Allarme alla diossina nei pressi degli inceneritori
Bernard Kouchner, ministro della salute (francese), annuncia l'avvio di uno studio epidemiologico nazionale per valutare il rischio sanitario. Nella valle d'Albertville, nella Savoia, la popolazione vive con angoscia il più grave episodio di questo tipo che la Francia abbia conosciuto.
Le Monde, 11 aprile 2001
• LE MONDE | 10.04.02 | 10h50
• MIS A JOUR LE 10.04.02 | 16h36
Alertes à la dioxine autour des incinérateurs
Bernard Kouchner, ministre de la santé, annonce le lancement d'une étude épidémiologique nationale pour évaluer le risque sanitaire. Dans la vallée d'Albertville, en Savoie, la population vit avec angoisse le plus grave épisode de ce type que la France ait connu.

Chambéry de notre correspondant

Pourtant, que la montagne est belle ! Dominée par les sommets enneigés des massifs environnants, la vallée d'Albertville (Savoie) ressemble en ce début de printemps à une chanson de Jean Ferrat. A l'entrée de l'ancienne capitale des Jeux olympiques d'hiver de 1992, les touristes en route vers les stations de ski de Tarentaise passent sous l'élégant pont de Gilly-sur-Isère, construit à l'occasion des JO.

Ils ne peuvent pas se douter qu'ils circulent alors à quelques mètres d'une usine d'incinération des ordures ménagères responsable d'une pollution sans précédent : "La plus grave crise de dioxine qu'ait connue la France", selon les termes du préfet de la Savoie, Paul Girot de Langlade (Le Monde des 26 janvier et 16 février). Avant l'arrêt de l'incinérateur, le 24 octobre 2001, des analyses avaient révélé que les fumées du four contenaient 75 nanogrammes de dioxines par mètre cube : 750 fois la norme européenne...

Les dioxines se fixant d'abord sur les graisses, les autorités administratives ont décidé d'un plan d'assainissement, après avoir relevé des taux anormalement élevés dans le lait et la viande des vaches. En cinq mois, 3 510 animaux - 1 870 bovins et 1 640 ovins et caprins - ont déjà été abattus sur 295 exploitations. Le préfet estime désormais que le total des bêtes détruites atteindra les 5 600 : le bassin d'Albertville en comptait 8 000 avant la crise.

Si l'abattage massif des troupeaux, la destruction du lait et le retrait du foin contaminé ont permis à plusieurs exploitations de retrouver une situation conforme aux normes, toutes ces mesures ont traumatisé les agriculteurs. Et n'ont aucunement rassuré les habitants de la trentaine de communes exposées à la pollution, à la fois inquiets pour leur santé et indignés qu'on ait pu laisser fonctionner une unité qui n'était plus aux normes depuis dix ans.

Sur sa ferme du village de Montailleur, à 8 km à vol d'oiseau de l'usine d'incinération, Jean-Marc Gromier, producteur de lait et membre de la FDSEA, a les larmes aux yeux lorsqu'il évoque la perte de la moitié de son troupeau, une centaine de vaches laitières avant la crise. "Voir disparaître des bêtes qu'on a élevées et traites deux fois par jour, c'est comme un deuil", confie-t-il.

Bien sûr, il a été indemnisé. Et, comme d'autres producteurs du secteur, son lait peut à nouveau être collecté par une coopérative : les dernières analyses se situent au-dessous des 5 picogrammes de dioxines par gramme de matière grasse, norme de retrait.

Mais les sommes versées par le syndicat intercommunal mixte de gestion des déchets du secteur d'Albertville (Simigeda), propriétaire de l'installation polluante, ne compensent pas totalement les pertes. Encore moins le coup porté à une agriculture qui se veut respectueuse de la nature et soucieuse de la qualité de ses produits, à l'image du fromage de Beaufort, dont la zone de production n'est pas épargnée par la crise.

Agriculteur "bio" installé sur la commune de Mercury, à 5 km de l'usine, Pierre Trolliet, militant de la Confédération paysanne, est encore plus sévère. Ses 140 moutons ont été éliminés et la vente de ses produits (pommes, volailles, œufs...) s'est effondrée. Le 12 mars, son syndicat a porté plainte pour "empoisonnement" avec l'union départementale CFDT et l'Association citoyenne active de lutte contre les pollutions (Acalp). Plus de 160 plaintes avec constitution de partie civile, émanant de particuliers et d'associations, ont d'ailleurs été déposées auprès du juge d'instruction du tribunal d'Albertville et le procureur de la République, Monique Hugo, s'apprête à ouvrir une information judiciaire.

"En détruisant les troupeaux, on a fait du nettoyage par le vide. Mais cela ne veut pas dire que la zone est redevenue saine", remarque M. Trolliet, inquiet de la qualité de la terre, de l'herbe et du foin, qui, en plaine, sera fauché en mai. Le sentiment de colère est le même chez Marie-Hélène Bidet, jeune agricultrice, mère de trois enfants, qui avec son mari possède 80 chèvres mohair à Queige, dans le Beaufortin. "On ne sait pas ce qu'il va rester de notre troupeau. Et, surtout, on a le sentiment d'avoir été trompés."

La chambre d'agriculture de la Savoie recommande aux exploitants de retarder autant que possible la mise à l'herbe des animaux situés dans la zone contaminée, ou de compléter le pâturage par du foin sain distribué à l'étable. Par ailleurs, 8 500 tonnes de foin pollué doivent être retirées des exploitations. Le stockage des balles - en attendant leur destruction dans une installation appropriée - pose d'énormes problèmes de sécurité au Simigeda. Un des terrains sur lesquels le foin toxique est entreposé a ainsi déjà subi deux incendies, le 22 mars et le 3 avril.

Chaque samedi, l'Acalp organise une permanence à la cure de l'église de Grignon, commune voisine du four. Les adhésions affluent. Coprésidente de l'association, qui regroupe aujourd'hui 500 personnes, Dominique Frey est secrétaire médicale. Elle s'est installée en 1988 dans ce village de 1 600 habitants. "Dans ma rue, 24 personnes ont été victimes de cancers et 78 sur l'ensemble de la commune. On ne dit pas que c'est les dioxines du four. On veut simplement savoir s'il y a un lien. Et on ne nous répond pas."

"Il a fallu nous battre pour obtenir des analyses du lait maternel. Trois d'entre nous étaient au-dessus de la moyenne nationale des 16,5 picogrammes. Ça fait quatre mois qu'on a peur d'empoisonner nos enfants et qu'on doit se débrouiller", s'emporte, de son côté, Frédérique Sanchez, infirmière de profession, également coprésidente de l'Acalp.

Cette jeune mère de trois enfants donnait le sein à son dernier bébé lorsque son lait a été contrôlé à 15 picogrammes à la trente-deuxième semaine d'allaitement. "Lorsqu'on sait que le taux de dioxine est le plus fort en début d'allaitement et qu'il diminue d'environ 12 % par mois, j'ai dû atteindre 30 picogrammes. Le lait des vaches est retiré à partir de 5. Et le nôtre ? A partir de quand doit-on cesser de le donner à notre gamin ?", s'interroge-t-elle.

Ingénieur retraité, membre de la Fédération Rhône-Alpes de la protection de la nature (Frapna), qui a également porté plainte, Pierre Ivanès réside lui aussi à Grignon. Dès 1992, il s'était inquiété auprès du président du Simigeda de la teneur des poussières noires émises par l'incinérateur de Gilly.

Six ans plus tard, et au nom d'un collectif d'associations, il réclamait des analyses des polluants et des dioxines. Mais ses interventions, comme d'ailleurs celles de Michel Roulet, unique élu Verts du syndicat mixte, n'ont pas été écoutées. Et le four a continué à polluer la vallée...

Philippe Révil

• ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 11.04.02

 

 

LE MONDE | 10.04.02 | 10h50
MESSO IN RETE IL 10.04.02 | 16h36
Allarme alla diossina nei pressi degli inceneritori
Bernard Kouchner, ministro della salute (francese), annuncia l'avvio di uno studio epidemiologico nazionale per valutare il rischio sanitario. Nella valle d'Albertville, nella Savoia, la popolazione vive con angoscia il più grave episodio di questo tipo che la Francia abbia conosciuto.

Chambéry dal nostro corrispondente

Eppure, com'è bella la montagna ! Dominata dalle cime innevate dei massicci circostanti, la vallata di Albertville (Savoia) assomiglia in questo inizio di primavera a una canzone di Jean Ferrat. All'entrata dell'antica capitale dei Giochi olimpici invernali del 1992, i turisti in viaggio verso le stazioni sciistiche di Tarentaise passano sotto l'elegante ponte di Gilly-sull'Isère, costruito all'epoca dei Giochi olimpici.

Non immaginano neppure che passano ad alcuni metri da un inceneritore di rifiuti responsabile di un inquinamento senza precedenti : " La più grave crisi di diossina che la Francia abbia avuto", sono le parole usate dal prefetto della Savoia, Paul Girot de Langlade (Le Monde del 26 gennaio e del 16 febbraio). Prima del blocco dell'inceneritore, il 24 ottobre 2001, delle analisi avevano rivelato che i fumi del forno contenevano 75 nanogrammi di diossine al metro cubo : 750 volte superiori alla norma europea ...

Siccome le diossine si fissano prima di tutto sui grassi, le autorità amministrative hanno deliberato un piano di risanamento, dopo aver rilevato dei tassi troppo alti nel latte e nella carne delle mucche. In cinque mesi, 3510 animali - 1870 bovini e 1640 ovini e caprini - sono già stati abbattuti in 295 allevamenti. Il prefetto stima che la cifra totale degli animali abbattuti sarà quasi 5600 : la conca di Albertville ne contava 8000 prima della crisi.

Anche se l'abbattimento massiccio degli allevamenti, la distruzione del latte e il ritiro del fieno contaminato hanno permesso a parecchie aziende di ritrovare una situazione conforme alla norma, tutti questi provvedimenti hanno traumatizzato gli agricoltori. E non hanno in nessun modo rassicurato gli abitanti della trentina di comuni esposti all'inquinamento, preoccupati e nello stesso tempo indignati che si sia potuto lasciar funzionare una unità che era al di fuori dei limiti normativi da dieci anni.

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Ma le somme versate dal sindacato intercomunale misto di gestione dei rifiuti del settore di Albertville (Simigeda), proprietario dell'installazione inquinante, non compensano del tutto le perdite. E ancora meno il colpo inferto a una agricoltura che voleva essere rispettosa della natura e attenta alla qualità dei suoi prodotti, ben rappresentata dal formaggio di Belfort, la cui zona di produzione non è stata risparmiata dalla crisi.

Agricoltore "bio" nel comune di Mercury, a 5 km dall'inceneritore, Pierre Trolliet, iscritto alla Confederazione contadina, è ancora più duro. Le sue 140 pecore sono state eliminate e la vendita dei suoi prodotti (mele, pollame, uova...) è distrutta. Il 12 marzo scorso, il suo sindacato ha sporto denuncia per "avvelenemento", sostenuto dall'unione dipartimentale CFDT e dall'Associazione cittadina attiva di lotta contro gli inquinamenti (Acalp). Più di 160 denunce con costituzione di parte civile, fatte da privati e da associazioni, sono d'altronde state depositate presso il giudice d'istruzione del tribunale d'Albertville e il procuratore della Repubblica, Monique Hugo, si appresta ad avviare un procedimento.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Copresidente dell'associazione, che raggruppa oggi 500 persone, Dominique Frey è segretaria sanitaria. Lei è venuta ad abita in questo villaggio di 1600 abitanti nel 1988. "Nella mia strada, 24 persone sono state vittime di tumori e 78 in tutto il comune. Non diciamo che è la diossina dell'inceneritore. Vogliamo semplicemente sapere se c'è un collegamento. Ma non ci rispondono."

 

 

 

 

 

 

 

Ingegnere in pensione, membro della Federazione Rhône-Alpes della protezione della natura (Frapna), che ha egli pure sporto denuncia, Pierre Ivanès abita anche lui a Grignon. Dal 1992 aveva manifestato la sua preoccupazione al presidente della Simigedella quantità di polveri nere emesse dall'inceneritore di Gilly.

Sei anni più tardi, per conto di un collettivo di associazioni, reclamava delle analisi degli inquinanti e delle diossine. Ma i suoi interventi, come pure quelli di Michel Roulet, unico Verde eletto del sindacato misto, non sono stati ascoltati. E l'inceneritore ha continuato a inquinare la valle...

Philippe Révil

ARTICOLO PUBBLICATO NELL'EDIZIONE DELL'11.04.02