maintenant!"

"Ah, je comprends... mais tu reviendras demain?"

"Je ne le sais pas, comment te le dire maintenant ? Quelle question? Je ne le sais pas et ça suffit, de toute façon je suis contente de savoir que tu vas mieux. Adieu André!"

 

Elle avait dit cette phrase en respirant à peine et avait couru avant de pouvoir entendre de nouveau cette voix.

En sortant elle avait cherché le professeur, mais elle ne l'avait pas trouvé. Il devrait lui rendre des comptes. Demain.

 

Grand-mère la vit rentrer au château plus étrange que jamais. Elle emprunta l'escalier en courant. Parlant toute seule. Elle grognait.

 

Il se passe quelque chose ici. Seigneur donnes-moi la force... de le supporter, pensa grand-mère pendant qu'Oscar s'éloignait en disputant un professeur qui... s'était mêlé de ses affaires.

 

La Reine fut prise d'une grande fièvre, bien que le jour, son activité sociale était réduite au minimum indispensable. Ceci permit à Oscar de rentrer rapidement au château, ce dimanche, et donc d'être libre pour tout l'après-midi. Elle aurait dû rentrer à Versailles pourtant pour les rondes de nuit. Elle décida de retourner à la maison et de se changer, pour ensuite aller à Paris.

Arrivée dans sa chambre elle s'assit devant le miroir.

 

 Je dois retourner là-bas. Et je dois parler avec lui. Même si je n'en ai pas envie. Je dois lui donner une explication. Et bien sûr je lui dirai la vérité... plus ou moins... et c'est-à-dire que j'étais inquiète pour lui, que je suis contente de savoir qu'il va mieux, qu'il doit mener sa vie de l’avant et... et... que je voulais seulement le voir… en amie... en amie bien sûr...

 

Elle se leva de la chaise pour aller se montrer à l'escalier.

"Grand-mère!  Tu pourrais venir ici?"

Elle retourna dans sa chambre et se regarda de nouveau dans le miroir. Elle

avait mis son complet vert de cavalier.

Grand-mère entra dans la chambre.

 

"Qu'est ce que il y a Oscar?"

"Tu peux venir ici un instant, s'il te plait." Grand-mère la trouva avec une brosse en main.

"Tu... tu pourrais me peigner les cheveux... s'il te plait?"

"Hein?"

"Oui, je voudrais que tu.... me les attache... ça ira bien... ça ira bien même avec une simple queue de cheval... voilà... ça changera... ce sera parfait!"

Grand-mère regarda avec un air ébahi la jeune femme et s'apprêta à la coiffer.

"Puis-je au moins savoir la raison ? Tu ne te les ai jamais attaché."

"Oui, c'est... vrai... mais dans la vie il faut de temps en temps... changer... "

Grand-mère se joignit les mains et regarda avec un sourire presque diabolique la jeune femme à travers le miroir. "Ben, si c'est comme ça... nous pourrions faire beaucoup de choses... une tresse par exemple... ou bien des boucles, tirer sur les cheveux..."

"Grand-mère!  S'il te plait !  J'ai dit une queue de cheval !  C'est tout ce que je voudrais!"

"Très bien... pour le moment..."

Elle commença à lui peigner les cheveux.

"Et on peut savoir où tu vas? Il me semble que tu t'apprêtes à sortir... "

"Une promenade, grand-mère, je vais seulement faire une promenade. Toute seule. Ce soir je dois faire la ronde de nuit à Versailles et je veux seulement monter un peu."

"Oui, je comprends", dit grand-mère en souriant ironiquement. "bien! Maintenant le ruban. Et voilà."

Grand-mère prit un bouton de rose blanche du vase de fleurs et l'enfila entre le noeud vert et les cheveux de la jeune femme.

"Que... qu'est ce que c'est que cette fleur? Enlèves- moi ça!"

"C'est jolie! Je trouve. Tu dois seulement faire une promenade toute seule, non ? Et alors qu'est ce qui te gêne? Allons... il fait plaisir à une pauvre vieille... "

"Très bien, ça ira. As-tu fini ? Je dois y aller ! " En se levant brusquement elle fit tomber le mannequin avec son uniforme.

"Mon dieu ! Désolée... Je dois y aller ! Je dois y aller!"

Oscar courut de la chambre.

La vieille femme ramassa le mannequin et la veste par terre et s'assit devant le miroir où avant s'était assis sa chère enfant.

Elle regarda l'uniforme. Et se tourna vers le miroir.

 

"Mon Dieu", dit-elle en souriant, "ai-je vraiment vu ce que j'ai vu ? Mon enfant... que dis-je... mon Oscar est...... est tombée amoureuse ! Pauvres de nous ", dit-elle en souriant encore,  "et pauvre de lui! Vas-y, vas mon enfant, vole vers lui !Tôt ou tard je saurai qui c'est..."

 

Même André entre temps était aux prises... avec le miroir.

 

Ils sont vraiment mal coiffés... Oscar... viendras-tu aujourd'hui aussi? Je voudrais beaucoup qu'il en soit ainsi... Je ne sais pas ce que je vais te dire... je ne sais pas ce que tu as pensé lorsque tu as lu ce que j'ai écrit... et tu n'as pas lu le billet que je t'ai écris ce jour-là. Je ne sais pas ce qu'elle pense de moi maintenant, je ne sais pas ce qu'elle se rappelle de cette nuit. J'ai une seule certitude. Tu es venue me chercher. Je croyais que tu me haïssais, mais tu es venue me chercher. Tu étais embarassée lorsque tu m'as vu. Tu ne sais pas combien de mon côté... j'aurais voulu... j'aurais voulu descendre cet escalier... et t'embrasser fort... et te dire mille choses... ou peut-être rien... seulement te tenir... te tenir dans mes bras et ne plus te laisser t'en aller. Je ne sais pas ce qu'il se passera aujourd'hui. Je ne sais pas si tu viendras. Je ne sais pas ce que je te dirai. Je ne te dirai peut-être rien. Je suis déjà heureux ainsi. De te voir. Je sais seulement que je suis heureux.

 

André entendit frapper à cet instant précis à la porte. Il se montra à la fenêtre. Ce qu'il vit lui coupa le souffle. C'était elle. Elle n'avait jamais été aussi belle. Il ne se rappellait pas qu'elle ait jamais été aussi belle qu’aujourd'hui. Il y avait... il y avait quelque chose de différent... certes, pensa André... les cheveux... c'est encore plus beau. Si seulement je pouvais... te le dire sans que ça ne te fasses fuir d'ici...

Il l'entendit monter l'escalier. Oscar était inquiète. Elle avait repassé durant le parcours toutes les choses qu'elle voulaient dire, mais à présent elle sentait l'air lui manquer. Je dois l'affronter. Je le dois.

Elle frappa à la porte.

André vint lui ouvrir.

"Salut, Oscar... comment vas-tu?" dit André non sans embarras.

"Bien. Excuses moi pour hier mais j'étais très en retard. Et je ne sais pas combien de temps je pourrai rester aujourd'hui."

"Ce n'est pas important. Je suis content de te revoir. As-tu vu le professeur ? Il a beaucoup vieilli mais son esprit est encore très vigoureux."

"Ils disaient qu’en fin de compte le professeur est mieux de toi ! Mais qu'est ce que tu as fait ? Tu es... un inconscient, André, tu devais vraiment faire le héros?"

 

Voilà, André rit, le plaisanterie a fonctionné... il suffira de ne pas parler de certaines choses et...

 

"Ah Ah ! Tu veux l'exclusivité du rôle de l'héroïne ? Bah, d'habitude ce rôle te concerne davantage ! Penses-tu que ce soit moins inconscient de se lancer d'un cheval en course, se blesser dans la chute et ensuite ne rien dire de sa blessure jusqu'à s’évanouir ? Oui, le rôle d'héroïne te vas beaucoup mieux , Oscar!"

 

Il rit... et il est très beau lorsqu'il rit... je voudrais que tu ris toujours... mon amour...

 

"Alors ça veut dire que je dois te donner quelques répétitions" de héros "... mais j'ai vu que le maître maintenant c'est toi dans la maison... "

"Oui, tu sais, je n'aurais jamais pensé que cela me plairait autant. J'ai rencontré le professeur après tant d'années. Il ne peut plus enseigner et il me l'a proposé. Et cela me plaît, ça me plaît vraiment. Je peux ainsi participer économiquement à la maison. Je gagne bien, tu sais. Et le professeur va mieux maintenant, parce qu'avec ce que je gagne on peut vivre un peu mieux."

 

Il est bien ici... il est heureux... il ne rentrera pas avec moi... je devrais être heureuse pour lui... certes... c'était ce que je voulais... mais... mais pourquoi je ne suis pas heureuse pour lui alors ?...

 

"Je suis contente, je suis très contente pour toi. C' est une vie sûrement plus belle et une digne que celle que tu avait... excuse-moi André, excuse-moi... Vraiment. Je suis heureuse pour toi."

 

Tu es heureuse pour moi ? Alors pourquoi tes yeux semblent me dire le contraire ? Dis moi de revenir avec toi... dis-le moi Oscar ! ... je le ferais aussitôt si tu me le demandais... je... voudrais continuer à enseigner... mais je pourrais... on pourrait... Oscar... je pourrais trouver une solution...

 

"Et ensuite", reprit Oscar, "la vie ici est sans doute moins casse-pieds que celle à Versailles..."

 

Oscar commenca à raconter les dernières idées absurdes de Marie Antoinette. André rit aux éclats. Il s'était passé au moins deux heures depuis qu' Oscar était entré dans sa chambre. Pendant qu'Oscar racontait les caprices de la Reine et les potins des stupides dames de la cour, André regardait son Oscar. Il cherchait à imprimer son image dans ses yeux.

 

Tu es si belle... je... je voudrais...

 

André était en train d'allonger une main vers d'elle lorsque les tintements de la pendule firent comprendre à Oscar que c'était l'après-midi. Elle se leva brusquement.

 

"Je dois y aller ! Je dois y aller... Je dois être à Versailles en moins de deux heures!"

 

André se leva.

 

"D’accord, je te raccompagne jusqu’à la porte."

 

Sur le seuil Oscar se tourna vers lui.

 

"Voilà, André... je voulais te demander... "

 

Dis-le moi, mon amour, dis-le moi, je t'en prie... et  je viendrai partout avec toi.

"André, je voulais te demander si je pouvait revenir te voir, comme amie je veux dire."

 

Elle n'attendit pas la réponse et courue en bas de l'escalier.

Pendant qu'elle courait André vit la fleur dans les cheveux courir avec elle.

"BIEN SUR!"

Il le hurla pendant qu'elle disparaissait.

 

... n'importe quoi... pour te revoir... André referma la porte.

 

Dans le prochain épisode: Ils se rencontrent, ils parlent, s'effleurent. Oscar et André semblent avoir retrouvé quelque chose qu'ils avaient perdu après la "fameuse" nuit. Mais quelqu'un est sur leurs traces. Que se passera-il encore ? Parfois, la pluie peut porter le bien et mal. Tout cela dans le huitième épisode de "l'Erreur".

Connaissance topographique - par Laura: La Place Louis le Grand est l' actuelle Place Vendôme. À l'époque où ce récit se déroule, elle s'appelait Place Louis le Grand, mais pendant la Révolution, de 1793 à 1799, son nom changea en place des Piques. Ensuite, prit le nom  de place Vendôme.

A suivre...

 

Mail to: f.camelio@libero.it

Version française par Elelya - mail to refletdusoleilsurlamer@yahoo.fr et Sweet mail to mhyrtilla@yahoo.com

 

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Pubblicazione del sito Little Corner del maggio 2006